L’ex-Twitter est l’objet depuis décembre 2023 de la toute première enquête formelle ouverte par l’Union européenne dans le cadre du règlement sur les services numériques, ou DSA, une loi phare adoptée il y a deux ans pour lutter contre les contenus illégaux et dangereux en ligne, et qui impose des obligations renforcées aux plus grandes plateformes actives dans l’UE, comme X, Meta ou TikTok.

Ambiance tendue avec Washington

En juillet 2024, la Commission avait publié les conclusions préliminaires de cette enquête, annonçant que X risquait une amende financière pour avoir commis plusieurs infractions au DSA. Mais depuis, l’amende ne s’est pas matérialisée, la Commission n’ayant pas encore prononcé de sanction ni même fixé de date pour clore son enquête.

L’évolution du contexte international n’est pas vraiment propice à une telle sanction : les champions américains de la tech ont bénéficié à plein régime du retour de Donald Trump à la Maison Blanche, qui les a défendus à plusieurs reprises contre les réglementations européennes, accusant Bruxelles de les cibler injustement. Elon Musk, propriétaire de X, était en outre l’un des plus proches alliés du président américain, jusqu’à leur rupture fracassante en juin.

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Depuis, Washington n’a pas changé de ton vis-à-vis de l’UE, pourfendant en septembre l’amende géante infligée à Google (près de 3 milliards d’euros). Lundi, le secrétaire américain au Commerce Howard Lutnick a même pressé l’UE de « rééquilibrer » sa législation numérique, si elle voulait une baisse des droits de douane américains sur l’acier. Il a appelé au passage la Commission à « résoudre les vieilles enquêtes en cours ».

L’Europe maintient le cap

Les dirigeants européens ont réaffirmé de leur côté que ces déclarations américaines n’avaient aucune influence sur l’application des lois européennes. L’heure semble donc venue pour Bruxelles de conclure son enquête et une amende contre X est désormais attendue d’ici la fin de l’année, à moins que les négociations visant à mettre fin à la guerre en Ukraine ne poussent la Commission à remettre le dossier à plus tard, pour ne pas risquer d’irriter les États-Unis.

La Commission se refuse à donner un calendrier, mais sa vice-présidente chargée de la Souveraineté technologique, Henna Virkkunen, avait dit ce mois-ci pouvoir « conclure une partie des enquêtes » en cours dans les semaines qui viennent, en réponse à une question à propos de X.

Outre le bon moment pour sanctionner la plateforme, Bruxelles doit trancher la question du montant de l’amende. Pour les infractions au DSA, la sanction peut atteindre 6 % du chiffre d’affaires annuel mondial du « fournisseur » du service concerné.

X ou l’empire Musk : qui paiera ?

La Commission devra déterminer dans le cas présent si le fournisseur correspond uniquement à X, ou à l’ensemble des entreprises d’Elon Musk, dont Tesla, ce qui ferait gonfler considérablement la facture. Interrogé à ce propos, un porte-parole de la Commission s’est contenté de rappeler que dans le cadre du DSA, Bruxelles avait jusqu’à « l’étape d’une décision finale » pour trancher cette question.