Comme de plus en plus de clubs européens, l’Olympique de Marseille, qui reçoit Newcastle en Ligue des champions mardi, cible les joueurs anglais, qui s’exportent de plus en plus loin de leur île natale.

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France Télévisions – Rédaction Sport

Publié le 25/11/2025 06:10

Temps de lecture : 7min

Mason Greenwood, CJ Egan Riley et Angel Gomes, les trois joueurs anglais de l'OM. (AFP)

Mason Greenwood, CJ Egan Riley et Angel Gomes, les trois joueurs anglais de l’OM. (AFP)

Alors que l’Olympique de Marseille joue son avenir en Ligue des champions, mardi 25 novembre au Vélodrome, face à Newcastle, il pourrait y avoir plus d’Anglais titulaires côté marseillais que chez les Magpies. Depuis deux ans, le mercato olympien a en effet pris des airs d’Eurostar. Avec Mason Greenwood, Angel Gomes et CJ Egan Riley, ils sont ainsi trois sujets de sa majesté Charles III, sans oublier Matt O’Riley, né et élevé dans la banlieue de Londres, même s’il représente sportivement le Danemark.

L’OM entretient ainsi une tradition, marquée par le passage de 12 joueurs anglais et notamment Laurie Cunningham, Joey Barton et évidemment Chris Waddle. Mais l’accent britannique de l’OM d’aujourd’hui ne doit rien au hasard. Le premier responsable se nomme Roberto De Zerbi. Car s’il est Italien, l’entraîneur de l’OM a été marqué par son passage à Brighton (2022-2024). Une expérience dont il garde un goût prononcé pour les joueurs qui ont ferraillé sur les pelouses d’outre Manche. « La Premier League ou le Championship [la Ligue 2 anglaise] ont des caractéristiques très similaires à la Ligue 1 en termes d’exigences physiques, de rythme, d’intensité. Ces Championnats se ressemblent beaucoup… », expliquait-il à son arrivée à l’OM.

Depuis, l’OM a recruté neuf joueurs en provenance d’Angleterre en un an et demi. « S’ils attirent autant de bons joueurs, c’est parce que Medhi Benatia a joué dans des grands clubs, ça rassure les joueurs de parler avec lui. Tout comme d’avoir Roberto De Zerbi sur le banc », analyse Mohamed Amaar, agent de Youssouf Fofana et Moussa Diaby notamment. Un pouvoir d’attraction dont l’OM se sert pour également attirer de jeunes Anglais à fort potentiel, comme le reste de l’Europe.

En parfaite opposition du Brexit, le football anglais ne cesse en effet de s’ouvrir depuis des années. Après avoir vu Jadon Sancho puis Jude Bellingham se révéler au Borussia Dortmund, les jeunes talents anglais sont de plus en plus nombreux à rejoindre le Vieux Continent. Une aubaine pour des clubs en quête de bons coups, comme l’OM, dont le président Pablo Longoria annonçait en mai un resserrage de ceinture : « On va travailler avec la tête pour trouver les meilleurs joueurs au prix que je fixe en tant que président pour respecter la trésorerie. La gestion économique va être forte, il va falloir réguler tout en améliorant l’effectif. »

Pour cela, les dirigeants marseillais se sont tournés, notamment, vers des Anglais prometteurs comme Angel Gomes, CJ Egan Riley (arrivés libres) et Matt O’Riley (prêté par Brighton). « Acheter un jeune Anglais, c’est l’assurance d’une belle plus value pour les clubs français, car derrière, la Premier League est le principal acheteur de ces joueurs. Il y a une anticipation de plus value sur ces joueurs qui sont des bonnes affaires pour les clubs de l’Hexagone », explique ainsi l’économiste du sport Luc Arrondel. « Les clubs anglais gardent à l’œil les jeunes qui brillent à l’étranger, confirme l’agent Fifa Vivien André. Et même un club anglais de milieu ou parfois de bas de tableau peut dépenser 40 millions d’euros pour un joueur aujourd’hui. »

Et pour cause : les règlements obligent les clubs anglais à compter des « homegrown players » (des joueurs formés au pays) dans leur effectif. Or, si ce n’était pas toujours le cas par le passé, la plupart de ces jeunes joueurs sont dorénavant Anglais. Là encore : grâce au Brexit, avance l’économiste Luc Arrondel : « Depuis le Brexit, les clubs anglais ne peuvent plus intégrer à leur centre de formation des Européens de moins de 16 ans, ce qu’ils faisaient beaucoup, et ce qui les a poussés à former plus de joueurs locaux ». Un changement qui a aussi encouragé l’Angleterre à revoir sa formation, avec succès, en témoigne le titre de champion d’Europe U23 acquis à l’été 2025. Quatre de ces champions d’Europe étaient d’ailleurs en Ligue 1 au coup d’envoi de la saison, dont deux à Marseille : CJ Egan Riley et Jonathan Rowe (avant ce dernier ne soit exfiltré à Bologne). Charlie Cresswell évoluant à Toulouse, et Tyler Morton à Lyon.

Acheter un jeune Anglais est ainsi devenu un bon filon, qui s’auto-alimente. À Marseille, Jonathan Rowe avait par exemple convaincu son coéquipier en sélection CJ Egan Riley de le rejoindre. Même chose entre Mason Greenwood et Angel Gomes. « Quand un joueur se sent bien, en valeur, dans un club, il est le meilleur ambassadeur pour attirer d’autres joueurs. Surtout s’il est ami ou proche du joueur ciblé, c’est du pain béni pour le club », confirme ainsi l’agent Franck Belhassen, qui s’occupe notamment de Brian Madjo, joueur de 16 ans évoluant au FC Metz, qui est régulièrement appelé par l’Angleterre chez les jeunes.

Mais l’Olympique de Marseille n’est évidemment pas le seul club à avoir compris ce bon filon, à l’image de l’Olympique lyonnais qui compte également trois joueurs anglais dans son effectif. En Ligue 1, cette saison, on dénombre ainsi 12 joueurs anglais, contre 9 en Italie, 7 en Espagne et 6 en Bundesliga. « C’est nouveau. On se souvient de David Beckham au Real Madrid, à Milan puis au PSG, mais à part lui, c’était rare de voir un joueur anglais à l’étranger. Aujourd’hui, on reçoit de plus en plus de sollicitations de jeunes Anglais ou de leurs parents pour venir en France, ou en Europe”, confirme Vivien André. 

La Ligue 1 compte 12 joueurs anglais, répartis dans six clubs. (franceinfo: sport)

La Ligue 1 compte 12 joueurs anglais, répartis dans six clubs. (franceinfo: sport)

Face à l’extrême concurrence de leur championnat domestique, où même un promu peut compter sur un effectif d’internationaux, « les Anglais ont compris que venir en France, c’est idéal pour s’aguerrir, estime Vivien André. Le football anglais est si puissant financièrement qu’un joueur recruté pour 50 millions d’euros peut devenir remplaçant. Et donc, le petit jeune derrière, il n’est pas près de jouer. Alors que s’il vient en France, il a plus de probabilités d’avoir du temps de jeu et de la visibilité ». Ce qui est, par exemple, le cas du défenseur marseillais CJ Egan Riley, courtisé par plusieurs écuries anglaises l’été dernier, mais qui a opté pour l’OM. 

« Les Anglais ont compris que c’est plus facile d’aller s’aguerrir en Europe, et les autres pays européens ont compris que les jeunes Anglais étaient prêts à jouer chez eux. Parce que l’intensité du football anglais est telle, même à l’entraînement, que même un jeune n’ayant aucun match de Premier League peut être rapidement prêt pour la Ligue 1. »

Mohamed Amaar, agent de joueurs

à franceinfo: sport

Dernier élément d’explication de cette tendance : la fin d’une forme de snobisme britannique. « Les jeunes joueurs anglais qui me sollicitent estiment que leur football a changé depuis que des entraîneurs étrangers sont arrivés. Sous l’influence des Jurgen Klopp, Pep Guardiola ou Mikel Arteta, la Premier League, d’un point de vue jeu, tactique, a pris l’accent latin. Et donc les jeunes joueurs anglais s’ouvrent plus facilement à d’autres championnats que le leur », résume Vivien André. Avec l’idée, dans un coin de la tête, de revenir au pays par la grande porte. Ce qui, pour les Anglais de l’OM, passe par une grande performance mardi face à Newcastle.