Une odeur fongique, une température un poil frisquette et une bonne dose d’humidité. Au sous-sol de ce HLM d’une petite centaine de logements, à Saint-Herblain en lisière de Nantes, Marie-Hélène Nédelec opère soigneusement un trafic… de champignons.
Sous une faible lumière artificielle, Mouhadji cueille avec soin plusieurs bouquets de pleurotes. Cette variété de champignons pousse au sous-sol sur des pains de substrat empilés sur de grandes étagères en métal. « Je m’occupe des champignons tous les matins du lundi au jeudi », indique le salarié de l’association Environnements Solidaires qui s’est approprié les lieux en mai 2024.
Eviter les squats
Dans ce quartier de l’agglomération nantaise, « les habitants de l’immeuble se plaignaient de l’état insalubre de la cave », rappelle Marie-Hélène Nédelec, présidente de l’association qui évoque des squats et des dépôts sauvages, « les locataires n’y descendaient jamais à cause de l’encombrement, d’autres se plaignaient de la présence de squatteurs jusque dans le hall d’immeuble ». Une discussion s’est alors ouverte avec Atlantique Habitations, bailleur social des locaux afin de donner une seconde vie à cet espace dans une période de réhabilitation du quartier. « Nous voulions en faire quelque chose de positif », évoque la directrice dont la structure associative met au cœur de ses projets l’environnement, l’insertion professionnelle et l’alimentaire.
Depuis, pleurotes et shiitakés poussent à l’abri de la lumière entre 15 et 18 degrés grand maximum. Chaque jour, Mouhadji exerce le même rituel. « D’abord je me lave les mains, puis je change le filtre de l’aération afin de produire le bon taux d’humidité pour la pousse des champignons. » Viennent ensuite la cueillette, la pesée puis la préparation des commandes « et les champignons terminent dans cette chambre froide », explique l’employé qui pointe du doigt une allée de cagettes enfermées dans la pénombre et couvertes par des draps.
« Lien social »
En fin de circuit, les champignons sont revendus à des structures associatives, des restaurants sociaux ou en vente directe après commande. Carlos, « voisin du deuxième » passe une tête dans les locaux de l’association située au rez-de-chaussée. Régulièrement, il y récupère une cagette de pleurotes « à faire revenir avec du poisson » et en profite pour « prendre un café et papoter ». « L’ambition de la champignonnière c’est aussi de créer du lien social dans le quartier », sourit Marie-Hélene Nedelec.
L’année dernière, la champignonnière a produit une tonne de champignons, quatre fois plus que l’objectif prévu d’ici fin 2025. Le concept lui, avait déjà séduit une start-up qui cultive des champignons dans la cave d’un Monoprix d’Ile-de-France. A Nantes, cette même start-up avait lancé la culture de pleurotes et shiitakés dans une chapelle.