Pour les fêtes de fin d’année, sur Airbnb, il y a encore le choix. Une « superbe villa dans le village calme et bucolique » de Herzliya à 328 euros par nuit. Une « charmante location de vacances » avec un jardin disposant d’une balançoire bleue à Har Adar. Ou un logement, certes, dépouillé mais bien pratique avec son parking gratuit à « Oranit la magique » pour 74 euros par nuit.
Selon les informations de BFMTV, l’association Juristes pour le respect du droit international (Jurdi) vient d’assigner la plateforme Airbnb devant la justice française. Elle l’accuse de soutenir les crimes de guerre en proposant à la location des biens situés dans les territoires palestiniens occupés par Israël en Cisjordanie.
« En proposant ces logements, (Airbnb) contribue à la normalisation et à la pérennisation du régime colonial, en apportant des ressources financières aux colons et en légitimant leur présence », assure Jurdi dans son assignation dont BFMTV a pu consulter des extraits.
350 logements litigieux en 2025 selon la rapporteuse des Nations unies
La démarche de Jurdi suit de peu celle de la Ligue des droits de l’Homme qui, le mois dernier, a annoncé avoir porté plainte au pénal contre Airbnb. Cette fois-ci, c’est donc sur le terrain civil que la plateforme de location entre particuliers est attaquée. Il faut dire que le problème n’est pas nouveau. Mais il semble prendre de l’ampleur.
Dans un rapport publié le 30 juin 2025, Francesca Albanese, rapporteuse spéciale des Nations unies, estime qu’Airbnb propose aujourd’hui environ 350 logements à la location dans ces territoires que la plateforme qualifie de « contestés », contre 139 en 2016. Ce qui la rend, selon Jurdi, coupable des délits de « recel » et de « blanchiment du produit de crimes de guerre ».
Des violations du droit international, donc. Mais aussi du droit français, selon l’association. « Dans notre pays, on ne peut pas proposer de contrat contraire à l’ordre public, éclaire en effet l’avocate Hélène Massin-Trachez qui porte ce combat pour Jurdi. Or, c’est ce que fait Airbnb en proposant ces contrats de location illicites. Et cette entreprise les propose à ses clients situés sur le sol français ».
Jurdi réclame donc à la justice civile de forcer Airbnb à retirer les annonces litigieuses de son offre accessibles depuis la France. Si le tribunal lui donne raison, la plateforme aura alors huit jours pour se mettre en conformité, avant d’être sanctionnée d’une astreinte de 5.000 euros par jour de retard.
Première audience à Paris le 13 janvier prochain
Contacté par BFMTV, Airbnb se défend, en tout état de cause, de faire des bénéfices sur le dos de la situation internationale:
« Du fait de notre présence dans le monde entier, nous sommes et continuerons d’être confrontés à des situations complexes, fait-elle valoir. Nous restons déterminés à aborder chacune de ces situations avec la plus grande attention ».
Mais ce n’est pas simple. En 2018, Airbnb avait annoncé son intention de supprimer les annonces litigieuses avant d’être menacée de poursuites judiciaires par certains clients.
Elle avait donc décidé de maintenir les biens à la location, tout en annonçant reverser désormais l’intégralité des bénéfices à des organisations à but non lucratif, sans que l’on puisse savoir lesquelles précisément. Entre mai 2024 et avril 2025, elle prétend avoir reversé 16.681 dollars correspondant aux bénéfices tirés des locations en Cisjordanie mais aussi dans les territoires disputés d’Abkhazie et d’Ossétie du Sud. Une démarche insuffisante pour Jurdi.
« En fait, c’est même une forme d’aveu si l’argent est sale au point qu’Airbnb souhaite le reverser à des associations, indique ainsi Julien Bayou, un des autres avocats qui porte cette assignation. Et cela ne change rien au fond. Même sans conserver les commissions perçues, cette plateforme aide des propriétaires situés dans les colonies à s’enrichir et se fait complice de ces crimes ».
Ce sera désormais à la justice de trancher. Selon les informations recueillies par BFMTV, Airbnb a reçu l’assignation en question il y a quelques jours. Une première audience de mise en état est d’ores et déjà programmée le 13 janvier prochain.
Article original publié sur BFMTV.com