Aux États-Unis, les tribunaux voient de plus en plus de couples se présenter pour divorcer après que l’un des partenaires a eu une relation avec une IA. Mais ils ne sont pas encore prêts à y faire face.
Il n’y a pas que les célibataires qui ont des relations avec des IA. Certains sont prêts à faire voler leur mariage en éclats pour vivre leur amour avec des robots conversationnels. Comme le rapporte le magazine Wired, des couples commencent à divorcer à cause de ces relations extraconjugales et les tribunaux en voient de plus en plus aux États-Unis.
En couple depuis 13 ans, Eva, une écrivaine américaine de 46 ans s’est séparé de son partenaire. Une décision prise d’un commun accord, les deux ayant l’impression qu’elle le trompait avec des compagnons IA. Après être tombée amoureuse d’un premier chatbot, sur l’application Replika, elle s’est tournée vers la plateforme Nomi pour trouver ‘l’exploration sexuelle complète » qu’elle cherchait. Mais elle a fini par éprouver des sentiments pour plusieurs des personnages virtuels de cette application.
Des États pas encore prêts
Eva est loin d’être la seule. En juin, une femme de 36 ans a aussi décidé de mettre fin à près de 14 ans de mariage après avoir découvert que son mari, âgé de 49 ans, avait une liaison avec une « petite Latino sexy ». Elle provenait d’une application proposant des compagnons IA NSFW (« not safe for work », littéralement dont les contenus sont inappropriés au travail). Certains de ces robots conversationnels sont conçus pour imiter des filles mineures.
« En trois mois, il a dépensé des milliers de dollars entre l’application et une carte OnePay dont je ne savais absolument rien », a-t-elle relaté sur Reddit.
Mais si de plus en plus de tribunaux voient des couples divorcer à cause d’une IA, la plupart ne sont pas préparés à faire face à l’après… En septembre, le représentant de l’Ohio, Thaddeus Clagett a présenté une proposition de loi pour rendre illégal le mariage entre humains et IA. Elle interdirait également de donner une identité individuelle à ces systèmes, les définissant comme « non conscients », comme l’a rappelé Rebecca Palmer, avocate spécialisée dans le divorce, auprès de Wired.
Une de ses affaires actuelles inclut d’ailleurs des dépenses et le partage d’informations privées (comptes bancaires, numéros de sécurité sociale…) avec un chatbot qui « consumait la vie du conjoint et affectait ses performances professionnelles », a-t-elle révélé.
Qualification des IA
Elle estime que des lois qualifiant les IA de « tierce partie » et non de personne vont rapidement arriver dans des États progressistes comme la Californie. Selon elle, les tribunaux pourraient reconnaître que ces outils sont la « raison » d’un divorce, mais sans les identifier légalement comme des personnes.
Dans l’État de Californie, ils ne cherchent d’ailleurs pas à connaître les raisons de l’échec d’un mariage. « Ils ont seulement besoin qu’ils [les mariés] cochent la case ‘différends irréconciliables’. Qu’il s’agisse d’infidélité avec un robot ou un humain, cela ne change rien », a expliqué Elizabeth Yang, avocate spécialisée en droit de la famille.
D’autres États, tels que le Michigan ou le Wisconsin, sont en revanche beaucoup plus sévères, punissant l’adultère de peines pouvant aller jusqu’à cinq ans de prison et 10.000 dollars d’amende.
Vers une hausse des divorces à cause de l’IA
Alors qu’il est déjà difficile de gérer les liaisons extraconjugales entre humains pour les juges, cela le sera encore plus à l’heure où les individus sont de plus en plus nombreux à avoir des relations avec des IA. Se posera par exemple la question de la garde des enfants.
« Il est concevable, voire probable qu’ils remettent en question le jugement des parents car ils ont des échanges intimes avec un chatbot, ce qui soulève des interrogations quant au temps qu’ils passent avec leur enfant », a souligné Rebecca Palmer.
Elizabeth Yang pense, elle, que ce n’est que le début. Selon elle, les divorces vont augmenter dans les prochaines années, au fur et à mesure que certains se tourneront vers l’IA pour avoir de la compagnie. C’est d’ailleurs déjà le cas au Royaume-Uni, où la plateforme Divorce-Online a révélé en mai avoir reçu un nombre croissant de demandes de divorce dans lesquelles les clients invoquaient leur « attachement émotionnel ou romantique » à des compagnons IA, indiquant que ce rapprochement avait contribué à leur décision de mettre fin à leur mariage.