Il se dit « victime de racisme, de la discrimination et du favoritisme ». Cet ancien chargé de cours et doctorant à l’université de Rouen, malgré son cursus, végète au RSA, sans emploi. Depuis dix ans, il rumine. Le 19 juin 2015, sa thèse n’a pas été validée. Son travail a été jugé insuffisant et le plagiat important par les universitaires qui le suivaient. Ce jour-là, il s’est senti « violé ». « Ils m’ont piégé, ils m’empêchent de travailler. J’ai envoyé 10 000 demandes d’emploi », rumine-t-il à la barre. Il se sent « malmené depuis 2003 ». Il ajoute : « J’ai passé 20 ans de souffrance, j’en suis désolé. »
« Je vous ramène les têtes coupées »
Sa haine contre les professeurs de l’université de droit, d’économie et de sciences politiques s’est exprimée à plusieurs reprises au mois de juin : « J’ai envie de tuer un maximum de professeurs », écrit-il. Dans un mail adressé à l’université : « Je vous ramène les têtes coupées » de plusieurs enseignants. Il profère des propos insultants, dégradants, accusateurs envers ses anciens collègues. Dans le même temps, sa colère se tourne contre sa conseillère bancaire. A elle aussi, il veut couper la tête ainsi que celle de son directeur.
L’homme, âgé de 46 ans, est interpellé à l’aéroport de Roissy le 25 juillet 2025. Il doit comparaître sous le régime de reconnaissance de culpabilité le 1er décembre. Mais dès septembre, il reprend ses menaces. il envoie un nouveau message : « Je vous promets un nouveau Bataclan à l’université de Rouen. »
« Ces propos rappellent le meurtre de Samuel Paty »
Le prévenu reconnaît être l’auteur des messages. « Réellement je n’ai rien fait. J’ai seulement écrit. J’ai tout effacé. » D’une façon générale, le natif du Maroc a du mal à se remettre en cause. « La République française est venue me chercher parce que j’avais un niveau très élevé », insiste-t-il.
« Il y a, chez lui, un narcissisme fou », s’emporte un avocat des parties civiles. Il pointe la dangerosité du quadragénaire. « Ces propos rappellent les meurtres de Samuel Paty et Dominique Bernard. » Il évoque « des délires » ou « une hostilité inouïe contre les institutions ». Plus tôt, le président Simon Caubet a cité l’expertise psychiatrique qualifiant le prévenu « d’élément dépressif et persécutif » avec un « trouble du spectre autistique », un « discernement altéré » et une « incapacité de se remettre en question ».
« Il procède de manière obsessionnelle face à la contrariété. Il tient à chaque fois des propos malveillants, injurieux », remarque le ministère public. « Pour l’ensemble des faits qui lui sont reprochés, je propose 18 mois d’emprisonnement avec 12 mois de sursis probatoire de trois ans ». Ce que le tribunal confirme, sauf que les 18 mois sont totalement assortis de sursis. Il n’y a pas de prison ferme.
Mais l’interdiction de paraître sur le campus de l’université et une obligation de soins sont prononcées. Le prévenu a dix jours pour faire appel du jugement.