La future mosquée du nord de Rennes ne sortira finalement pas de terre près du parc des Gayeulles. Après des mois de controverse, la mairie a finalement proposé au centre culturel islamique Espoir Amal de relocaliser le projet ailleurs dans le quartier de Maurepas.
Un centre culturel et une mosquée
Initialement, le lieu de culte devait voir le jour rue du Pâtis Tatelin, en lisière du parc des Gayeulles, sur un terrain de 3 000 m² en zone naturelle, mis à disposition par la Ville. Si la construction d’une méga-mosquée pouvant accueillir jusqu’à 4 000 fidèles avait été évoquée lors de l’annonce du projet en 2023, l’association avait ensuite revu ses ambitions à la baisse. Le choix final s’était porté sur la construction d’un centre culturel et d’une mosquée dimensionnée pour 300 personnes au quotidien, avec une capacité d’accueil étendue à 800 personnes pour les grandes célébrations du calendrier islamique.
Sauf que l’attribution du terrain à l’association par la mairie, sans concertation préalable, avait mis le feu aux poudres chez les riverains du quartier. Un collectif citoyen baptisé « Halte au bétonnage du parc des Gayeulles » était né. Une pétition dénonçant l’artificialisation de cet espace naturel avait rapidement récolté plus de 5 000 signatures.
Les riverains refusent l’artificialisation des sols
Le collectif citoyen a ensuite été rejoint dans son combat par l’association écologiste La Nature en Ville. « On a vite vu que le terrain bénéficiait d’une belle biodiversité », souligne Pascal Branchu, le président. « Cette parcelle est une zone tampon, qui échappe à la pollution lumineuse, et où viennent se réfugier plusieurs espèces comme le faucon crécerelle pour faire leur nid. À partir de là, toute artificialisation des sols était hors de question ».
Particulièrement remontés, les riverains recevaient également le soutien de Corinne Lepage, avocate et fondatrice du mouvement écologiste Cap 21. « On était prêt à attaquer le permis de construire dès qu’il était déposé », précise un riverain qui souhaite rester anonyme.
Revirement de situation
Si le dossier semblait dans l’impasse, un échange entre des membres du collectif citoyen et des représentants du centre culturel islamique organisé au cœur de l’été a permis de débloquer la situation. Les discussions ont convaincu l’association Espoir Amal d’abandonner le site retenu initialement. « Ils ont préféré s’épargner des années de procédure », indique une source proche du dossier. À la suite de cette rencontre, l’association a repris contact avec les élus pour savoir si d’autres terrains étaient disponibles.
Voici à quoi devait rassembler la future mosquée El Amal en lisière du parc des Gayeulles, à Rennes. (CCI Espoir Amal)
« Compte tenu des contestations exprimées par certains riverains du Pâtis Tatelin, de la complexité de certaines contraintes des lieux, et dans un souci d’apaisement, la Ville nous a proposé l’étude de nouveaux terrains, situés à proximité du quartier, afin d’accueillir ce projet dans de bonnes conditions », confirme au Télégramme, Mohamed Zaidouni président du Conseil régional du culte musulman de Bretagne et vice-président de l’association Espoir Amal.
À la recherche d’un nouveau terrain
Organisée à la fin du mois d’août, une réunion en mairie – en présence d’élus, de membres du centre culture islamique et de riverains du Pâtis Tatelin – a permis d’évoquer à nouveau ce dossier. Au cours des échanges, Marc Hervé, 1er adjoint à l‘urbanisme, aurait indiqué devant l’assemblée que d’autres pistes de lieux étaient en cours d’examen par les services techniques de la Ville. La question de la localisation se pose. La mosquée pourra-t-elle s’installer au cœur du quartier du Maurepas, dans un secteur plus facilement accessible pour les fidèles ? Sollicité, Marc Hervé n’a pas donné suite.
De leur côté, les opposants se félicitent de cette décision. « On est satisfaits… mais toute cette situation aurait pu être évitée dès le départ », déplore Pascal Branchu qui se défend de toute écologie politique. « On n’a jamais milité contre le projet de mosquée mais le terrain d’implantation a été très mal choisi dès le départ. On se serait mobilisé contre n’importe quel autre projet à cet endroit ».
Les militants espèrent désormais que le terrain puisse trouver une nouvelle vocation : « On veut travailler à une alternative. Pourquoi pas créer un verger à l’ancienne ou un centre de soin pour la faune sauvage en détresse ? »
Plus de 700 000 € collectés
Pour Espoir Amal, le processus est relancé. « Nous poursuivons le travail dans un esprit de concertation constructive et intelligente avec le service de l’urbanisme de la Ville », précise Mohamed Zaidouni.
L’association continue en parallèle de réunir les fonds nécessaires pour la construction de la future mosquée. À ce jour, plus de 700 000 € ont été collectés. Une somme encore loin des 5 millions nécessaires estimés pour bâtir ce bâtiment mais qui pourrait permettre de débuter a minima les travaux de fondation de l’édifice – quand un nouvel endroit sera trouvé et qu’un permis de construire sera délivré.
Les fidèles dans l’attente
En attendant, le besoin d’un nouveau lieu de culte musulman reste très fort pour les fidèles du nord de Rennes, une zone largement sous-dotée en infrastructures religieuse. Encore plus depuis l’incendie criminel de la mosquée de Maurepas en juin 2022.
« Il y a un besoin vital d’une nouvelle mosquée pour le nord de Rennes », insiste Mohamed Dicko, l’imam du centre Espoir Amal. « Aujourd’hui, on a une salle de prière trop petite qui déborde régulièrement. Certains fidèles ne peuvent pas rentrer. Il faut qu’ils puissent pratiquer leur religion dignement. Il y en a même qui préfèrent faire de la route pour aller au Blosne ou à Vezin… »