« Ne le tuez pas, ne l’écrasez pas, ne le découpez pas », a prévenu Sid Miller, commissaire à l’Agriculture du Texas. Le « ver marteau » (Bipalium kewense), ainsi nommé pour sa tête en forme de demi-lune, prolifère dans le nord de l’État. Cette espèce de ver plat, longue parfois de 40 cm, possède une capacité stupéfiante : chaque fragment de son corps peut donner naissance à un nouvel individu. Tenter de le découper ne fait donc que multiplier le problème.

Originaire d’Asie du Sud-Est, le ver s’est discrètement installé aux États-Unis depuis plusieurs années. Mais les pluies intenses, favorisées par le réchauffement climatique, lui offrent désormais des conditions idéales pour prospérer. Présent dans la litière humide, le paillis ou les serres, il se nourrit d’escargots et de vers de terre, menaçant ainsi la santé des sols.


Originaire d’Asie du Sud-Est, Bipalium kewense se nourrit d’escargots et de vers de terre, contribuant à appauvrir les sols lorsqu’il prolifère dans les milieux humides. © Pierre Gros/ Justine et al., Biodiversité et Conservation , 2018

Une toxine digne du poisson-globe

Selon Theresa Dellinger, entomologiste à Virginia Tech, certaines espèces de Bipalium produisent une neurotoxine, la tétrodotoxine, que l’on retrouve également chez le poisson-globe. Si le ver ne mord ni ne pique, le contact avec son mucus peut irriter la peau ou les muqueuses. Dépourvu de prédateurs naturels, il se reproduit à une vitesse inquiétante : les rares animaux qui s’y frottent le trouvent désagréable, voire toxique.

Les autorités appellent les habitants à ne surtout pas les manipuler à mains nues, mais à les isoler dans un sac avant congélation pendant 48 heures, puis à signaler leur présence à l’Institut texan des espèces envahissantes. Un rappel inquiétant : à l’heure du changement climatique, les envahisseurs les plus redoutables ne sont pas toujours ceux qu’on croit.