En une fraction de seconde, il y a un an, sa vie a basculé. Celle de toute sa famille également : ses trois enfants, petits-enfants, son compagnon. Dans la nuit du 19 au 20 octobre 2024, après une première partie de soirée dans un bar, Rachel Le Ny et une de ses amies décident de poursuivre la soirée dans la plus grande discothèque de Bretagne : le Tremplin à Montauban-de-Bretagne. À 54 ans, cette habitante de Médréac (Ille-et-Vilaine) se voit refuser l’entrée en raison d’une « alcoolémie trop importante ». « J’avais bu trois bières. Mon taux était de 0,78 g par litre de sang soit 0,39 mg par litre d’air. » Le ton monte. Les deux quinquagénaires s’agacent. Insultes, doigts d’honneur…

D’après les faits exposés lors d’une première audience, fin juin 2025, le patron de la discothèque descend pour « calmer le jeu ». Une discussion agressive démarre entre Rachel et « Mike », le patron. Le reste de l’altercation se passe hors champ des caméras de vidéosurveillance. À 00 h 59, les caméras captent une main qui donne une claque. Rachel Le Ny s’écroule par terre. Inanimée. Sa tête heurte le sol. Que s’est-il passé entre ses deux moments ? Mike a reconnu avoir donné la claque mais explique que Rachel venait de lui donner un coup de pied à l’entrejambe. Contacté, celui-ci n’a pas donné suite à nos sollicitations. L’affaire, pour laquelle le patron est poursuivi pour violences volontaires ayant entraîné mutilation ou une infirmité permanente, a été renvoyée pour jugement en avril 2027. Le tribunal préfère attendre une année supplémentaire, le temps d’obtenir le bilan de santé consolidé de la quinquagénaire.

ITT provisoire de plus de 100 jours

« Ma mère a d’ores et déjà une ITT provisoire de plus de 100 jours, rappelle Ludwig Touanel, le benjamin de la fratrie. Elle a eu de multiples fractures à la tête, une hémorragie cérébrale, des fractures ouvertes… On verra ce qu’il ressort de cette audience mais on a failli perdre notre mère. Depuis, elle n’est plus du tout comme avant. Elle s’est renfermée sur elle-même. Ne parle presque plus, elle est dans la lune, elle est fatiguée et dort beaucoup. Pour nous aussi, c’est dur. On s’est relayés à son chevet pendant des mois pour la stimuler. On a aussi géré tout le côté administratif et avancé d’énormes frais. C’est compliqué. »

Assise aux côtés de ses fils, Rachel parle peu. La quinquagénaire ne se souvient de rien. Trou noir. Hospitalisée entre la vie et la mort pendant deux jours en soins intensifs à Pontchaillou, elle a ensuite été soignée une semaine en soins continus, puis trois semaines en neurologie. La quinquagénaire ne reconnaissait mêmes pas ses propres enfants. « On a accroché nos photos sur le mur avec nos prénoms », souffle Kylian Touanel.

Après Pontchaillou, Rachel a été transférée au pôle de rééducation de Saint-Hélier à Rennes où elle est hospitalisée depuis un an. Aujourd’hui en ambulatoire, trois fois par semaine. Ses journées sont rythmées par des rendez-vous avec l’ergothérapeute, kinésithérapeute, psychologue, etc. « Mon bras droit ne bougeait pas, dit simplement Rachel. Ça va mieux. Mais ma jambe, ça reste difficile. J’ai du mal à monter des marches. »

Retrouver du travail

Le prochain combat de Rachel ? Obtenir de nouveau son permis de conduire qui a été suspendu par la préfecture suite aux graves séquelles neurologiques. Il lui faudra aussi retrouver un travail. « On est en train de monter un dossier RQTH, pour qu’elle soit reconnue comme travailleuse handicapée », ajoute Kylian. Il lui faudra aussi espérer retrouver le goût et l’odorat qu’elle a complètement perdus. Quant à la surdité de son oreille droite ? « Ça ne semble pas s’améliorer. » Kylian et Ludwig se désolent : « Notre mère ne sera plus jamais comme avant. » Rachel, elle, continue de sourire à ses fils.