Dans ce film qui s’appelle Yoroï, vous jouez votre propre personnage, vous allez au Japon, vous vous retrouvez confronté à une série de monstres. Pourquoi vous fuyez la France ?
Déjà, c’est de la fiction. Donc même si je joue le personnage d’Orelsan, on voulait utiliser un peu tout ce que j’avais fait jusqu’à maintenant dans ce cadre du Japon. En fait, dans l’histoire, ma femme est enceinte. Je suis marié à une franco-japonaise dans le film. Mon personnage est au bord du burn-out et il a besoin de nouvelles choses. Et comme sa femme est enceinte, il se dit, « Tiens, je vais partir à l’étranger pour essayer d’être au calme, de découvrir quelque chose de nouveau ».
Il y a beaucoup d’humour dans ce film. Votre personnage est toujours un petit peu cynique. Est-ce que c’est une carapace pour ne pas affronter la réalité ?
Oui, c’est le personnage qui est comme ça. Comme c’est un personnage qui a fui, il va souvent traiter les choses avec dérision. D’ailleurs, ça lui est reproché à un moment. Après, on voulait que le film soit une sorte de comédie d’aventure, un peu comme dans les années 90. Et donc, l’idée était de mélanger plusieurs styles, tout en les distinguant bien. Quand il y a de l’humour, c’est vraiment de l’humour. Quand il y a de l’action, c’est vraiment de l’action. Et quand il y a du premier degré, il y a du premier degré. Tout en essayant quand même de raconter des choses. Il y a aussi toute une réflexion autour des peurs et des émotions.
Il y a aussi la question de l’artiste qui est un peu en filigrane dans le film. Est-ce qu’être artiste, c’est voué à être « intranquille » ?
Je pense que chacun peut gérer un peu comme il veut. Ce qu’on aimait bien avec David, celui avec qui j’ai coécrit le film, c’est d’utiliser la célébrité un peu comme une loupe. Parce que la célébrité qui a quand même un effet grossissant. Tu vas avoir plus de contacts, plus de relations, plus de projets, plus d’argent, plus de tout. Et aussi plus de problèmes, certainement. Donc on aimait bien traiter de ce sujet-là.
Dans le film, votre épouse est enceinte. C’est ce qui vous est aussi arrivé dans la vraie vie. Est-ce que cette nouvelle étape de la grossesse, de la paternité, change le rapport qu’on a aux choses ?
Oui, complètement. Moi, ça a changé beaucoup de choses, dans le sens où avant je ne connaissais pas et maintenant je connais. Quand on a commencé à écrire le film, ma femme n’était pas enceinte. Elle est tombée enceinte pendant l’écriture. Et ça m’a permis d’être plus juste et de mieux raconter les choses. On voulait aussi raconter cet aspect de la grossesse qui est souvent un peu caricatural dans des films dédiés à ça, mais qui n’est pas toujours présent dans plein de films. Il y a un côté un peu comédie romantique fun là-dedans.
Dans le film, on voit Aurélien, Orelsan, assailli, comme la star que vous êtes aussi dans la vraie vie. Quelle est la relation que vous avez avec le public ?
Moi, j’ai de la chance. C’est ça aussi la différence avec le personnage : l’idée c’était d’avoir une évolution. Parce que ce qui est intéressant dans un film, c’est quand le personnage change et évolue. On le fait partir sur une base où il est très dépité, pour après se construire différemment. Personnellement, je trouve que j’ai beaucoup de chance de faire ce métier. Les gens, dans la vie de tous les jours, sont tellement gentils avec moi. Il y a tellement de choses positives que j’essaie de me concentrer là-dessus.
Et le fait d’être suivi, de parler à autant de générations, ça fait du bien ou ça met la pression ?
C’est fou. Ça me met la pression, bien sûr. Mais par exemple, on a mis quatre ans à faire le film. À chaque fois que je sors un projet, je mets tout ce que j’ai dedans, parce que j’ai envie que les gens disent que c’est bien. Je me sens aussi une responsabilité. Et puis, j’investis simplement mon temps, donc j’ai envie que ce soit investi de la bonne façon. Mais ça met la pression parce que j’ai vraiment la croyance que le rôle d’artiste, c’est de faire réfléchir à travers ses œuvres. Et donc, ça met plus la pression par rapport à mon travail, que par rapport à ma vie privée. Dans ma vie privée, même ma vie publique, je reste assez focus sur ce que je fais.
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Qu’est-ce que vous avez dû apprendre pour ce film ? Le taekwondo, les arts martiaux ? Les cascades, parce que ça bastonne quand même pas mal ?
Je me suis entraîné pendant huit ans pour faire les cascades, avec une équipe de cascadeurs. Il y a huit ans, j’ai rencontré une team de cascadeurs et je me suis entraîné avec eux dans l’espoir de faire un film d’action un jour. Dans les entraînements, il y avait un peu de taekwondo. De mon côté, j’ai fait pas mal de boxe thaïe et de boxe anglaise. Et après, c’était vraiment apprendre à faire de la cascade. On s’entraîne à faire des chorégraphies de combat. C’est un peu comme un mélange entre une danse et un combat.
Les parents veulent souvent que leur enfant ne fasse pas la même chose qu’eux. Votre personnage dit notamment qu’il espère que son fils ne fera pas du rap. Est-ce que vous vous posez vraiment cette question ?
C’est un peu une caricature dans le film. Moi, ce dont j’ai envie, c’est qu’e mon enfant soit heureux. S’il est heureux en étant un rappeur nul, tant mieux pour lui. C’est comme si vous avez un enfant journaliste et qu’en fait, il était un mauvais journaliste. Il y a toujours un truc qui te met la pression. Mais c’est plutôt pour caricaturer.
Et de rap, il est question avec votre nouvel album « La fuite en avant ». Est-ce qu’il y a un lien avec le film ou pas ?
C’est complètement lié au film. Après, ce n’est pas la musique du film, c’est-à-dire que ce n’est pas la bande originale du film. Mais il y a des morceaux sur les mêmes thématiques qui vont amener des complémentarités par rapport au film. On reprend aussi des bouts de musique du film qui sont dans l’album. C’est parce qu’on a conçu les deux en même temps. On voulait faire un projet un peu transmédia, ce qui n’est pas encore très courant, où tu peux avoir les deux qui se répondent.
Quels sont les grands thèmes de cet album ?
Comment gérer ses peurs, les responsabilités, le burn-out, le lien à son pays, et évidemment la paternité puisqu’il y a une chanson sur la grossesse. Partir aussi. En tout, il y a 17 morceaux, donc il y a beaucoup de thèmes. On retrouve un peu ce qu’on retrouve dans mes albums d’avant, mais sous un autre angle.
Vous avez vendu 300.000 billets de concert en 24 heures. Trois Palais 12, et ING Arena, ce qui fait plus ou moins 35.000 places en quelques minutes. Content de retourner sur scène ?
Je suis trop pressé. J’ai hâte. Là, on vient de l’annoncer, mais ce sont des évènements qu’on prépare depuis six mois, voire un an. J’ai des nouveaux morceaux et une nouvelle scénographie qui est folle. Là, j’attaque les répétitions, puisque la promotion commence à être finie, et j’ai trop hâte d’y être.
En regardant le film, je me suis demandé, c’est quand la meilleure période de la vie ?
Chaque période est différente. Il y en a qui vont probablement dire que c’était l’enfance. Moi, je suis heureux maintenant. Je suis content, j’arrive à travailler, à faire ma passion. Je pense que c’est quand on est bien dans sa tête.
