L’Estonie a violé la convention européenne des droits de l’homme en interdisant aux personnes détenues de fumer, a estimé ce mardi la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), soulignant que même en prison, le droit à la vie privée et la liberté de faire des choix demeuraient. « Dans un contexte d’autonomie personnelle déjà restreinte », la liberté pour les prisonniers de décider de certains sujets comme le fait de fumer est « d’autant plus précieuse » pour eux, souligne la cour dans un arrêt.

La cour reproche aux autorités estoniennes d’avoir imposé en 2017 une interdiction totale de fumer dans les prisons « sans évaluer son importance et son impact du point de vue de l’autonomie personnelle des prisonniers fumeurs », et sans fournir de justifications « pertinentes et suffisantes », dépassant ainsi « la marge d’appréciation » dont elles disposent.

1 500 euros pour les détenus concernés

La cour a donc estimé, par 4 voix contre 3, qu’il y avait eu violation de l’article 8 de la convention, relatif au droit au respect de la vie privée et familiale. Elle a ainsi donné raison à trois détenus qui l’avaient saisie, se plaignant à la fois de cette interdiction et de symptômes liés au sevrage (prise de poids, troubles du sommeil, dépression et anxiété).

L’Estonie devra verser à ces trois requérants 1 500 euros chacun au titre des frais de justice. La CEDH a déjà statué sur des affaires touchant au tabagisme dans les prisons mais sous l’angle du tabagisme passif. C’est la première fois qu’elle était appelée à évaluer l’impact d’une interdiction totale de fumer dans les prisons du point de vue de fumeurs de longue date incarcérés.