Frédéric Pechier arrive au tribunal à Besançon pour l’ouverture de son procès, devant la cour d’assises, le 8 septembre 2025.

ANTOINE MERMET / Hans Lucas via AFP

Frédéric Pechier arrive au tribunal à Besançon pour l’ouverture de son procès, devant la cour d’assises, le 8 septembre 2025.

« Je l’ai vu se battre et je l’ai vu perdre espoir. » En entendant les mots de sa fille, Frédéric Péchier a pleuré ce lundi 1er décembre, pour la première depuis le début du procès le 8 septembre. Persuadée de son innocence, c’est tout la famille de l’anesthésiste de Besançon, accusé de 30 empoisonnements dont 12 mortels, qui a fait bloc derrière lui.

« Je sens au fond de mon cœur que mon fils est innocent », a martelé devant la cour d’assises du Doubs la mère de l’accusé, Marie-José Péchier. « Il a eu une enfance heureuse et je ne comprends pas pourquoi il se serait transformé en serial killer du jour au lendemain ».

Les parents de Frédéric Péchier, son ex-femme et l’une de ses filles se sont succédé à la barre pour dessiner le portrait d’un homme « altruiste, généreux », d’un père aimant, d’un mari « attentionné » et d’un médecin anesthésiste-réanimateur qui « aimait son métier ».

« On lui a hurlé dessus : “dis-nous la vérité !” »

« Je ne changerai jamais de nom de famille », a de son côté dit Juliette, la fille aînée de Frédéric Péchier, âgée de 25 ans et de 16 ans au moment des faits, rapporte L’Est Républicain. « Cela fait huit ans que je le vois tourner les pages de la procédure à la recherche d’une explication », a poursuivi la jeune femme, selon la radio Ici. Elle a aussi dit toute sa colère contre les journalistes qui venaient en masse devant sa maison pour obtenir des informations. À l’écoute de sa fille, Frédéric Péchier a fondu en larmes.

Son frère cadet, Marc Péchier, a spontanément raconté comment sa sœur, son autre frère et lui-même avaient « convoqué » Frédéric Péchier dimanche, se disant « chamboulé » par les empoisonnements démontrés au cours des deux mois et demi de procès.

« On lui a hurlé dessus : “dis-nous la vérité !” », a-t-il raconté. « Mon frère s’est effondré. Il a pleuré, beaucoup. Il a parlé aussi : de son enfance, de ses erreurs pendant l’instruction, de sa vie d’avant », mais il a maintenu être innocent. « Devant moi, j’ai vu un homme, et j’ai vu son âme. Il ne mentait pas », a-t-il dit, convaincu de l’innocence de son frère.

Le commandant de police Laurent Dumont avait évoqué de son côté les « failles personnelles » de Frédéric Péchier, dominé par son père puis par sa femme, évocatrices selon lui d’un « tueur en série ».

« Un homme détruit »

Le père de l’accusé, Jean-Michel Péchier, 78 ans, s’est lui dit « fier » de son fils, devenu anesthésiste comme lui, assurant n’avoir « jamais eu de contentieux » avec lui.

Frédéric Péchier a vécu chez ses parents jusqu’à ses 24 ans, avant de partir à Besançon pour ses études. Revenu vivre chez eux à Poitiers après sa mise en cause judiciaire, en 2017, il a perdu son emploi, son statut social et divorcé de son épouse. C’est chez ses parents que, fortement alcoolisé, il s’est défenestré en 2021.

« Frédéric est un homme détruit. Il n’a pour lui que sa famille et l’amour inconditionnel de ses propres enfants », a déclaré sa mère.

Selon le directeur d’enquête Olivier Verguet, « la seule personne qui aurait les clés pour le déverrouiller, c’est Mme Péchier ». Il a estimé que son ex-femme avait une « emprise sur son époux ».

Son ex-épouse a raconté un « couple très fusionnel »

« Je n’étais pas une épouse soumise et Frédéric n’était pas un mari soumis, nous étions juste un couple qui travaillait, avec de jeunes enfants », a rétorqué lundi devant la cour Nathalie Péchier. Elle avait demandé à son mari de moins travailler pour être davantage présent dans la vie de famille.

L’avocate générale Christine de Curraize s’est interrogée sur ce mari « écartelé » : « comment pouvait-il s’en sortir ? Il fallait qu’il soit plus à la maison et en même temps qu’il soit le meilleur au travail ».

Son ex-épouse a raconté un « couple très fusionnel » qui s’est « beaucoup aimé », et a dépeint une vie de famille aisée, idyllique, malgré une tentative de suicide du père de famille en 2014, le suivi psychologique de son mari dépressif et l’ombre du divorce qui a plané plusieurs années. Les époux ont finalement divorcé en 2021, tout en restant proches. « Si j’avais le moindre doute quant à la culpabilité de Frédéric, je ne serais pas là pour le défendre. Si j’avais le moindre doute, il n’approcherait pas mes enfants », a affirmé cette brillante cardiologue.

Les proches de l’accusé entendus lundi ont tous fait part de leur « besoin de vérité » et dénoncé « une enquête à charge contre lui depuis le départ, sans aucune preuve ».

Des témoins ont dit à la barre leur plaisir à travailler avec le docteur Péchier, un médecin avec de « l’empathie », « sympa » et « très professionnel ».

Jugé pour 30 empoisonnements commis entre 2008 et 2017 à Besançon, Frédéric Péchier encourt la réclusion criminelle à perpétuité. Le verdict est attendu d’ici au 19 décembre.