Les compteurs sont protégés par des scellés, soit des accessoires en polypropylène empêchant le consommateur final d’ouvrir le capot. Mais la manipulation…
Les compteurs sont protégés par des scellés, soit des accessoires en polypropylène empêchant le consommateur final d’ouvrir le capot. Mais la manipulation opérée par l’ancien salarié d’Enedis ne prenait pas plus de dix minutes : ouverture compteur par l’arrière, dépose du scellé, soudure en forme de banane, fermeture compteur, repose du scellé.
« C’est assez simple à ouvrir »
L’homme assure s’être procuré les « scellés » de rechange pour 200 euros via la mystérieuse visite d’un « voyageur » alors que sa maison venait d’être détruite par un incendie. L’assesseur Denis Roucou doute : « C’est quand même curieux ce voyageur si gentil qui vous fournit pour 200 euros de scellés et vous explique comment faire », s’étonne le magistrat. Enedis pense plutôt que les scellés ont été dérobés sur un site de l’entreprise.
« C’est assez simple à ouvrir, même très simple, je fais une soudure et ça marche », s’émerveille le prévenu. Celui-ci confesse que sa petite activité a fait « boule de neige ». L’homme s’équipe de deux mallettes, un fer à souder, une lampe frontale et écume le département, facturant jusqu’à 800 euros l’intervention. Il assure n’avoir jamais démarché les usagers, ce que contestent pourtant certains clients.
Le business est vite florissant. « Il y avait trop de gens. J’avais 10 ou 15demain coups de téléphone par jour, c’était plus possible. J’ai une vie de famille », s’étouffe le retraité. Au téléphone, par souci de discrétion, certains utilisent des codes comme « moteur de bateau » ou « machine à laver ». « Vous ne vous dites pas : ‘‘Je suis en train de parler comme un stupeux ?’’ » questionne le président Gérard Pitti.
Deux ans de prison avec sursis requis
« Ce qui me navre, c’est que, pendant quarante ans, vous avez mis votre travail au service d’une entreprise et que vous l’avez trahie », grince Me Philippe Goosens, l’avocat d’Enedis qui réclame 1,2 million pour le préjudice matériel et encore 60 000 euros pour le préjudice moral et les frais d’avocat.
Établie à près de 600 compteurs par Enedis, la fraude a été ramenée par le parquet à l’audience à 487 compteurs trafiqués. « On est sur cinq ans d’activité délictuelle. Il ne s’est arrêté que parce qu’il était trop sollicité », soupire la procureure Perrine Lannelongue avant de réclamer deux ans de prison avec sursis et la confiscation des scellés (dont une maison estimée à 700 000 euros).