- Les partis de la coalition menée par les conservateurs de la CDU veulent réviser la loi régissant la prostitution en Allemagne.
- Depuis plus de 20 ans, elle avait été autorisée pour améliorer la situation des travailleurs du sexe et freiner le trafic d’êtres humains.
- En vain, dénoncent plusieurs élus.
La fin de la prostitution en Allemagne ? Plus de vingt ans après sa légalisation, c’est en tout cas le souhait d’une frange de la classe politique. Le débat, déjà présent depuis plusieurs mois, a été ravivé ces jours-ci par les conservateurs de l’Union chrétienne-démocrate (CDU). En particulier Julia Klöckner, la patronne du Bundestag, qui a regretté que le pays soit devenu « le bordel de l’Europe ».
« Lorsque nous parlons des droits des femmes mais que nous affirmons que la prostitution est un métier comme un autre, cela est non seulement ridicule, mais aussi méprisant envers les femmes », a martelé l’élue lors d’une cérémonie de remise de prix à Berlin. Même prise de position dans les colonnes du Rheinische Post de la part de Nina Warken, la ministre de la Santé : « Comme d’autres pays, l’Allemagne a besoin d’une interdiction pénale de l’achat de services sexuels pour les clients. Les prostituées doivent rester impunies et bénéficier d’une aide complète pour sortir de la prostitution ».
Environ 250.000 travailleurs du sexe non déclarés
Le parti de l’ancienne chancelière Angela Merkel en est convaincu : la loi de 2002 n’a pas atteint son objectif d’améliorer la situation des travailleurs du sexe et de freiner le trafic d’êtres humains, au contraire. Dans le détail, l’Allemagne compte environ 28.280 personnes prostituées déclarées, selon l’Office fédéral des statistiques (Destatis). Mais les travailleurs du sexe non déclarés seraient bien plus nombreux.
La coprésidente du groupe parlementaire de l’opposition conservatrice au Bundestag, Dorothee Bär, avait en effet cité il y a quelques mois le nombre de 250.000, des femmes pour la plupart. À titre de comparaison en France, le nombre de personnes prostituées est estimé entre 30.000 et 40.000. Ce chiffre ne prend pas en compte la prostitution occasionnelle.
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Autre particularité de l’Allemagne : les maisons closes. Fin 2022, le pays comptait 2.310 entreprises déclarées de prostitution, ou par exemple des services fournissant des prostitués pour certains événements, d’après l’Office national des statistiques Destatis. Ces établissements sont aussi dans le collimateur de la CDU, qui critique les conditions dans lesquelles les femmes y travaillent et l’insuffisance des contrôles.
Pour les conservateurs allemands, le pays devrait prendre le chemin de la Suède, laquelle s’appuie sur un système particulier : les prostituées ont le droit de proposer leurs services, mais les clients, eux, peuvent être poursuivis pénalement. Une loi similaire existe en France depuis 2016, tout comme en Irlande ou en Norvège.
T.G.
