Nantes-Atlantique sept ans après l’abandon de Notre-Dame-des-Landes, la facture s’alourdit. Entre contentieux financiers et infrastructures saturées, le dossier empoisonne toujours les relations entre l’État et les collectivités.
Presque huit ans après que l’État a renoncé à construire un nouvel aéroport à Notre-Dame-des-Landes, la note pourrait bien être salée. Dans un rapport publié vendredi, la Cour des comptes détaille les conséquences de cet abandon décidé en janvier 2018, au terme d’années de lutte acharnée entre les défenseurs de la ZAD et les partisans du projet.
Une ardoise entre 1,4 et 1,6 milliard d’euros
Le chiffre donne le vertige. Vinci, dont la filiale exploite actuellement l’aéroport via une concession signée en 2010, réclame entre 1,4 et 1,6 milliard d’euros d’indemnités à l’État. En cause : la résiliation du contrat initial, qui prévoyait justement la construction et l’exploitation de la nouvelle plateforme. Un modèle économique taillé sur mesure, où les revenus de l’ancien aéroport devaient financer les travaux du nouveau. Avec l’abandon du projet, tout s’effondre.
Le Hall d’embarquement de Nantes-Atlantique © Alain Moreau.
L’État a bien décidé de résilier cette concession, mais en a repoussé la date effective… à la signature d’un nouveau contrat. Problème : le premier appel d’offres, lancé en 2023, s’est soldé par un échec. Résultat, le contrat obsolète de 2010 reste en vigueur jusqu’à fin 2026 au plus tôt, alimentant un climat de contentieux permanent entre concédant et concessionnaire.
Un aéroport à bout de souffle
Sur le terrain, la situation n’est guère plus reluisante. Avec 7 millions de passagers en 2024, Nantes-Atlantique atteint ses limites. Les terminaux, inadaptés à ce volume de trafic, saturent aux heures de pointe. Quant au parking, son insuffisance chronique pousse les usagers à se garer n’importe où dans les communes alentour, au grand dam des riverains.
Côté nuisances sonores, le couvre-feu instauré fin 2019 a certes permis de réduire les vols nocturnes, mais son application reste imparfaite, soulignent les magistrats. Plus largement, les mesures compensatoires promises par l’État manquent de lisibilité, dispersées entre différents documents stratégiques.
La ZAD apaisée, mais sous surveillance
Autre héritage du feuilleton de Notre-Dame-des-Landes : que faire des 1 425 hectares initialement réservés au projet ? L’État a rétrocédé l’essentiel des terrains au département de Loire-Atlantique, qui a mis en place un projet agricole et environnemental ambitieux. Des baux ruraux avec clauses vertes ont été signés avec les occupants, permettant de normaliser la plupart des situations irrégulières qui avaient fleuri pendant les années de conflit.
Un bâtiment appartenant à l’État, situé sur le site de la Freusière à Notre-Dame-des-Landes, a été démoli entre le mardi 26 novembre et le jeudi 28 novembre 2024, opération préparée depuis la fin de l’été 2024. ©Préfecture de Loire-Atlantique.
Mais la Cour pointe des failles : le contrôle du respect de ces clauses environnementales laisse à désirer, et certains conflits d’usage persistent sur la zone. La pacification, réelle, reste fragile.
Face à ce constat, la juridiction financière formule trois recommandations principales : évaluer sérieusement l’efficacité du couvre-feu, publier chaque année un bilan transparent sur la réduction des nuisances sonores, et mieux encadrer l’utilisation des terres de l’ancienne ZAD. De quoi alimenter encore longtemps les débats dans l’agglomération nantaise.
Visuel de Une : © Alain Moreau.