Ce sont des contraintes de planning qui nous ont conduit à assister en avant-première au dernier documentaire de Yann Arthus-Bertrand, France, une histoire d’amour. Dans ce petit cinéma bobo des Champs-Élysées, le Balzac, connu pour sa programmation militante de gauche, à mille lieues des convictions politiques de l’écrivain dont il porte le nom, une foule de Parisiens friqués, d’une moyenne d’âge de soixante ans, attendait joyeusement le célèbre photographe venu présenter son film. Une fois franchi les portes de la salle 1 aux trois cent quatre-vingts fauteuils rouge vif, remplie aux huit dixièmes, le cinéaste-gourou de l’écologisme dévot fut accueilli en un silence quasi religieux par son public de fidèles. Une ambiance qui fleurait bon l’entre-soi, la connivence idéologique et la fierté d’appartenir collectivement au camp du Bien. S’ensuivirent alors les sempiternels salamalecs entre l’artiste et son « courageux » distributeur, heureux de présenter ce soir-là une France « solidaire » qui fait « bouger les choses ». Après un spot rapide du Balzac vantant les mérites des associations immigrationnistes (et pro-dumping social), le film put enfin débuter…
Un pot-pourri de thématiques diverses et variées
Réalisé en lien avec le démographe Hervé Le Bras, dont on connaît bien les positions sur la question de l’immigration, par le tandem Yann Arthus-Bertrand et Michael Pitiot, qui signe là sa cinquième collaboration après Planète Océan (2012), Méditerranée, notre mer à tous (2014), Terra (2015) et Le Maroc vu du ciel (2017), France, une histoire d’amour se veut un documentaire pris sur le vif, tourné à l’iPhone Pro Max dans une soixantaine de lieux différents (Île-de-France, Hauts-de-France, Bretagne, Provence-Alpes-Côte d’Azur et Bourgogne-Franche-Comté), mettant à l’honneur des Français du quotidien qui se battent pour de « justes causes ». Parmi celles-ci, forcément, l’accueil inconditionnel des clandestins (ou « migrants », pour les plus poètes d’entre nous…), avec un Cédric Herrou hissé au rang de maquisard héroïque du militantisme sans-frontiériste, la transformation d’un ancien McDo de Marseille en restaurant pour les pauvres, le combat pour l’agriculture bio, la lutte d’un maire contre les pesticides ou encore l’endoctrinement de la jeunesse contre le réchauffement climatique… Un gloubi-boulga de thématiques diverses et variées qui traduit chez l’artiste une pensée confuse et ne fait pas l’économie de positionnements contradictoires, le principe de liberté de circulation des hommes ne faisant pas bon ménage avec les préoccupations écologiques…
Postures et imposture
Les sujets abordés, en définitive, sont à peine survolés et ne dépassent jamais le stade du commentaire élogieux et humaniste. À croire que ce road movie un peu facile et bâclé n’a pour raison d’être que de célébrer l’indignation sélective de celui qui le porte. Un Yann Arthus-Bertrand tout faraud et ironique qui n’hésite pas à mettre en doute, face caméra, la parole d’éleveurs chevronnés lorsque ceux-ci, désemparés, affirment pâtir de la réintroduction des loups dans leur région et subir, de surcroît, des menaces de la part des militants d’extrême gauche. Le photographe, de toute évidence, est plus à l’aise sur les Champs-Élysées que dans cette nature qu’il prétend défendre…
1 étoile sur 5
Imprimer, enregistrer en PDF cet article