Par

Zoe Hondt

Publié le

1 nov. 2025 à 18h17

Il apparaît avec la main droite bandée et un œil au beurre noir encore gonflé dans le box des prévenus. Lundi 27 octobre, un homme de 36 ans a été jugé au tribunal de Lille (Nord) pour violences avec usage d’une arme. Les faits se déroulent deux jours plus tôt, à Lille : au bar Le Relax, dans le quartier Wazemmes, une scène d’une rare violence s’est déroulée entre trois hommes. Deux ont été victimes de coups de couteau. Ils tentaient de protéger des femmes importunées par le troisième individu. Le prévenu n’a pas la même version des faits.

« Il avait la volonté de poignarder »

Il est environ minuit dans la nuit du 24 au 25 octobre. Au bar Le Relax, certains clients se plaignent d’un homme « un peu lourd et insistant » avec les femmes. Le gérant avait déjà repéré l’individu « pas net » dès son arrivée. Il demande à deux amis et habitués de le surveiller. Un peu plus tard, une femme rapporte à ces derniers avoir été « plaquée contre le mur » et avoir subi des « baise-mains » alors qu’elle attendait pour aller aux toilettes. Elle aurait tenté de repousser l’homme en vain, avant qu’une autre femme la défende. Il les aurait copieusement insultées avant de partir. Les deux habitués essayent alors d’expulser l’individu, mais tout dégénère. Ce dernier, muni d’un couteau, les blesse grièvement. Tous évacués par les secours, la police interpelle le prévenu à l’hôpital.

Les victimes évoquent une personne « très dangereuse ». L’homme le plus grièvement blessé témoigne : « J’ai vraiment eu peur pour ma vie. Il ne voulait pas me lâcher, il avait la volonté de poignarder. J’avais une grosse doudoune, un sweat à capuche et un tee-shirt et pourtant, j’ai senti sa main qui bougeait quand il m’a planté. Il faut qu’il assume. » L’autre victime raconte également : « C’est allé très vite. Je l’ai vu mettre sa main dans sa poche arrière. Je l’ai frappé avant qu’il ne sorte son arme. Je suis stressé, j’ai un fils. J’aurais pu tout perdre. » Examinés par un médecin légiste, les deux hommes ont respectivement reçu un mois et demi et cinq jours d’interruption totale de travail.

Le prévenu livre une tout autre version. Il dit être un habitué des lieux et n’avoir jamais eu de problèmes. Au moment des faits, il aurait été poussé par deux hommes sans savoir pourquoi. Au sol, il « a essayé de se défendre des coups » qu’ils lui portaient. Le prévenu avoue avoir donné des coups de couteau, mais l’arme n’est pas la sienne : il l’aurait trouvée par terre. « J’étais ivre, inconscient de mes actes. Je ne voulais pas leur faire de mal. » s’excuse-t-il, conscient de son problème d’alcool. Il nie avoir importuné des clientes : « Je respecte les femmes. Pourquoi celle qui m’accuse n’est pas là, si elle dit la vérité ? »

L’avocate du prévenu dénonce un « délit de sale gueule »

Une « scène de peur et de chaos » avec un « déferlement de violence ». Les avocats des parties civiles plaident fermement : les victimes sont des « miraculés » d’un homme « problématique dès le départ ». Six coups de couteau ont été décomptés dans la doudoune de la victime blessée le plus lourdement. « Le préjudice est immense mais il a eu de la chance. Merci les conditions météorologique du Nord », ironise son avocate. 3 000 euros de dommages et intérêts ont été demandés pour l’autre victime. Son avocat décrit un homme « profondément traumatisé », qui a « simplement eu le réflexe humain de protéger ».

L’avocate de la défense « s’étonne de la certitude portée au dossier ». Agacée, elle clame : « Il a le visage défoncé, sa main a été opérée car son doigt a été tranché. Finalement, ils ont tous eu l’arme en main. » Elle souligne également que son client n’est pas le premier à entamer le contact. Les caméras de surveillance sont formelles : un des deux hommes « attrape le bras » du prévenu, qui recule. Pendant la bagarre, alors qu’il était « déjà maîtrisé au sol », les deux hommes « pas maigrelets » continuent de lui donner des coups. Pour l’avocate, son client a été victime d’une « délit de sale gueule » dès le début.

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Condamné à une peine allant au-delà des réquisitions

La procureure rappelle le « courage [des victimes] d’intervenir et de venir à l’audience malgré les douleurs ». Le prévenu « refait l’histoire » selon elle : « Il se donne l’image d’un parfait gentleman. Il trouve le couteau par hasard quand il se fait agresser. » Elle rappelle que les coups de couteau reçus étaient « centrés sur des zones mortelles au niveau du tronc« . Il ne s’agit donc pas de légitime défense. Elle requiert trois ans d’emprisonnement avec mandat de dépôt et l’interdiction de détenir une arme pendant cinq ans.

À l’annonce du délibéré, la présidente semble précautionneuse. Le tribunal a décidé de condamner le prévenu à une peine allant au-delà des réquisitions. L’homme écope de quatre ans d’emprisonnement avec mandat de dépôt dont un an avec sursis probatoire. Il a également l’interdiction de prendre contact avec les parties civiles et de détenir une arme pendant quinze ans. L’homme a déjà communiqué sa volonté de faire appel, dénonçant une décision « injuste ».

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