Des centaines de personnes rassemblées dans un amphi. À écouter de grands penseurs et auteurs. À débattre des enjeux du monde contemporain. À défier les idées simplistes. Telle était l’idée follement ambitieuse de Marie-Paule Daru, lorsqu’elle fonda le Collège méditerranéen des libertés (CML). C’était il y a trente ans à Toulon, aux côtés d’un petit groupe de citoyens engagés.
Celle qui fut enseignante de lettres à Six-Fours est décédée d’un cancer foudroyant pendant l’été à Toulon, le 30 août 2025. Elle avait 81 ans, les obsèques se sont déroulées dans l’intimité familiale.
En 1995, au lendemain de l’élection du Front national à la mairie de Toulon, Marie-Paule Daru avait fondé le CML. « Notre choix a été de créer un espace public, en dehors de la politique, pour entendre ceux qui ont quelque chose à dire sur la société », situe Guy Daru, son mari. Il garde le souvenir vif de ces amphis combles, à la fac de Droit à Toulon, « 500 personnes à chaque conférence », alors que le Collège méditerranéen des libertés faisait ses premiers pas.
Créer le dialogue
Marie-Paule Daru a mis en dialogue le public toulonnais avec de grandes figures intellectuelles comme Robert Badinter, entré au Panthéon cet automne, qui fut des premiers orateurs du CML. Parmi les fidèles, le neuropsychiatre Boris Cyrulnik, père de la résilience.
Alors qu’il avait été fondé en réaction à l’arrivée du Front national à Toulon en 1995, le CML a poursuivi une feuille de route humaniste, en écho aux enjeux contemporains. Annette Wieviorka (historienne), Axel Khan (généticien), Maria Nowak (pionnière du micro-crédit), Cédric Villani (mathématicien et médaille Fields), Antoine Sfeir (politologue du Moyen-Orient), Jacques Testard (père de la fécondation in vitro)… De grands noms venus année après année, par amitié et engagement.
Femme consciente des injustices et des assignations, « je suis d’une génération où les filles n’avaient pas leur mot à dire », disait-elle, elle fut d’abord, avec son mari, une enseignante globe-trotteuse, de la Tunisie à la Colombie. Elle avait confié dans les colonnes de Var-matin sa fascination pour le contact humain et la simplicité des gens dans cette société métissée. « Rien ne les inhibe. J’ai puisé chez eux une énergie qui me portera toute ma vie. »
Avec le décès de Marie-Paule Daru, le Collège méditerranéen des libertés vient d’acter sa dissolution, après trente ans de vie intellectuelle varoise.