Il n’y avait pas classe ce vendredi 21 novembre à l’école Clôteaux. Situé dans le quartier Bréquigny, ce petit groupe scolaire a connu une inhabituelle agitation, conséquence des révélations de menaces de mort visant l’un des enseignants. L’emballement médiatique est perceptible. Des caméras de télévision, des photographes, des journalistes qu’on n’a pas l’habitude de voir à Rennes. Mais aussi des parents d’élèves et quelques enfants qui courent, amusés de voir une telle agitation. La situation est pourtant grave.

Le 10 octobre, un professeur des écoles de maternelle a reçu les parents d’une fillette scolarisée dans sa classe. Refusant que son enfant ait un enseignant de sexe masculin, la famille demandait que son enfant change de classe, ce que le directeur avait refusé. A l’issue de cet entretien houleux, les parents auraient alors menacé de mort l’enseignant, affirmant qu’ils ne « craignaient pas de faire vingt-cinq ans de prison » si leur fille rapportait le moindre fait.

Les enseignants se mettent en grève

Depuis cette date, l’enseignant visé est arrêté. Une plainte a été déposée et le rectorat a été avisé. Mais peu de choses ont avancé. Face à ce silence, les enseignants ont décidé de se mettre en grève ce vendredi.

Devant l’école, tous les professeurs de l’école sont là. Des instits venus d’autres groupes scolaires sont également présentes, en soutien au directeur menacé. « C’est vrai qu’on est touchés par cet élan de solidarité. Mais on se dit aussi que c’est dommage qu’il faille en arriver là pour que les choses bougent », confie une enseignante de Clôteaux. Elle, comme tous les autres, préfère rester anonyme pour témoigner de ce mal-être qui anime l’équipe depuis plus d’un mois. « L’ambiance était tellement pesante depuis les faits. On n’avait pas goût à faire notre travail. On était inquiet pour notre collègue », reconnaît une autre professeure de l’école.

Depuis cette altercation, l’équipe enseignante a formulé une demande a priori assez simple : que l’enfant et sa famille changent d’école. « J’ai le sentiment qu’on ne peut plus travailler avec eux. Le lien a été rompu. Ce n’est plus possible », reconnaît un instituteur de Clôteaux.

La réglementation ne permet pas le changement d’école

Selon nos informations, la famille a été reçue jeudi par la direction académique, qui a entamé une médiation. Le problème, c’est que les textes de loi ne permettent pas de changer un enfant d’école si ses parents posent problème. La possibilité est ouverte seulement si l’attitude de l’enfant présente des difficultés. « Cette réglementation doit bouger. Ce n’est plus possible », souffle une professeure de l’école Jacques Prévert, située tout près.

Un enseignant de l'école Clôteaux, à Rennes, a été victime de menaces de mort par des parents refusant que leur fille ait un professeur hommeUn enseignant de l’école Clôteaux, à Rennes, a été victime de menaces de mort par des parents refusant que leur fille ait un professeur homme - C. Allain/20 Minutes

Ce vendredi, tous ses enseignants sont grévistes. « Parce que ces situations, on y est confrontés tous les jours. Des agressions verbales, on en subit de plus en plus. Mais bien souvent, on ne dit rien. On essaie de composer avec, pour ne pas faire de vague. Parce que les parents, on va les revoir le lendemain, et puis le surlendemain. On a banalisé ces agressions. Mais là, il y a un vrai ras-le-bol. »

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Habitante du quartier, Armelle est venue en soutien des enseignants. Au nom du conseil citoyen de quartier, elle vient rappeler ce que tout le monde si fort « J’ai toujours défendu une école libre, laïque et gratuite. Mais j’ai la sensation que certains parents l’oublient. L’école, n’est pas un supermarché. C’est une institution que l’on doit respecter », témoigne cette maman d’enseignante. « Il s’agit d’un parent qui menace de mort un agent. Et c’est inacceptable. A l’école, comme à l’hôpital, comme partout. Les parents ne sont pas des clients, qui choisiraient leurs options », tonne Fabrice Lerestif, secrétaire départemental du syndicat Force ouvrière.

Derrière lui, l’adjointe à l’éducation Gaëlle Rougier se fait discrète. Face à un tel emballement médiatique, l’élue écologiste veut éviter toute récupération politique. « Je suis venue là en soutien aux agents de la fonction publique. Ce qui s’est passé ici est inacceptable. Ce sont des situations rares mais il faut les traiter avec sérieux. Les enseignants et les agents de la ville ne doivent pas exercer dans la peur », assure l’élue. Elle, comme tous les autres, demande « des moyens humains » pour le service public. « Malheureusement, ce n’est pas un fait isolé. Ça arrive trop souvent et tous les collègues le disent », confirme une enseignante de maternelle de Clôteaux.

L'ensemble des enseignants de l'école Clôteaux, à Rennes, étaient en grève ce vendredi.L’ensemble des enseignants de l’école Clôteaux, à Rennes, étaient en grève ce vendredi. - C. Allain/20 Minutes

Ce vendredi, les grilles de l’école resteront fermées. Pour l’équipe enseignante comme pour les enfants et les parents d’élèves, il faudra y revenir lundi. Avec l’espoir que la situation aura pu être réglée. Et que chacun puisse retrouver l’apaisement essentiel à l’apprentissage.