FOCUS – La tarification du carbone aux frontières «est une mesure que nous devons mettre en œuvre avec le plus grand nombre possible, et le plus rapidement possible», s’est défendu Wopke Hoekstra, commissaire européen au climat.
La COP30 sur le climat n’est pas une réunion de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), laisse entendre l’Union européenne. À l’heure où elle fait pression pour la mise en place d’une feuille de route sur la sortie progressive des énergies fossiles (engagement acté il y a deux ans à Dubaï mais que certains préféreraient passer sous silence), l’Union européenne est attaquée à Belém sur son marché carbone aux frontières.
Dimanche soir, le président de la COP, André Correa do Lago, a publié une «note» de mise au point sur l’avancement des négociations depuis lundi 10 novembre, en faisant notamment ressortir les quatre plus gros points de tensions. Parmi eux, l’épineux sujet des mesures « unilatérales » en matière de commerce, comme la taxe carbone européenne aux frontières.
L’UE doit en effet imposer dès janvier un «mécanisme d’ajustement carbone» aux frontières (CBAM en anglais) visant les secteurs les plus polluants comme l’acier, l’aluminium, le ciment, les engrais, l’électricité et l’hydrogène. L’idée étant d’imposer aux importations à l’intérieur de l’UE un prix du carbone similaire à celui en vigueur en Europe, où les entreprises doivent déjà payer pour polluer.
«On a du mal à comprendre cette cristallisation»
Or depuis le début de la COP brésilienne, plusieurs pays dont la Chine ou l’Inde veulent à tout prix mettre ce sujet sur la table, considérant cette taxe comme du protectionnisme qui ne dit pas son nom. «La tarification du carbone est une mesure que nous devons mettre en œuvre avec le plus grand nombre possible, et le plus rapidement possible», a réagi lundi Wopke Hoekstra, commissaire européen au climat, refusant toute discussion qui remettrait en question ce mécanisme. Selon lui, plusieurs pays comme le Brésil envisagent d’ailleurs de faire la même chose.
«On a du mal à comprendre cette cristallisation autour du [CBAM] qui est un instrument compatible avec les règles de l’Organisation mondiale du commerce», indique-t-on au sein de la délégation française. Mais «si l’UE se dit prête à expliquer ce mécanisme à ses partenaires, voire à discuter de comment les accompagner pour partager la technologie» pour une transition verte, là encore, hors de question de revenir dessus. «Car si à la fin les mesures prises conduisent à fermer les usines en Europe pour ensuite les ouvrir avec le même niveau de pollution ailleurs, le climat a perdu», ajoute cette même source… qui souligne d’ailleurs que «d’autres questions se posent sur les mécanismes commerciaux qui bloquent ou ralentissent la transition: et par exemple, est-ce qu’un marché plus ouvert des minerais critiques ne serait pas plus efficace pour développer une transition s’éloignant des énergies fossiles? Cela fait partie des sujets qui sont légitimes.»
Une réunion bilatérale entre la Chine et l’UE devait se tenir dans la journée. Il reste en théorie jusqu’à vendredi soir aux ministres, qui arrivent cette semaine, pour trouver une issue à ces négociations encore très polarisées.