En hiver, les clémentines trônent sur nos
tables, mais en France plus de 8 sur 10 porteraient des résidus de
pesticides. Quels fruits et légumes sont les plus exposés et
comment adapter ses achats ?

En plein hiver, les cagettes de clémentines
s’empilent sur les étals, symbole d’une pause vitamine C censée
être saine pour toute la famille. Derrière cette image rassurante,
les contrôles menés en France racontent pourtant une autre
histoire, beaucoup moins orangée, sur ce qui se cache à la surface
des fruits et légumes… et parfois en
profondeur.

Entre les données de l’association Générations Futures et celles
de l’UFC-Que Choisir, un constat se dessine : une large partie de
notre panier contient des résidus de pesticides.
Sur la période 2017-2021, 73 % des échantillons de fruits non bio
et 45 % des légumes non bio analysés en France sont concernés,
selon Générations Futures. Et les clémentines font partie des plus
touchées, au point de devenir le symbole de cette
contamination.

Pesticides et clémentines : ce que montrent les contrôles
en France

Pour y voir clair, Générations Futures a compilé les résultats
des plans officiels de surveillance réalisés par les autorités
françaises entre 2017 et 2021, en se concentrant uniquement sur
l’agriculture conventionnelle. « Sans surprise, les taux de
pesticides sont donc plus élevés », explique François Veillerette,
porte-parole de Générations Futures, cité par Marie France. Il en
ressort que 73 % des fruits et 45 % des légumes non bio consommés
en France contiennent au moins un résidu de pesticide.

Dans ce panorama, les clémentines apparaissent en haut du
tableau. L’état des lieux publié par l’association indique que les
cerises arrivent en tête avec 93,8 % d’échantillons contaminés,
suivies du pamplemousse (91,1 %) et des nectarines/pêches (90,2 %).
Les raisins présentent 88,3 % d’échantillons contenant des résidus,
et les clémentines comme les oranges atteignent
87,2 %. Un autre jeu de données, celui de l’Observatoire des
pesticides de l’UFC-Que Choisir pour 2020-2021, donne des chiffres
du même ordre : 89 % des clémentines et mandarines
contiennent au moins un pesticide, dont 82 % avec des substances
classées parmi « les plus à risque ». Déjà, sur la période 2012-2016,
Générations Futures relevait 88,4 % de mandarines et clémentines
contaminées dans les contrôles officiels cités par Le Figaro.

La liste des fruits et légumes les plus contaminés par
les pesticides

Au-delà des clémentines, le rapport 2017-2021 de Générations
Futures montre que de nombreux fruits d’usage courant
sont régulièrement porteurs de résidus. Les cerises (93,8 %), les
pamplemousses (91,1 %), les nectarines et pêches (90,2 %), les
raisins (88,3 %), les clémentines et oranges (87,2 %), mais aussi
les bananes (81,9 %), les abricots (80,5 %) et les fraises (78,7 %)
dépassent tous les trois quarts d’échantillons contaminés. Certains
dépassent même les limites maximales de résidus (LMR) fixées par la
réglementation : le fruit de la passion arrive en tête avec 37,2 %
d’échantillons au-dessus des seuils autorisés, devant l’ananas
(22,6 %), la grenade (18,8 %) et la figue (7,2 %). Du côté des
légumes, l’étude pointe le céleri rave (78,3 % d’échantillons
contaminés), les melons (69 %), les endives (67,7 %), les herbes
fraîches (67,3 %), mais aussi les panais (61,1 %), les pommes de
terre (60,7 %), les carottes (59,8 %) et des haricots verts,
salades et poivrons au-delà de 50 %.

Les chiffres de l’UFC-Que Choisir, qui distinguent tous
les pesticides de ceux « les plus à risque »
(cancérogènes, mutagènes, reprotoxiques ou perturbateurs
endocriniens), apportent une nuance utile. Les clémentines et
mandarines affichent 89 % d’échantillons contenant au moins un
pesticide, dont 82 % avec des molécules problématiques. Les oranges
montent à 92 % (87 % pour les pesticides les plus à risque) et les
pamplemousses à 91 % (89 %). Les poires (85 % dont 64 % de
pesticides à risque) et les pommes (75 % dont 54 % de pesticides à
risque) restent très surveillées, tandis que le kiwi fait figure de
bon élève avec 20 % d’échantillons contaminés et aucun pesticide
classé parmi les plus dangereux. Côté légumes d’hiver, le céleri
branche (100 % d’échantillons contaminés, 97 % avec pesticides à
risque), le chou de Bruxelles (95 % et 92 %), l’endive (85 % et 72
%), la carotte (70 % et 59 %) et la pomme de terre (64 % et 56 %)
ressortent comme particulièrement exposés, alors que la patate
douce présente 38 % d’échantillons contaminés mais seulement 6 %
avec des pesticides jugés les plus préoccupants.

Pour hiérarchiser ses achats en bio quand le budget est limité,
ces chiffres permettent d’identifier des produits à surveiller en
priorité, parmi lesquels :

  • Les agrumes : clémentines, mandarines, oranges,
    pamplemousses
  • Les cerises, raisins, nectarines et pêches
  • Les fraises et autres fruits très traités comme les pommes et
    poires
  • Le céleri (branche et rave), les endives, choux de Bruxelles et
    herbes fraîches
  • Les salades, épinards, carottes et pommes de terre

Laver, éplucher, bio : comment
réduire les résidus sur les clémentines et autres
produits

Pour François Veillerette, le sujet reste d’actualité : « Les
résidus de pesticides dans les végétaux, ce n’est pas un problème
qui est derrière nous. Or les consommateurs en sont soucieux,
toutes les enquêtes le montrent. Cela vaut le coup d’avoir une
politique qui incite le système agricole à évoluer ! »,
souligne-t-il. Sur son site, l’association Générations Futures
rappelle que les pesticides « présentent un risque toxique pour
certains organismes qu’ils ne ciblent pas. Les effets, même
de faibles quantités de ces toxiques
, en mélange et/ou sur
de longues périodes peuvent poser de graves problèmes sanitaires:
troubles neurologiques ou du comportement, du développement,
certains cancers, troubles de la fertilité ou de la
reproduction… », indique l’association, citée par Le Figaro.
Générations Futures appelle d’ailleurs à « réduire fortement l’usage
des pesticides » dans l’agriculture conventionnelle.

Au niveau des gestes du quotidien, plusieurs pistes ressortent
des différentes sources. L’Organisation mondiale de la santé
recommande aux consommateurs de « limiter leur ingestion de résidus
de pesticides en pelant ou en lavant les fruits et les
légumes
« . Cette stratégie n’a toutefois pas la même
efficacité selon les produits. Pour certains, comme les pommes, une
partie des substances pénètre la chair. Pour d’autres, à peau
épaisse, l’épluchage change beaucoup la donne : « Le raisin, vous
n’allez pas l’éplucher avant de le manger, par contre la clémentine
oui, la banane aussi ». L’UFC-Que Choisir indique que le lavage à
l’eau aide surtout pour les légumes-feuilles, et encore davantage
si on les blanchit ou les fait bouillir. La Javel est déconseillée
en raison des risques d’intoxication ; l’association préconise
plutôt un bain d’eau additionnée de vinaigre, de sel ou de
bicarbonate de soude, efficaces en surface.