ENQUÊTE – D’Oran à Marseille, l’ombre de Mohamed Djeha a longtemps hanté les autorités françaises. Le narcotrafiquant algérien incarne la première pièce de l’opération «Trident», un fiasco policier mêlant cocaïne colombienne, indics sulfureux et enquêteurs orgueilleux.
«Cela peut vous paraître étrange, mais par prétention, je voulais vraiment interpeller Mohamed Djeha et venir à bout de ce clan pour montrer aux autres que nous pouvions le faire.» En cet après-midi de mars 2025, le major D. craque. Voilà plusieurs heures qu’il est cuisiné par les «bœuf-carottes» de l’Inspection générale de la police nationale (IGPN). Convaincus qu’il ne leur avait pas tout dit, les enquêteurs ont finement obtenu les premiers aveux de ce «flic à l’ancienne» de l’Office anti-stupéfiants de Marseille (Ofast).
«Je voulais faire une belle affaire. Mimo était intouchable. Il a ses entrées chez nous puisqu’il arrivait à savoir quand son clan allait être interpellé», avoue le major, actuellement incarcéré et mis en examen pour son implication présumée dans le fiasco de l’opération «Trident». Une affaire qui ébranle la police judiciaire marseillaise, désormais mise en cause dans la disparition d’une cargaison de 387 kilos de cocaïne. «J’ai peut-être mal fait les choses, mais je ne suis pas un voleur. Moi, j’interpelle les gens, pas le reste», a-t-il assuré avant sa mise en examen au tribunal judiciaire de Paris.
Début 2023, le major D. et les agents du «groupe 8» de l’Ofast Marseille se sont lancés dans la «livraison surveillée» (ou «LS» dans le jargon policier) d’un conteneur maritime bourré de poudre blanche colombienne destiné à la cité phocéenne. Officiellement, un «renseignement» était parvenu à leurs oreilles et celles de la justice marseillaise via l’agence antidrogue américaine. L’objectif de cette «LS» : capturer Mohamed Djeha, alias «Mimo» en l’appâtant avec cette cargaison de cocaïne exportée par un narcotrafiquant colombien. Mais l’Algérien n’a jamais mordu à l’hameçon et la poudre s’est évaporée. Dénoncés en interne, les policiers sont accusés d’avoir fabriqué de toutes pièces l’opération en important et en maniant de la drogue hors de tout cadre judiciaire. Ce scandale éclabousse une partie de la hiérarchie de l’Ofast, dans un contexte où l’emprise grandissante du narcotrafic et sa force corruptive menacent l’intégrité des institutions publiques françaises.
Loin de la médiatique DZ Mafia, Mohamed Djeha a toujours constitué une «cible prioritaire» de l’Ofast. Né en 1981 à Béjaïa (Algérie) et considéré comme issu du «haut du spectre» de la criminalité organisée française, ce fantôme inondait les quartiers nord de Marseille en stupéfiants depuis le Maghreb via son réseau implanté dans la cité de La Castellane, une forteresse située près de son quartier d’enfance où il régnait sans partage. Le chef de clan s’appuyait sur…
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