Alors que Kalvin Gourgues a électrisé Saint-Denis, le poste de centre n’a jamais paru aussi ouvert. Entre tentation du rajeunissement et maintien des hommes en place, le débat promet un joli remue-méninges du côté de Marcoussis et dans l’opinion populaire.
Au petit jeu du sélectionneur, auquel se prêtent volontiers des millions de passionnés avant chaque compétition, le poste de centre promet des débats à n’en plus finir dans les travées des stades cet hiver. Plus peut-être qu’aucun autre, y compris celui d’ouvreur.
Imaginez que vous soyez Fabien Galthié, que le Tournoi des 6 Nations se profile à l’horizon et que vous vous retrouviez, par miracle, avec tout le monde sur le pont : Gaël Fickou, Yoram Moefana, Pierre-Louis Barassi, Nicolas Depoortere et Emilien Gailleton. Un club des cinq – pour deux places – auquel il convient, depuis samedi, d’ajouter un nouveau membre, arrivé avec fracas dans ce cercle pas si fermé : en deux ballons touchés et une percée fantastique – suivie d’un service d’orfèvre pour Louis Bielle-Biarrey, Kalvin Gourgues a pris date en ce 22 novembre. On en doutait peu, on en a désormais la preuve : il faudra compter avec lui dans un futur très proche. « On imagine toujours le meilleur pour un premier match, que ce soit en Top 14 ou en sélection nationale, témoignait le Toulousain, vingt printemps et onze matchs de championnat dans les jambes. Je n’aurais pas pu imaginer mieux, à vrai dire. Je suis très ravi d’avoir pu aider l’équipe à marquer un essai et à bien finir le match. Je suis très content de cette première. » Gaël Fickou, du haut de ses 98 sélections, se réjouit de cette effervescence croissante et mesure ce qu’elle suppose pour la suite : « Il y a des super joueurs avec une concurrence de fou au centre, comme je n’en ai jamais eu en équipe nationale, soulignait le Racingman après le coup de sifflet final. On a vu l’entrée de Kalvin. Elle a fait du bien. Pierre-Louis Barassi, qui a été blessé et qui a joué les deux premiers tests, a sorti de très beaux matchs et « Nico » Depoortere a livré deux très grosses prestations aussi. Je pense à Emilien (Gailleton) aussi, qui a pris un K.-O. la semaine dernière mais qui a fait un super match ce week-end (avec Pau). C’est bien, il y a de l’émulation, des jeunes qui arrivent. C’est ce qu’il faut pour l’équipe. La France ne manque pas de centres et il y a énormément de talents à ce poste. Ça me pousse aussi à m’élever et à être meilleur. » Ses objectifs personnels l’exigent, au-delà de la centième cape dont il n’est plus qu’à deux unités : « Oui, j’y pense parce que tout le monde m’en parle. Mais, en soi, mon objectif, c’est d’essayer d’être là jusqu’à la Coupe du monde 2027. »
Six paires différentes en onze tests
Entre états de forme, histoire de profils, questions de complémentarité et niveaux de vécu, l’équation des centres va constituer un dilemme à choix multiples pour l’encadrement tricolore. Dans tous les cas, il y aura des décisions fortes à prendre, des sacrifices et de vraies options qui donneront de sérieuses indications sur ses intentions à moyen terme, entre sécurité et vitesse, expérience et jeunesse. Si la sagesse voudrait que la paire Moefana-Fickou – le retour du Bordelais sur les terrains est imminent – reprenne du service, les tentations sont multiples, au regard des garanties apportées par le très complet Pierre-Louis Barassi sur l’année civile, la nouvelle dimension prise par Nicolas Depoortere, auteur de quatre essais sur la période, ou du potentiel que l’on imagine sans limite de Kalvin Gourgues, sorte d’Ovni capable de jouer à tous les postes des lignes arrière. Paradoxalement, le seul élément qui paraît aujourd’hui incontestable n’est autre que le grand absent de l’automne : Yoram Moefana. Pour le numéro 13, en revanche, les jeux sont ouverts.
Rien que pour le groupe de quarante-deux, les arbitrages promettent un beau casse-tête. Un problème de riches, certes, mais un problème tout de même à l’heure où l’on cherche encore et toujours la formule gagnante au coeur de l’attaque. Entre les indisponibilités et les options stratégiques, six paires différentes ont été alignées en onze tests sur l’année civile : Moefana-Barassi à quatre reprises ; Barassi-Depoortere et Fickou-Depoortere deux fois ; Moefana-Fickou, Fickou-Gailleton, Fickou – Barassi une fois ; le total monte à dix si l’on compte les associations composées en cours de partie. 2026 sera-t-elle l’année de la stabilité à ce poste ? À moins de deux ans de la Coupe du monde, on peut présumer que ce soit la volonté des entraîneurs.