Le regard aussi sérieux qu’il peut être malicieux, Donald Tang ne mâche jamais ses mots. Qu’il évoque la météo, les fromages français… Ou Shein. Car l’homme d’affaires sino-américain refuse catégoriquement d’entendre parler de fast-fashion, et encore moins d’ultra-fast fashion. « Ce que nous faisons, c’est de la mode à la demande. Ce que veut le client, nous lui offrons » assène-t-il d’emblée, catégorique.
Une mode à la demande, certes, mais qui suit pourtant un rythme de production effréné. Mais comment transposer ce modèle totalement dématérialisé, sur des magasins physiques ? Comment approvisionner dans les temps ? Car la forme que prendront les futurs boutiques Shein dans six grands magasins français – une première mondiale – reste une grosse inconnue, et Donald Tang assume rester vague. « Ce qu’il se passe en France est une expérimentation, nous nous adapterons en fonction des désirs des clients » balaye-t-il. Ils pourraient d’ailleurs bien influencer ses ambitions à l’échelle européenne. « En France, Shein marche très bien, d’où ce partenariat.. »
97 000 clients Shein à Grenoble
Un succès toujours plus important en France, notamment à Grenoble : la capitale des Alpes compte aujourd’hui 97 000 clients Shein, pour 157 000 habitants. « Les chiffres parlent d’eux-mêmes, Shein est populaire » poursuit le dirigeant. Mais une popularité souvent mise à l’épreuve car les pratiques de Shein, jugées peu respectueuses de l’environnement et des droits des travailleurs, sont loin de faire l’unanimité.
Ce mardi 4 novembre, les Galeries Lafayette, ne souhaitant pas être associées à la marque chinoise, et la Société des grands magasins se sont mis d’accord pour mettre fin au contrat d’affiliation qui les liait. En d’autres termes, les Galeries de Grenoble perdent leur nom (tout comme les six autres magasins de province).
« Nous prenons soin de nos clients, c’est primordial »
Outre ce rebondissement, Shein a dernièrement été au cœur d’autres polémiques. Avant le scandale des poupées sexuelles à caractère pédopornographiques, il y a eu cette enquête d’UFC – Que Choisir, qui juge des dizaines de chargeurs USB, jouets et bijoux. vendus sur Shein, non conformes.
Sur ce point, Donald Tang tient à rappeler que ces produits sont « issus de la marketplace de Shein [NDLR : plateforme de revente en ligne] et non de la marque Shein ». Et de rappeler la procédure en cas de signalement de produits dangereux.
« Si certains d’entre eux ne sont pas conformes, nous les retirons temporairement du catalogue, avant de les tester. Si les résultats sont mauvais, nous enquêterons pour comprendre d’où vient la négligence. Nous avons l’intention de respecter les juridictions locales » insiste-t-il. Quant au scandale des poupées, un communiqué nous est parvenu quelques jours après cet entretien, affirmant que Shein a « mis en place une interdiction totale des produits de type “poupées sexuelles”, supprimant l’intégralité des annonces et visuels associés.»
« Car nous prenons soin de nos clients, c’est primordial » répète-t-il. Le client d’abord, le client avant tout, un leitmotiv assumé. « Notre but, c’est qu’il soit heureux » explique-t-il avec ce sérieux dont il ne se départ que rarement. Toutefois, il admet volontiers que certaines zones d’ombre subsistent quant à la gestion des corners français. « Ce n’est pas pour rien que la Société des Grands Magasins est notre partenaire ; elle compte créer 200 postes, saura nous guider. Nous leur apporterons aussi exactement ce dont ils ont besoin, car le modèle du magasin traditionnel n’est plus aussi fort qu’avant. Nous espérons que notre partenariat fera venir toujours plus de monde ».
Du donnant-donnant qui semble convenir à chacune des parties. Et Shein ne compte pas s’arrêter là pour redorer son image. L’entreprise annonce mettre en place 50 bourses par an en France, pour celles et ceux ayant envie de se lancer dans la mode. « S’ils veulent entreprendre, nous les aiderons et nous leur donnerons le soutien logistique pour se lancer. Il y aura un appel à candidature d’ici la fin de l’année.