Troisième porte-avions de la marine chinoise, le Fujian a été officiellement mis en service ce vendredi. Le navire est équipé d’un système de catapultes électromagnétiques, une technologie que seuls les États-Unis possédaient jusqu’à présent.

La Chine a annoncé vendredi la mise en service de son troisième porte-avions, son premier équipé d’un système de catapultes électromagnétiques, marquant un jalon crucial dans la modernisation de sa marine face aux États-Unis. Cette technologie moderne de catapultage, que seuls les États-Unis possédaient jusqu’à présent, permet au navire, le Fujian, de propulser une plus grande variété d’avions, plus lourdement armés et avec un meilleur rayon d’action que ses deux prédécesseurs.

Engagé dans une rivalité navale avec Washington en mer de Chine méridionale et autour de Taïwan, Pékin reste toutefois sensiblement derrière les Américains en termes de capacité de projection, soulignent la plupart des analystes.

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Le navire a été officiellement mis en service lors d’une cérémonie qui s’est tenue mercredi sur l’île tropicale de Hainan (sud), en présence du président Xi Jinping, a rapporté l’agence d’État Chine Nouvelle. « Après la cérémonie, Xi Jinping est monté à bord du Fujian (…) et s’est informé du développement des capacités de combat du système de porte-avions ainsi que de la construction et l’application du système de catapultage électromagnétique », a précisé la même source.

Catapulte à système électromagnétique

Le Fujian, à propulsion conventionnelle (et non nucléaire), est le plus grand et le plus avancé des porte-avions chinois. Le pays en comptait deux: le Liaoning, acheté à l’Ukraine en 2000, et le Shandong, premier porte-avions à avoir été construit en Chine, mis en service en 2019. Mais ils n’ont pas son degré de technicité: dépourvus de catapultes, ils sont équipés d’une rampe de type « tremplin », qui ne permet pas aux avions de décoller avec autant de puissance. Cela les contraint à emporter moins d’armes et de carburant.

« Aucun autre pays occidental, à part les États-Unis, n’exploite un porte-avions d’une taille et de capacités similaires », souligne Alex Luck, spécialiste des armements navals, auprès de l’AFP.

Le Fujian est équipé d’une catapulte à système électromagnétique (de type « EMALS »), alors que la plupart des catapultes classiques des porte-avions fonctionnent à la vapeur – une technologie moins performante. Le seul autre porte-avions actuellement équipé de ce système est le Gerald R. Ford, de la marine américaine. La Chine avait diffusé en septembre des vidéos de décollages et d’appontages d’avions (dont son chasseur furtif J-35, de cinquième génération) depuis le Fujian.

La télévision étatique CCTV avait loué « une nouvelle percée » dans le développement des porte-avions chinois et un « jalon important » dans la modernisation de la marine. « Il faudra encore plusieurs années avant que ce porte-avions atteigne une réelle capacité de combat » et « la Chine devra disposer de plusieurs porte-avions de ce type » pour « bouleverser réellement l’équilibre des forces », nuance Alex Luck.

« La marine chinoise reste en retard »

« La marine chinoise reste en retard sur ses adversaires potentiels – en particulier les États-Unis – en matière d’expérience opérationnelle cumulée, de formation des groupes aéronavals et, surtout, d’expérience du combat réel », ce dernier point étant un « handicap majeur », indique à l’AFP Collin Koh, spécialiste des questions navales en Asie-Pacifique à l’Université de technologie de Nanyang, à Singapour.

Ces dernières années, les passages de porte-avions chinois en mer de Chine méridionale, près d’îles disputées, et autour de Taïwan, île revendiquée par Pékin, ont provoqué l’appréhension de Washington. Jusqu’ici toutefois, « la Chine n’a pas utilisé ses porte-avions pour projeter de la puissance à longue distance, et le Fujian ne changera probablement pas cette dynamique », note Alex Luck, selon qui le navire servira surtout à « la formation et aux exercices ».

Le navire sera « plus vraisemblablement utilisé pour poursuivre les essais » et « tirer de nouveaux enseignements destinés aux futurs » porte-avions, abonde Collin Koh, sans exclure qu’il soit sollicité pour « des exercices autour de Taïwan ».

La Chine investit depuis plusieurs décennies dans la modernisation de ses forces armées, au diapason de son poids diplomatico-économique. Cette tendance suscite l’appréhension de certains de ses voisins asiatiques. Pékin affirme lui avoir une politique militaire « défensive » et vouloir uniquement préserver sa souveraineté. Des rumeurs persistantes font état d’un quatrième porte-avions en cours de construction, qui pourrait être mis en service au début des années 2030.