
Le site de e-commerce chinois Shein a été signalé à la justice française pour la vente de poupées sexuelles à caractère pédopornographique. Des enquêtes ont également été ouvertes contre Temu, Wish et AliExpress, mais ce ne sont pas les seuls à avoir hébergé de telles annonces.
Des objets pédopornographiques accessibles en quelques clics sur Shein. Le géant chinois de l’e-commerce a fait l’objet d’un signalement de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) à la justice française a-t-on appris le samedi 1er novembre. Les services de l’Etat ont été prévenus le jeudi 30 octobre de la présence d’une offre commerciale illégale sur le site d’e-commerce : la vente d’une poupée sexuelle aux allures de petite fille tenant un ours en peluche. La description de l’objet et sa catégorisation « permettent difficilement de douter du caractère pédopornographique des contenus », a constaté la DGCCRF. Sur le site Shein, la poupée d’apparence enfantine est décrite comme mesurant 80 cm de haut et surtout comme un « jouet de masturbation masculine avec corps érotique et vrai vagin et anus » rapporte Le Parisien.
Dans un communiqué publié lundi soir, Shein a annoncé avoir interdit la vente de toutes les « poupées sexuelles » sur son site et avoir même temporairement déréférencé sa catégorie « produits pour adultes » en réponse à la saisie de la DGCCRF. « Il s’agissait de publications émanant de vendeurs tiers, mais j’en prends la responsabilité personnelle », a déclaré Donald Tang, président exécutif de Shein. Une « cellule » dédiée à « l’intégrité » de la place de marché où les vendeurs tiers peuvent proposer leurs produits à la vente a par ailleurs été mise en place, assure Shein dans ce même communiqué.
« Shein, comment expliquez-vous que des poupées sexuelles à caractère pédopornographique soient restées en ligne plusieurs heures sur votre plateforme ? », a interpellé la ministre déléguée chargée du Numérique Anne Le Hénanff sur X ajoutant que « les plateformes en ligne doivent prendre leurs responsabilités et se conformer à notre droit et nos valeurs ». Les responsables de Shein ont été convoqués devant les députés sous deux semaines dans le cadre d’une mission d’information de l’Assemblée sur les contrôles des produits importés en France. L’audition « doit permettre d’obtenir des réponses précises sur la transparence des chaînes d’approvisionnement de Shein, ses procédures de contrôle interne et les mesures correctrices mises en œuvre à la suite de cet incident particulièrement grave », a expliqué le rapporteur de la mission Antoine Vermorel-Marques, dans un communiqué.
Des poupées disponibles sur d’autres sites d’e-commerce chinois
Si la présence de poupées sexuelles pédopornographiques a été signalée sur Shein, AliExpress proposait aussi des objets similaires à la vente. Ces derniers ont été retirés des plateformes françaises, a constaté franceinfo le lundi 3 novembre, mais RMC signale que les produits sont toujours disponibles sur les versions étrangères des sites accessibles avec un VPN. Les plateformes « se jouent d’un système international. Avec un VPN vous allez sur le site au Royaume-Uni ou au Chili et vous retrouvez ces poupées. C’est immonde », alerte Arnaud Gallais, président de l’association Mouv’Enfants, sur RMC. Des enquêtes confiées à l’Office des mineurs (Ofmin) ont été ouvertes par la justice française.
À noter que des avertissements portent aussi sur les plateformes Temu et Wish. Celles-ci ne distribuent toutefois pas d’objets similaires, mais sont accusées d’avoir diffusé des contenus pornographiques sans mesure de filtrage sur les mineurs. Avec Shein, AliExpress, Temu et Wish sont sommées de se mettre en conformité avec le droit tricolore. Des enquêtes portant sur ce point-là ont également été ouvertes par la justice française lundi. La cellule d’investigation de Radio Classique indique avoir trouvé des annonces concernant des poupées sexuelles aux airs enfantins sur de nombreux sites : le sex-shop professionnel Sex Dolls Europe qui dans la catégorie des poupées de « moins d’1m25 » proposent des objets pédopornographiques, mais aussi les sites de reventes comme Vinted ou Ebay avec de nombreuses annonces diffusées par des particuliers.
Après le scandale révélé sur Shein, la haute-commissaire à l’Enfance Sarah El-Haïry a annoncé convoquer « l’ensemble des grandes plates-formes » de commerce électronique et a promis de remonter jusqu’aux « fournisseurs ». « Je veux comprendre qui a autorisé la vente de ces objets, quels sont les processus qui ont été mis en place, pour que ça ne se reproduise pas, (et) qui sont les fournisseurs parce qu’il y a bien des gens qui produisent ces poupées absolument ignobles », a-t-elle estimé dimanche 2 novembre sur RTL.
Les acheteurs des poupées retrouvés ?
Non seulement de vouloir remonter aux fournisseur, les autorités françaises ambitionnent de mettre la main sur les acheteurs ayant commandé les poupées sexuelles pédopornographiques. Sarah El-Haïry, la haute-commissaire à l’Enfance a évoqué la possibilité d’une « discussion » avec Shein pour obtenir les données concernant les acheteurs de ces poupées en France. « Les gens qui ont acheté ces poupées ont utilisé leur carte de crédit, ils se sont fait livrer à leur domicile ou à leur bureau », a-t-elle poursuivi sur Franceinfo. Le porte-parole de Shein en France, Quentin Ruffat, a fait savoir sur RMC que le site donnera les noms des acheteurs s’ils sont demandés : « Nous collaborerons à 100% avec la justice et répondrons à l’ensemble des questions qu’ils nous posent. Nous serons en totale transparence avec la justice ».
L’identification des acheteurs et autres des annonces sur les sites de reventes s’annonce cependant plus difficile. Si les acheteurs de ces poupées sont recherchées, c’est parce que ces achats sont susceptibles de traduire des tendances pédophiles et punies par la loi. La haute-commissaire a indiqué sur Franceinfo que ces poupées pouvaient éventuellement servir à des pédocriminels avant que ces derniers ne s’en prennent à d’autres infos. Une hypothèse également mentionnée par Arnaud Gallais, prédisent de Mouv’Enfants qui cite en exemple le cas de Joël Le Scouarnec, le médecin qui a fait plus de 300 victimes et chez qui « on a retrouvé une collection de poupées sexuelles à l’effigie d’enfants ».
Outre la présence de poupées sexuelles pédopornographiques, c’est donc aussi l’absence de « mesures de filtrage » empêchant « efficacement » l’accès pour les mineurs à des pages web menant à des annonces commercialisant des poupées sexuelles d’apparence adulte qui est pointée du doigt. « Tout cela était facilement accessible aux mineurs, sans réel filtrage puisqu’il suffit de cliquer pour certifier que l’on est âgé de plus de 18 ans pour y accéder. » L’autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom), chargée d’assurer le respect des règles sur Internet, a été informée.
Shein menacé d’interdiction d’accès au marché français
Avec la vente de cette poupée sexuelle au caractère pédopornographique, le site Shein s’expose à de lourdes sanctions rappelle la DGCCRF : « La diffusion, via un réseau de communications électroniques, de représentations à caractère pédopornographique, est passible de peines pouvant aller jusqu’à 7 ans d’emprisonnement et 100 000 euros d’amende ». Les services soulignent par ailleurs dans leur communiqué que les signalements portent sur une marque pour laquelle « des pratiques commerciales trompeuses et des allégations mensongères ainsi que plusieurs non-conformités ont déjà été largement constatées et sanctionnées précédemment ». L’entreprise de e-commerce a déjà été sanctionnée à trois reprises en France.
Plus qu’une sanction pénale, le site chinois risque de se voir interdire l’accès au marché français. « On a dépassé les bornes. […] Ces objets horribles sont illégaux », a réagi le ministre de l’Economie, Roland Lescure, qui a menacé d’interdire l’accès au site. « Si ces comportements sont répétés, nous serons en droit, et je le demanderai, d’interdire l’accès de la plate-forme Shein. […] La loi est très claire : si on a des comportements répétés ou si les objets ne sont pas retirés, le gouvernement peut le demander », a prévenu le ministre sur le plateau de BFMTV. Le gouvernement est effectivement en droit de prendre une telle mesure pour des « actes terroristes, pour le trafic de stupéfiants et pour des objets pédopornographiques ».
Le ministre de l’Économie a également dénoncé la « provocation » de Shein qui doit ouvrir une boutique physique à partir du 5 novembre au BHV du Marais, à Paris. L’arrivée de la marque faisait déjà tâche au BHV, ce partenariat ayant coupé court à d’autres accords commerciaux notamment avec la firme Disney. Il a également été décrié par les salariés du BHV.
10:21 – Un nombre d’annonces « difficile à quantifier » et parfois difficile à repérer
La DGCCRF a confirmé avoir observée des objets à caractère pédopornographique sur d’autres sites que Shein, notamment sur AliExpress, Temu et Wish. Mais il est « difficile de quantifier le nombre de produits qu’on a observés » a indiqué la porte-parole de la Répression des fraudes, Alice Vilcot Dutarte, sur Franceinfo ce matin matin. Il est également complexe de tout repérer : « La difficulté c’est que les plateformes vont référencer les produits de manières très différentes. Certaines vont avoir des catégories très claires auxquelles on va pouvoir accéder avec des mots-clés assez explicites. Sur d’autres, cela va être totalement obscur et il va vraiment falloir écumer le site à la main ». Alice Vilcot Dutarte assure toutefois que des enquêteurs surveillent en continu les plateformes aidés par des outils d’intelligence artificielle.
09:23 – Les pédophiles « s’entraînent sur ces poupées » assure Sarah El Haïry
« Les pédocriminels qu’on traque au quotidien, ils s’entraînent sur ces poupées, et ensuite ils trouvent ça fade. Et ensuite, ils passent à l’acte. Voilà la réalité », a déclaré la haute-commissaire à l’Enfance sur Franceinfo, Sarah El Haïry. Cette dernière estime qu' »aller chercher ceux qui ont acheté ces poupées aujourd’hui dans notre territoire est une obligation pour aller protéger et contrôler l’état des enfants de leur entourage proche. » Les détenteurs de tels objets tombent sous le coup de la loi pour pédopornographie. « On sait à quel point cette détention d’image ou d’objet est une étape » dans un parcours pédocriminel insiste la haute-commissaire.
08:30 – Shein « collaborera à 100% avec la justice » et donnera les noms des acheteurs
« Ce qui s’est passé depuis vendredi est grave, inacceptable, intolérable. Nous avons pris des mesures à la hauteur et avons été réactifs », défend Quentin Ruffat, porte-parole de Shein en France, qui s’exprime pour la première fois ce mardi matin sur RMC. Rappelant l’annonce de la marque sur la suppression de toutes les annonces associées aux « poupées sexuelles », le porte-parole reconnaît que « cela n’excuse pas tout », mais il appelle à « différencier la marque Shein qui vend des vêtements et la marketplace » pour laquelle « Shein est un intermédiaire ». Quentin Ruffat souligne « un dysfonctionnement interne dans notre process et notre gouvernance, on en a pris la mesure avec une réponse rapide ».
« Aujourd’hui nous allons mettre en place les garde-fous pour que ça n’arrive plus », promet le représentant de Shein en France. Quant à l’affaire en cours, Quentin Ruffat assure au nom du géant du e-commerce : « Nous collaborerons à 100% avec la justice et répondrons à l’ensemble des questions qu’ils nous posent », y compris sur les demandes visant à identifier les acheterus des poupées sexuelles.
03/11/25 – 23:35 – La justice française ouvre des enquêtes sur Shein, AliExpress, Temu et Wish
Lundi soir, le parquet de Paris a annoncé avoir ouvert pas moins de quatre enquêtes sur les pratiques des géants de la vente en ligne. Elles sont confiées à l’Office des mineurs (Ofmin), relaie Le Figaro. Dans leur viseur : la « diffusion de message violent, pornographique, ou contraire à la dignité accessible à un mineur » pour les quatre sites. Les enquêtes concernant Shein et AliExpress portent également sur la « diffusion de l’image ou la représentation d’un mineur présentant un caractère pornographique ».
03/11/25 – 20:52 – Shein annonce avoir interdit la vente de toutes les « poupées sexuelles » sur son site
Dans un communiqué publié ce lundi soir, Shein France a fait savoir qu’il avait interdit la vente de toutes les « poupées sexuelles » sur son site et avoir même temporairement déréférencé la catégorie « produits pour adultes ». « Il s’agissait de publications émanant de vendeurs tiers, mais j’en prends la responsabilité personnelle », a déclaré Donald Tang, président exécutif de Shein. Le géant chinois indique par ailleurs avoir mis en place une « cellule » dédiée à l' »intégrité » de sa place de marché où des vendeurs tiers peuvent proposer leurs produits.
03/11/25 – 19:21 – Le directeur général du BHV se dit « scandalisé »
Invité à s’exprimer sur la polémique au micro de BFMTV, Karl-Stéphane Cottendin s’est dit « scandalisé » par l’affaire dite des poupées à caractère pédocriminel sur Shein ce lundi soir. « Il n’y a qu’une seule réaction : on a été scandalisés, c’est abject », a déclaré le directeur général du BHV et du groupe SGM, ajoutant que « c’est une erreur de leur part, une erreur de leur système ». Pour autant, le magasin Shein ouvrira bien ses portes mercredi au BHV, a-t-il assuré.