Du haut de son un mètre quatre-vingt-dix, le philosophe Valentin Husson observe le monde, les mutations sociales à l’œuvre. Le Strasbourgeois de 37 ans a développé une philosophie du réel, empreinte d’un gai savoir hérité de Nietzsche. Valentin Husson se définit comme un optimiste résigné. Dans son récent essai, Foules ressentimentales (Philosophie Magazine éditeur), il analyse le phénomène des trolls.
« Avec les réseaux sociaux, on vit une mutation totalement culturelle et civilisationnelle, relève le philosophe. La liberté d’expression est devenue une liberté d’impression. » Outre la haine individuelle que véhiculent les trolls, Valentin Husson pointe des effets dévastateurs géopolitiques et géostratégiques, remettant en cause les souverainetés nationales.
Contrer et anticiper les ingérences extérieures
« Des états comme la Chine, la Russie, la Turquie mènent des offensives de déstabilisation et d’affaiblissement de nos démocraties par le biais d’usines à trolls, affirme-t-il. Sont diffusées massivement des informations mensongères, partielles et partiales. » Dans son essai, il définit aussi le trollage bien particulier de Donald Trump.
Le propre du philosophe, c’est de douter, de s’interroger. « On est à un an et demi de l’élection présidentielle ; s’il y a une vague de désinformation massive, d’attaques de trolls, que peut faire l’État français ? » S’il pense à des scénarios catastrophe, la réponse du président Emmanuel Macron lèvera-t-elle ses inquiétudes ?
Face à ses élèves du lycée Couffignal de Strasbourg, le prof de philo aborde le cyberharcèlement. « On se sent autorisé à discréditer l’autre parce que l’on est anonyme, remarque-t-il. J’ai eu un cas l’an dernier, dix garçons contre une jeune fille. Avec cette chose perverse que l’on repère toujours la proie facile, celle qui ne peut pas se défendre. »
Dans ses cours, il évoque également la dimension collective du trolling. La manière dont il change complètement le rapport à la politique. « Désormais, stratégiquement, tout se passe sur les réseaux, notamment sur TikTok, appuie Valentin Husson. Un vote, une voix, cela se joue en une vidéo de quinze secondes. Certains politiques comme Jordan Bardella l’ont bien compris. »
Le chef de l’État rencontrera et répondra aux questions des lecteurs du groupe Ebra, dont fait partie votre journal, vendredi 28 novembre à Mirecourt (Vosges) autour de la problématique de « la démocratie à l’épreuve des réseaux sociaux et des algorithmes ».