Mardi à l’Assemblée nationale, le Premier ministre Sébastien Lecornu a vivement pris à partie Éric Ciotti, président du groupe UDR allié au Rassemblement national, en l’accusant d’incohérences sur les impôts et le budget de l’État.
Lors de la séance des questions au gouvernement, le chef du gouvernement a évoqué un courrier dans lequel Éric Ciotti lui détaille ses « lignes rouges claires et non négociables », parmi lesquelles figure l’exigence d’ « aucune augmentation des prélèvements obligatoires sur les particuliers comme les entreprises ».
« N’hésitez pas à en parler en intergroupe avec le groupe du Rassemblement national », a-t-il lancé avec ironie, en rappelant que le parti d’extrême droite avait, selon lui, « accompagné (…) ce budget avec 35 milliards d’euros supplémentaires d’impôts pour les entreprises sur les ménages ».
Poursuivant sa charge, le Premier ministre a insisté sur la nécessité de mettre fin au double langage, déclarant : « Stop avec le double discours. L’absence de 49.3 va permettre la grande clarification », tout en fustigeant ceux qui, selon lui, disposent d’une équipe qui « va dîner avec les grands patrons pour les rassurer d’un côté pendant qu’une autre équipe ici augmente les impôts sur les particuliers et sur les entreprises ».
Il a également estimé qu’ « on ne peut pas promettre l’ordre à Nice », dont Éric Ciotti brigue la mairie, « et le désordre à Paris », pointant les contradictions qu’il attribue à cette alliance avec le Rassemblement national.
Le chef du gouvernement a en outre visé les propositions de « contre-budget » portées par le chef de file des députés UDR, assurant ne pas en avoir « pas trouvé trace dans les amendements » de son groupe au projet de budget pour 2026.
Il s’est enfin moqué du sigle UDR (Union des droites pour la République), en soulignant sa proximité avec celui de l’UDR (Union pour la défense de la République) des partisans du général de Gaulle en 1968.
Impôts, budget 2026 et alliances des droites au coeur de la bataille à l’Assemblée nationale
Rebondissant sur cette référence, Sébastien Lecornu a jugé qu’il s’agissait d’ « une idée certainement pour vous réclamer du gaullisme, ce qui ne manque pas de malice au regard de vos nouvelles alliances électorales », alors que le RN se réfère fréquemment au gaullisme qu’il a pourtant longtemps combattu.
Éric Ciotti dénonçait pour sa part le rejet inédit, par la quasi unanimité des députés, du projet de budget de l’État, qu’il qualifiait de « terrible symbole de l’effondrement de votre pouvoir ».
Selon lui, « dans n’importe quelle démocratie respectueuse des institutions, un Premier ministre responsable aurait immédiatement démissionné ». « Rien de tel qu’un peu de finesse pour rafraîchir l’atmosphère », lui a répondu le Premier ministre, en l’invitant à défendre plutôt « le principe même d’un exercice parlementaire ».
Le député RN Jean-Philippe Tanguy s’est alors dit « choqué » par les propos de M. Lecornu, tout comme « l’ensemble du groupe » Rassemblement national, lors d’une conférence de presse à l’Assemblée.
Il a assuré que « M. Ciotti a traduit son contre-budget (dans des amendements) comme nous avons traduit le nôtre », en revendiquant des baisses d’impôts et de dépenses, alors que, d’après lui, « les groupes macronistes n’ont fait qu’augmenter les impôts (…) et les dépenses ».
Jean-Philippe Tanguy a dénoncé le « cynisme de la macronie », qui, selon lui, « fait de grandes promesses sur le respect du Parlement » mais « sabote » le budget par « l’absence organisée » de ses députés au moment des votes.
Se fondant sur des calculs réalisés par son parti, il a affirmé que le RN avait été le groupe le plus présent dans l’hémicycle durant les discussions budgétaires, avec en moyenne 60% de députés participant aux votes, contre « un tiers » des députés macronistes (EPR), Horizons et MoDem.
- Ce qu’il faut retenir : Sébastien Lecornu a publiquement mis en cause Éric Ciotti et ses alliés du Rassemblement national sur la fiscalité et le budget 2026 à l’Assemblée nationale. Le Premier ministre reproche à l’UDR et au RN un double discours sur les impôts et leurs propositions de contre-budget, tandis que ses adversaires dénoncent l’effondrement du pouvoir et le rejet du budget de l’État. Le député RN Jean-Philippe Tanguy défend la cohérence de son camp, met en avant la présence de son groupe dans l’hémicycle et accuse les députés de la majorité de « saboter » le travail parlementaire par leur absence.
Avec AFP
