Par Mamy Yves
Ratsimbazafy – Publié le 22 Nov 2025 à 11:30
Alors que la pénurie d’œufs
persiste en France, certaines grandes surfaces s’approvisionnent en
Ukraine pour contenir les prix. Un choix qui soulève de graves
inquiétudes sanitaires et éthiques.
La pénurie d’œufs s’installe durablement dans les rayons
français. Depuis le début de l’année, les taux de rupture explosent
en effet et
les consommateurs se ruent sur les boîtes dès qu’elles
réapparaissent. Selon NielsenIQ, les œufs affichent un taux de
rupture de plus de 13 %, avec un pic à 15 % cet été. « C’est
énorme », alerte ainsi David Lecomte, directeur Insight
consommateur. Un niveau très éloigné du seuil considéré comme
acceptable, fixé autour de 2 %. Cette tension perdure
malheureusement et devrait se poursuivre plusieurs mois encore.
Une
demande record portée par les jeunes consommateurs
L’une des principales raisons de cette pénurie est l’engouement
sans précédent pour cet aliment accessible. Par rapport à 2024, les
ventes bondissent en effet avec +8,3 % de chiffre d’affaires, +6,2
% de boîtes vendues. La boîte de six œufs, autour de 2,08 €, reste
ainsi l’une des sources de protéines animales les plus économiques,
loin devant la viande de bœuf à 16,11 € le kilo. « L’œuf est un
aliment complet, riche en protéines, vitamines et fer »,
rappelle d’autant plus la Dre Laurence Plumey, nutritionniste.
Logiquement, cette popularité met la filière française sous
pression. « Les capacités de production tournent à plein régime
mais ne suffisent plus à absorber la demande », constate quant
à lui David Lecomte.
Des prix
étonnamment stables malgré la tension
Malgré la flambée de la demande, les prix n’ont pourtant presque
pas bougé. En octobre, l’inflation sur les œufs n’était en effet
que de 1,2 %. Les grandes marques ont même baissé leurs tarifs de
1,8 %. Comment expliquer ce paradoxe ? Une partie de la réponse se
trouve dans les importations. Il faut dire que depuis le printemps
2025, les distributeurs français se tournent vers l’Ukraine pour
compenser la pénurie. Une pratique violemment dénoncée par les
producteurs français et le CNPO.
Selon eux, ces œufs « ne respectent pas les normes
européennes » et « peuvent contenir des substances
interdites », entraînant « un risque sanitaire
important ».
Bien-être animal et
concurrence déloyale
Autre reproche : ces importations contournent les engagements
français. Alors que les grandes surfaces promettaient la fin des
œufs de poules élevées en cage, certaines vendent des œufs
ukrainiens qui ne respectent pas ces standards. Idem pour
l’ovosexage, censé éviter le broyage des poussins mâles. Avec
7 milliards d’œufs vendus en 2024, la demande ne cesse
donc de croître et pour y répondre, la filière prévoit la
construction de 300 nouveaux poulaillers d’ici 2030 et vise 90 % de
poules pondeuses en système alternatif. Une course contre la montre
pour regagner la confiance des consommateurs.