Un ouvrage où le froid règne et comme il ne neigera plus à Noël, c’est aussi un livre à mettre sous le sapin.
lire plus tard
Pour sauvegarder cet article, connectez-vous ou créez un compte franceinfo
Sans paiement. Sans abonnement.
Fermer la fenêtre d’activation des notifications France Info
créer votre compte
se connecter
Fermer la fenêtre de présentation

France Télévisions – Rédaction Culture
Publié le 29/11/2025 12:18
Temps de lecture : 4min

Photographie de Christophe Jacrot du livre « Winterland ». (CHRISTOPHE JACROT)
Si vous devenez nostalgique des paysages enneigés de votre enfance, des bagarres de boules de neige au premier jour de décembre et du silence qu’imposent ces panoramas soudain blanchis… Jetez-vous sur Winterland, récit en images de Christophe Jacrot qui voue une passion pour la neige en photographie. Winterland. The colors of snow, l’ouvrage est édité chez teNeues Verlang.
Parfois, chez un photographe, c’est dans les citations qu’il faut chercher la démarche. Christophe Jacrot cite Camus en exergue de son ouvrage. « Au milieu de l’hiver, j’apprenais enfin qu’il y avait en moi un été invincible. » Ses paysages capturés en Norvège, en Islande et en Russie racontent cette nature enfouie sous les flocons qui renaîtra une fois l’hiver disparu.
Dans les villes, de Paris à New York, d’Amsterdam à Bologne, Christophe Jacrot est un chasseur de tempêtes de neige. Dans son livre Winterland, il raconte : « Bologne sous 50 centimètres de neige, du jamais vu ! En entendant cette prévision météo, j’ai sauté dans le premier avion. Quand pareil phénomène se produit dans les villes, c’est rapidement le chaos. Je savais que je devais faire vite. »
Ainsi le paysage urbain figé dans le blanc devient chaos, mais vu par une fenêtre, vu d’un intérieur, il devient décor serein.

Photographie issue de l’ouvrage de Christophe Jacrot « Winterland » à Norilsk, en Russie. (CHRISTOPHE JACROT)
Le photographe nous confie que sa fascination date d’il y a longtemps : « Peut-être mon enfance… Sinon cette passion est à relier avec mon goût du mauvais temps. Hong Kong sous la pluie, New York et ses tempêtes de neige se sont imposés à moi. Deux puissances qui s’affrontent, la ville arrogante et la tempête toute en puissance. Puis, il y a eu l’Islande. »
Chaque image de Christophe Jacrot raconte une histoire. La peur et les éléments en furie, comme dans la cité minière de Norilsk, construite sous Staline par des détenus du goulag à 200 kilomètres au nord du cercle polaire arctique, le photographe écrit : « J’ai eu la chance d’être pris dans une tempête de neige comme seule la Sibérie en connaît. Il m’a parfois fallu marcher à quatre pattes pour ne pas tomber. » La photographie comme sport de combat.
Souvent dans les photographies de Jacrot, une silhouette isolée, solitaire, mène le regard vers la marche pénible dans la neige. On imagine le photographe combattant le vent et les bourrasques comme cet inconnu figé dans le paysage.

Photographie de Christophe Jacrot à Norilsk, en Russie, issue de son ouvrage « Winterland ». (CHRISTOPHE JACROT)
La neige, ce blanc monochrome, ne fait pas peur au photographe. La neige ne serait-elle pas le pire ennemi du photographe ? Réponse franche de Christophe Jarcot à franceinfo Culture : « Pour les très mauvais photographes peut-être. Mais honnêtement, elle n’a jamais gêné les gens comme Ragnar Axelsson (Islandais) ou Penti Sammallahi (Finlandais), deux géniaux photographes (en noir et blanc) ».
« Par contre », souligne-t-il, « la neige en photographie couleur, n’est jamais blanche. Elle se teint de la lumière ambiante. Je suis face à un problème d’interprétation. Comment je vois ou je veux raconter cette neige. Je dirais presque la peindre ». Le sous-titre du livre est explicite : The colors of Snow.
Toutes les beautés du monde semblent destinées à disparaître avec le dérèglement climatique. Il en est de même pour les glaciers qui reculent et les neiges éternelles qui n’ont d’éternité que leur passé.
Winterland n’est pas un slogan, mais un poème, même si Christophe Jacrot accepte le terme d’avertissement. « Avertissement, oui bien sûr, mais je n’ai pas cette prétention-là, je me sens peut-être plus proche d’un archéologue… », nous avoue-t-il. « Et sans neige (et/ou pluie), on ne peut pas vivre. Et je vois bien au cours des années à quel point les hivers se réduisent un peu partout !! »

Photographe de Christophe Jacrot de l’ouvrage « Winterland », à Helleren, en Norvège. (CHRISTOPHE JACROT)
Il déclarait au magazine L’Œil de la photographie : « À mes yeux, il y a deux grandes façons de photographier le monde, saisir son horreur (il y a de quoi faire) ou le sublimer. J’ai choisi la seconde. »
Espérons que son ouvrage Winterland ne soit pas un document d’archives dans quelques années, mais bien sa vision romanesque du mauvais temps et des belles et inquiétantes bourrasques de neige.
« Winterland. The colors of snow », éditions TeNeus Verlag, 205 pages, 110 photographies, 65 euros.

Couverture de « Winterland » de Christophe Jacrot. (CHRISTOPHE JACROT)