Il subsistait, depuis samedi matin, un doute sur la véracité des faits. Vers 23h30, la veille, des centaines de supporters du club du Wydad Casablanca, club le plus titré du Maroc, ont célébré leurs 20 ans en grande pompe. Ils ont quadrillé les deux quais de Seine, ainsi que les ponts Mirabeau et de Grenelle, dans le XVe arrondissement de Paris, pour craquer des fumigènes durant près de deux minutes de folie.

Les images, diffusées le samedi sur les réseaux sociaux, ont très vite surpris. Tant la scène parait inimaginable, sans intervention des forces de l’ordre en amont ou durant le « spectacle », nombreux se demandaient en effet si tout cela n’avait pas été retouché au montage pour amplifier le rendu. Interrogés ce dimanche, les riverains qui y ont assisté sont unanimes : tout est vrai.

Un rectangle flamboyant donc, agrémenté d’une multitude de feux d’artifice qui n’ont généré aucun dégât. Mais cette « manifestation, bien que non violente et très brève, demeure totalement illégale », rappelait ce dimanche matin au Parisien une source policière. Rien n’avait en effet été déclaré en amont. Une enquête a donc été ouverte et a été confiée à la sûreté territoriale de Paris.

« Si je ne l’avais pas vécu, je n’y croirais pas et je penserais aussi que c’est une vidéo générée par l’intelligence artificielle, souffle Quentin, dont les fenêtres donnent sur les quais. C’est assez inquiétant qu’on puisse organiser un tel événement à deux pas de la tour Eiffel, sans difficulté. On peut donc faire ce que l’on veut à Paris. »

Sandra, elle, fêtait les 23 ans de sa fille à son domicile, dont le balcon donne sur les quais. « On a adoré le spectacle, c’était beau, on en a bien profité, s’amuse-t-elle. Mais comme on est au premier étage, on a quand même fermé les fenêtres et regardé prudemment de chez nous. »

Un bateau voguait au milieu de la Seine au moment de l’événement. « On a cru que c’était une mise en scène, pour quelqu’un dans le bateau, qu’il y avait une demande en mariage ou une déclaration d’amour », relate Sandra.

« On est surpris que ce soit possible de faire une telle manifestation ici », commente pour sa part Gil, qui a tout filmé depuis son balcon. Sa femme, réveillée en sursaut, était moins émerveillée : « J’entendais les crépitements, j’ai cru qu’il y avait le feu. L’appartement était tout éclairé de rouge. J’ai eu peur, se remémore-t-elle ce dimanche. Ça reste préoccupant, ils étaient nombreux. »

Plusieurs riverains ont dû chercher leurs chats cachés dans leurs appartements dès le premier tir de mortier, ou rassurer leurs chiens tremblants.

« Pour le côté écolo, on repassera, parce que ces supporters ont jeté tous les fumigènes dans la Seine », soupire aussi Gil. Sans doute pour ne pas laisser de trace en cas de contrôle de police. « Mais ils étaient bien organisés, car ils étaient répartis tous les 5 à 6 m le long de la berge, et quelqu’un avec des cartons est passé leur distribuer les fumigènes », rapporte Quentin.

Et après deux minutes de folie, ces centaines d’ultras se sont dispersés par petits groupes. « Sans doute pour rejoindre leurs camions, car je fumais sur mon balcon avant que tout ne s’embrase et je les ai vus être déposés par un autobus. Je pensais à des touristes au départ », sourit Gil.

A cet endroit, sur les quais, les voisins ont l’habitude du calme. « Malgré quelques débordements de temps en temps sur l’île aux Cygnes, où des jeunes fêtent la fin des cours souvent en juin », souligne une retraitée. Mais « jamais rien de cette ampleur, même les soirs de victoire du Paris SG », affirment tous les habitants du secteur interrogés.