SCAF, stop ou encore ? Pour les États, c’est encore. À l’occasion d’une rencontre dans la capitale allemande le 18 novembre, le président français Emmanuel Macron et le chancelier Friedrich Merz ont affiché leur volonté commune d’aller de l’avant. «Nous, on y croit, on avance et on va passer les messages qu’il faut aux industriels, aux structures de pilotage», a indiqué le président Emmanuel Macron lors d’une conférence de presse commune.
Le président français a même évoqué une obligation de résultats pour ces acteurs. Financé par l’Allemagne, la France et l’Espagne, ce programme majeur pour l’Europe de la défense vise à remplacer le Rafale et l’Eurofighter par des systèmes de nouvelle génération à l’horizon 2040. Le chancelier allemand a évoqué pour sa part l’échéance de la fin de l’année afin de prendre une décision sur la manière de passer à la phase suivante du programme.
En prenant position de cette manière, les deux dirigeants cherchent à rassurer face aux inquiétudes possibles d’un abandon du programme suite aux dissensions de plus en plus en grandes entre Dassault Aviation et Airbus, deux des principaux industriels impliqués sur ce programme.
Les deux avionneurs n’arrivent pas à trouver d’accord
Les deux avionneurs n’arrivent pas à trouver d’accord sur le partage des tâches industrielles concernant l’avion de combat, le Next generation Fighter (NGF), un des piliers principaux du SCAF. Dans un article publié le 17 novembre dernier sur son site Internet, le Financial Times affirmait même que les deux états discutaient d’un possible abandon du projet de construire l’avion de combat de nouvelle génération du programme SCAF pour se concentrer uniquement sur le Cloud de combat.
Le président français a rappelé la volonté politique des deux États sur ce dossier, évoquant même un test de crédibilité. «Nous, notre responsabilité, c’est de regarder l’intérêt général supérieur, celui de l’Allemagne, celui de la France, celui de l’Europe. Notre intérêt, c’est de mener à bien nos projets communs» a-t-il encore rappelé. Sans minimiser les difficultés rencontrées par les industriels. «Est-ce que cette volonté politique est simple à mettre en œuvre ? Non, parce qu’on demande à des industriels, qui sont des compétiteurs tout le reste de la journée de faire quelque chose ensemble. Donc qu’il y ait des frottements, ça ne me surprend pas ».
Faire travailler ensemble deux compétiteurs
Cela ne sera pas chose facile. Depuis le lancement du programme en 2017, les deux industriels peinent à s’entendre et les dissensions ont même atteint un niveau critique ces derniers mois. À tel point que Le PDG d’Airbus Guillaume Faury avait évoqué pour la première fois un départ possible de Dassault Aviation du programme. «S’ils ne sont pas contents avec ce qui a été décidé et qu’ils ne sont pas d’accord pour continuer, ils sont libres de quitter le SCAF», avait lancé le responsable de l’avionneur européen. Il répondait ainsi aux critiques maintes fois répétées d’Eric Trappier, PDG de Dassault Aviation, quant à la gouvernance du programme qui lui échapperait malgré sa désignation comme leader industriel du NGF.
Pour relancer le programme, les ministres de la Défense français et allemands, sont à la manœuvre. Le 17 novembre, Catherine Vautrin a reçu son homologue allemand Boris Pistorius pour un entretien à l’Hôtel de Brienne à Paris, avec au menu leurs coopérations industrielles et le programme SCAF. «Ils ont réitéré leur volonté politique commune de faire aboutir ce projet emblématique et se sont engagés à définir, ensemble, une nouvelle étape d’ici à la fin de l’année», fait savoir à L’Usine Nouvelle le ministère des Armées.
Selon le ministère, il y a urgence à faire avancer le futur système de combat aérien européen, qui répond à un besoin opérationnel incontournable pour la défense des deux pays et l’autonomie stratégique européenne. Le ministère confirme à l’Usine Nouvelle que l’ambition reste de maintenir le programme SCAF dans son intégralité, avec l’avion de combat. «Ce système de combat aérien du futur comportera non seulement un porteur, mais aussi des drones accompagnateurs, des senseurs, de la connectivité et un cloud de combat». Selon le projet initial, le programme doit entrer en début d’année 2026 dans une nouvelle phase plus opérationnelle (phase 2) en vue de réaliser un premier vol d’essai avec un démonstrateur en 2029. Cette phase succède à une phase d’études (dite phase 1B) qui a mobilisé 2000 ingénieurs.