Une première crise politique se profile pour le premier ministre britannique, Keir Starmer. Le dirigeant travailliste a acté une grande réforme sur le droit d’asile qui a été présentée lundi aux parlementaires par la ministre de l’Intérieur, Shabana Mahmood.

À 45 ans, celle qui représente l’aile droite du Labour s’est inspirée du modèle restrictif danois imposé en 2021 par les sociaux-démocrates. Les mesures qui ont été avancées entendent restreindre le statut de réfugié qui était valable cinq ans avant de leur permettre de demander un permis de séjour permanent octroyé par les autorités en répondant à certains critères.

Le nouveau système réduit la durée de leur séjour à trente mois. Tous les deux ans et demi, ils devront se présenter pour valider leur statut. Le délai pour obtenir la résidence permanente passerait de cinq à vingt ans, sauf pour ceux qui « travaillent ou étudient », précise le gouvernement. Durant cette période, les réfugiés seront « forcés de rentrer dans leur pays d’origine dès qu’il sera jugé sûr » a expliqué Shabana Mahmood. L’autre mesure porte sur la suppression de l’accès aux aides sociales (logement, allocations financières) et serait réservée aux réfugiés qui ne peuvent pas travailler.

« Cesser de faire des immigrés des boucs émissaires »

Le gouvernement travailliste entend s’attaquer aussi à la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) pour favoriser davantage d’expulsions, notamment des familles. En gros, il veut restreindre le droit au regroupement familial présent dans l’article 8. Ce projet suscite une immense contestation au sein du Labour.

Dans le document présenté aux parlementaires, le gouvernement promet « à toutes les familles une aide financière pour retourner dans leur pays d’origine. Si elles refusent, nous passerons à un retour forcé. Nous lancerons une consultation sur le processus de mise en œuvre de l’expulsion des familles, y compris des enfants ».

Une vingtaine de députés ont publiquement contesté le projet dont la députée Sarah Owen, le député et ancien avocat spécialisé dans les droits de l’homme, Tony Vaughan et ceux élus en 2024 comme Simon Opher, Abitsam Mohamed et Neil Duncan-Jordan. Ils ont dénoncé des mesures « moralement condamnables » et qui, dans la pratique, se traduiraient par une augmentation du nombre d’enfants placés en détention avant leur expulsion.

Simon Opher a appelé le gouvernement à « cesser de faire des immigrés des boucs émissaires ». Dans le quotidien britannique, The Guardian, un élu constate : « Tout cela est terrible. C’est tout droit sorti du manuel de l’extrême droite ». Un autre affirme : « Je ne me suis pas présenté aux élections en tant que député travailliste pour embarquer des enfants en détresse dans des vols d’expulsion. »

Largement devancé par l’extrême droite et la formation Reform UK de Nigel Farage dans les sondages, le gouvernement de Keir Starmer a repris plusieurs de leurs propositions. « Utiliser les enfants comme une arme, comme le fait le ministre de l’Intérieur, est à mon avis une chose honteuse », a dénoncé sur la BBC radio 4, le membre du Labour, Alf Dubs qui est arrivé au Royaume-Uni en 1939 pour fuir la persécution des juifs.

Même condamnation de la représentante du HCR au Royaume-Uni, Vicky Tennant. L’agence des Nations Unies « demande instamment que les réfugiés se voient accorder un statut stable leur permettant de reconstruire leur vie et de retrouver leur famille, pendant qu’une solution durable à long terme est recherchée ».

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