Jamais loin de sa guitare à 53 ans, Gaëtan Roussel fait résonner sa voix, connue de plusieurs générations depuis le succès du groupe folk-rock Louise Attaque, dans les ballades de son nouvel album « Marjolaine », qui sort vendredi.

En choisissant ce titre, le chanteur aux textes poétiques et à la voix un brin rocailleuse fait une double référence, à une plante aromatique mais aussi à un prénom « propice à l’imaginaire », a-t-il confié à l’AFP lors d’une rencontre à Paris.

Dans cet opus toujours introspectif mais plus zen que l’époque « Help Myself (Nous ne faisons que passer) » en 2010, Gaëtan Roussel, qui repartira en tournée au printemps prochain, a conservé intact son goût des autres, signant deux duos avec le vétéran Bernard Lavilliers et la révélation Solann.

QUESTION: Dans quel état d’esprit avez-vous créé ce sixième album solo ?

REPONSE: « Quand j’ai commencé à l’écrire, je cherchais à garder une colonne vertébrale liée à ma guitare acoustique. J’avais envie de faire un album simple, limpide, lisible, direct, mélodique. Et d’aller vers des gens que je ne connaissais pas encore (comme les producteurs Marso, ou encore Marlon B qui a notamment travaillé pour Juliette Armanet, NDLR). Mais je voulais aussi que ma voix penche du côté des mots plutôt que des notes. »

Q: Que représente le fait de sortir un album, à une époque où la musique se consomme de plus en plus en streaming ?

R: « Aujourd’hui, souvent, on se pose cette question: est-ce qu’on sort un album dans son intégralité ? Est-ce qu’on peut sortir des chansons, parce que le format playlist fonctionne beaucoup, à raison ? Moi, je crois que ça vaut toujours le coup. D’ailleurs, il y a plein de disques qui sortent encore, quel que soit le style musical. Il y a une histoire qui est racontée. Donc créer un album où les ballades vous prennent par la main et votre propre interprétation se met à travailler, ça me plaît. »

Q: Pourquoi avoir eu envie de partager un duo avec Solann, un des nouveaux visages de la scène française ?

R: « Parce que j’aime sa singularité, j’aime sa voix. Chanter avec quelqu’un d’autre, écrire une chanson avec quelqu’un d’autre, c’est parler de la même chose, mais de manière différente. Quand on n’est pas de la même génération, on ne va pas forcément utiliser les mêmes mots, on n’interprète pas les notes de la même manière. Cette idée de confronter mon univers à d’autres, ce n’est pas du tout le perdre, au contraire, c’est l’enrichir. »

Q: Les rencontres sont inscrites dans l’ADN de votre parcours artistique…

R: « Je suis né en groupe, avec mes camarades de Louise Attaque. Il y avait déjà cette démarche de collectif. J’ai fait un précédent album, +Éclect!que+ (2023), qui n’est qu’un album de duos très variés. Faire partie d’un groupe, être en solo, avoir la chance de produire l’album des autres, écrire pour d’autres (comme pour Vanessa Paradis ou Louane, NDLR), tout ça tourne autour des mots et de la mélodie. Ça fait plus de 25 ans que je fais ce métier, que j’ai la chance d’en vivre. Si je m’ennuyais, je m’en voudrais. Donc, je fais mon maximum pour ne pas m’ennuyer. »

Q: Ce que vous décrivez semble à l’opposé de la musique générée par intelligence artificielle, à base d’un simple prompt…

R: « Je crois que nous avons besoin de plus en plus – et ça ne va pas s’arrêter – d’humains. Je vois l’artiste Rilès qui a fait une performance de 24 heures (le rappeur a produit lui-même ses pochettes d’album à la chaîne, en octobre, NDLR). C’est une démarche qui prouve bien que ce qu’on souhaite finalement, c’est avoir un peu de l’autre et un peu de son humanité. Donc je crois que ce n’est pas perdu. De temps en temps, on se promène dans des contre-allées, mais ce fil-là n’est pas du tout cassé. »

publié le 14 novembre à 09h19, AFP

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