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Le secrétaire américain à la Défense, Pete Hegseth, s’adresse à des officiers supérieurs à la base du Corps des Marines de Quantico, en Virginie, le 30 septembre 2025.
Des faits qui apportent une nouvelle dimension à la campagne américaine contre les trafiquants de drogue présumés. Le Washington Post a révélé le 28 novembre que le ministre américain de la Défense, Pete Hegseth, aurait donné l’ordre à des responsables militaires de « tous les tuer » lors d’une frappe de l’administration Trump dans les Caraïbes visant un bateau soupçonné de trafic de drogue.
Au cours d’une opération le 2 septembre, une première frappe américaine de missile a détruit le bateau soupçonné et laissé deux survivants s’accrochant à une épave, a rapporté le Washington Post. Le chef du Commandement des opérations spéciales aurait ensuite ordonné une seconde frappe pour tuer les deux survivants afin de se conformer aux ordres de Pete Hegseth, selon deux personnes ayant une connaissance directe de l’opération.
Même si les États-Unis étaient en guerre contre les narcotrafiquants, un ordre de tuer tous les membres d’équipages, s’ils n’étaient plus en mesure de se battre, « constituerait un crime de guerre », a analysé auprès du journal Todd Huntley, ex-avocat militaire et désormais directeur du programme de droit de la sécurité nationale à la faculté de droit de Georgetown.
Renforcement du contrôle sur le Pentagone
Pete Hegseth a, de con côté, qualifié cette information de la presse de « fake news » vendredi soir, dans un message sur X. Ajoutant que la série de frappes contre des personnes se trouvant à bord du bateau était « légale au regard du droit américain et international ». Dans un rapport remis à la Maison-Blanche, le Commandement des opérations spéciales interarmées (JSOC) justifie aussi la seconde frappe dans le but de « couler le bateau et d’éliminer un danger pour la navigation ».
Mais plusieurs autres experts du droit de la guerre interrogés par le prestigieux journal insistent sur le fait qu’il n’y avait pas de menace imminente d’attaque contre les États-Unis et que rien ne justifiait cet ordre létal.
Et les observateurs ne sont pas les seuls à s’inquiéter, même chez les républicains, les révélations sont scrutées de très près. Les commissions républicaines du Sénat et de la Chambre des représentants ont ainsi annoncé qu’elles allaient renforcer leur contrôle sur le Pentagone après la publication de l’article du Washington Post.
Le Washington Post souligne qu’il s’agit d’une « évolution majeure » : les majorités républicaines au Congrès ont, depuis le début du second mandat de Donald Trump, fait preuve d’une grande déférence envers son administration.
Plus de 20 navires ciblés et plus de 80 morts
Samedi, les dirigeants de la commission des forces armées de la Chambre des représentants, le représentant Mike D. Rogers (républicain de l’Alabama) et le représentant Adam Smith (démocrate de Washington) ont déclaré qu’ils « prenaient des mesures bipartites pour obtenir un compte rendu complet de l’opération en question ». Ils ont également souligné que la commission « s’engageait à exercer un contrôle rigoureux sur les opérations militaires du ministère de la Défense dans les Caraïbes ».
Ces révélations surviennent alors que, depuis septembre, les forces américaines ont ciblé plus de 20 navires soupçonnés de narcotrafic dans la mer des Caraïbes et dans le Pacifique Est, faisant au moins 83 morts.
Le président Donald Trump, qui dit lutter contre les cartels de la drogue du Mexique et d’Amérique centrale, intensifie dans le même temps la pression sur le Venezuela du président Nicolás Maduro. Il accuse Caracas d’être derrière le trafic de produits stupéfiants qui inondent le marché des États-Unis. Le républicain a même menacé jeudi de réaliser des frappes aériennes sur le sol vénézuélien.