La fermeture partielle du gouvernement américain – ou shutdown – devrait toucher à sa fin. Après plus de quarante jours d’immobilité (un record) suscités par un désaccord sur le budget, huit sénateurs démocrates ont rompu avec leurs camarades de parti et rejoint leurs opposants sur une motion procédurale ouvrant la voie à une sortie de crise. Avec 60 votes sur 100, la majorité qualifiée est atteinte. La Chambre des représentants en mains républicaines ne nécessitant qu’une majorité simple, Washington pourrait bientôt reprendre le travail.
C’est globalement une bonne nouvelle pour les Américains. Les employés fédéraux ne sont plus payés depuis octobre, les aéroports en manque de contrôleurs aériens annulent des milliers de vols chaque jour. Et, malgré plusieurs décisions de justice en faveur d’une prolongation du programme, l’administration Trump utilisait le shutdown pour bloquer le financement de bons alimentaires nécessaires à la survie d’un Américain sur huit. Il fallait trouver une solution. Elle semble enfin à portée de main.
Le compromis n’inclut cependant pas la revendication centrale des démocrates: la prolongation des subventions aux assurances maladie, qui expireront à la fin de l’année. Or, pour les démocrates, minorisés dans les deux chambres, le shutdown permettait de tirer avantage de la nécessité d’une majorité qualifiée au Sénat pour forcer les républicains à négocier. La stratégie s’était jusqu’ici révélée gagnante: Donald Trump lui-même a reconnu que la fermeture partielle du gouvernement avait contribué aux victoires démocrates à New York, en Virginie et dans le New Jersey.
A ce titre, l’effondrement désordonné du blocage démocrate contre le mot d’ordre du parti ne fait que souligner sa faiblesse. En partant du principe que la Chambre des représentants se rallie au Sénat et que le président signe bien l’accord, les républicains ne manqueront pas d’en tirer bruyamment profit. Le parti du président devrait crier victoire, blâmer ses adversaires pour le plus long shutdown de l’histoire, et revendiquer la paternité de la sortie de crise. Donald Trump et ses méthodes d’intimidation triompheraient à nouveau. Tout ça pour rien?
Pas forcément. Si aucun gain n’a été obtenu sur la santé, la thématique n’est pas près de disparaître. Et les démocrates se sont avantageusement profilés sur la question. Tandis que des concessions ont tout de même été obtenues sur le licenciement de milliers de fonctionnaires fédéraux. Enfin, confronté à la brutalité d’un parti prêt à affamer les Américains pour arriver à ses fins, rendre les armes pour assurer la survie des plus pauvres offre un saisissant contraste d’humanité. Et contrairement à ce que pense Donald Trump, la compassion peut aussi se révéler payante en politique.