Il espérait sans doute faire taire les critiques. Ce vendredi, Gérald Darmamin s’est pourtant attiré les foudres de plusieurs syndicats professionnels quand il a annoncé avoir écarté le directeur de la prison de Rennes. Le ministre de la Justice estime que le responsable de l’établissement pénitentiaire a commis « une faute » en laissant des détenus aller à une sortie au planétarium de Rennes le 14 novembre.

Un détenu de 37 ans, condamné depuis décembre 2024 pour des faits de vol, s’était alors évadé sans violence. Il est toujours en cavale depuis. Ce vendredi, le ministre a été interrogé à l’occasion d’un déplacement à la prison de la Santé, à Paris, et estimé que le directeur « ne peut pas rester en responsabilité », après cette évasion. « Je dois à la société des comptes, les victimes et la société ne comprennent pas quand des personnes s’évadent lors de sorties », a justifié le garde des Sceaux.

« C’est un limogeage, il faut le dire. Mais pour quelle raison ? Parce qu’il y a eu une évasion ? L’évasion, c’est un risque qui existe. Cette décision, c’est un effet d’annonce de la part d’un ministre qui veut échapper à ses responsabilités », estime Me Juliette Beigelman, coresponsable locale du Syndicat des avocats de France. Le SAF rappelle au passage que c’est pas le directeur seul qui autorise les sorties. « C’est une décision éclairée, concertée, prise avec le juge d’application des peines. Pas un choix fait dans un coin. »

Des agressions violentes et des morts

L’avocate au barreau de Rennes est régulièrement confrontée aux problématiques du centre de détention ouvert en 2010. « La réalité, c’est que la situation est catastrophique à Rennes-Vezin ! Cette année, on en est presque à dix morts. Il y a une surpopulation carcérale avérée à plus de 150 % avec des détenus qui sont trois par cellule. Et ça, c’est de la responsabilité du ministre de la Justice. »

Depuis plusieurs mois, les syndicats d’agents pénitentiaires multiplient les alertes évoquant des épisodes de violences de plus en plus fréquents. « Cette évasion, c’est un prétexte, une tentative pour cacher tout le reste », dénonce l’avocate, jointe par 20 Minutes.

Le ministre de la Justice Gérald Darmanin a présenté un plan « Zéro portable en prison »Le ministre de la Justice Gérald Darmanin a présenté un plan « Zéro portable en prison » - Jeanne Accorsini/Sipa

Son syndicat n’est pas le seul à s’offusquer de cette mesure disciplinaire. Dans un communiqué, le Syndicat national des directeurs pénitentiaires (SNDP-CFDT) a fait part « de son indignation et de son incompréhension » après cette décision. « Cette mutation d’office n’est qu’une manière de désigner un coupable, jeté en pâture à l’opinion, afin que l’administration se désolidarise de cette affaire qu’elle considère gênante », estime le syndicat. Selon lui, « aucune procédure disciplinaire » n’a été mise en œuvre pour permettre au directeur de s’expliquer.