Émile Siegler, round 2. La veille, lundi 1er décembre, l’homme de 37 ans était jugé en comparution immédiate pour son évasion du planétarium des Champs Libres. L’affaire a finalement été renvoyée à fin janvier. Mais dès le lendemain, ce mardi 2 décembre au matin, celui qui est surnommé Gino a de nouveau rendez-vous avec un juge pour un autre dossier : les 15 incendies volontaires des magasins Poêles et cie, en Ille-et-Vilaine et en Loire-Atlantique.

Une affaire tentaculaire, impliquant une quinzaine de personnes. Des petites mains, pour la plupart d’entre elles condamnées le 4 novembre après avoir reconnu leur culpabilité. Le principal commanditaire sera quant à lui jugé plus tard aux assises. Ce mardi matin, Gino comparaît donc seul. Les faits qui lui sont reprochés : avoir joué le rôle d’intermédiaire entre le commanditaire et les hommes de main. Le teint pâle, les traits tirés et les yeux fatigués, il retrouve vite de l’énergie au moment de plaider son innocence. Qu’il clame tout au long cette audience, en habitué des tribunaux.

26 mentions au casier judiciaire, 15 ans de prison

Né le 23 juin 1988 à Nantes, Emile Siegler a déjà passé près de 15 ans derrière les barreaux. La première fois en 2003. Il avait 15 ans et répondait de faits de vol devant un tribunal pour enfant. Depuis, 26 autres mentions sont venues émailler son parcours judiciaire. Les vols, le fil rouge du parcours de Gino, qui a aussi été condamné pour des faits de recel, de menaces de mort, d’association de malfaiteurs, d’extorsion et de refus d’obtempérer. Et puis il y a les évasions, en 2009, 2015 et 2024, jusqu’à celle du 13 novembre 2025.

« Un gars m’a mis dix coups de couteau »

Une cavale de 13 jours qui, dit-il, fait suite à l’agression dont il aurait été victime en mai 2025, en détention au sein de la prison de Rennes-Vezin. « J’étais en promenade, un gars est venu derrière moi et m’a mis dix coups de couteau au cou, au cœur, au ventre et aux jambes. J’ai demandé mon transfert mais personne ne m’a écouté. C’est pour ça que je me suis évadé. »

Issu de la communauté des gens du voyage de Nantes, Emile Siegler, en couple depuis 20 ans et père de deux enfants, a arrêté l’école en 3e. « J’ai été auto-entrepreneur, dans le rachat et la vente de métaux, mais j’ai été incarcéré et ça s’est arrêté. J’ai suivi une formation en prison dans le bâtiment et j’ai ensuite monté mon entreprise de maçonnerie. Aujourd’hui, je n’ai plus d’avenir, je ne vois que la prison. J’ai tout fait pour montrer que j’ai changé. En trois ans de détention, je n’ai eu aucun rapport d’incident. J’ai vu des psychologues, mais le passé me rattrape toujours. »

« Encore du temps à faire en détention »

Incarcéré depuis novembre 2022, il devait être libéré en 2028. Avec cette nouvelle évasion, il sait qu’il a « encore du temps à faire en détention. Je sais qu’il n’y aura pas d’aménagement et que je vais prendre une peine assez conséquente ».

Mais, il l’affirme : « Pour une fois dans ma vie, je suis innocent. Je n’ai rien à voir, de près ou de loin » avec les incendies des magasins Poêles et compagnie. La présidente du tribunal lui parle des textos échangés avec le commanditaire. « Des messages codés », estime la présidente. « Faux, répond-il. Je connais la prison sur le bout des doigts et si j’avais voulu participer à ça, je n’aurais pas procédé par textos. Je n’avais aucun intérêt à le faire ». Son lien avec le commanditaire ? « Je l’ai juste aidé à obtenir un portable, des sacs de linge et des baskets. C’est tout ».

30 mois ferme

Dans ce « dossier hors normes », selon les mots de la substitute du procureur, « Monsieur Siegler n’est pas le commanditaire, mais il est bien l’intermédiaire ». « Ça ne doit pas dédouaner monsieur Siegler de sa responsabilité dans ce dossier » car « il a fait partie des personnes d’accord pour aider à la vengeance contre Poêles et cie ». Un intermédiaire « qui a réussi à fournir un téléphone portable au commanditaire. Ce n’est pas n’importe quel détenu qui peut faire cela ». Elle demande 24 mois d’emprisonnement contre Emile Siegler.

Son avocat, lui, plaide la relaxe et insiste sur « la conduite exemplaire de son client en détention » jusqu’à son évasion. Le tribunal va au-delà des réquisitions du parquet. Emile Siegler est condamné à 30 mois de prison ferme. Furieux, il quitte le box avec fracas. Mais sera de retour au tribunal correctionnel de Rennes le 22 janvier, pour répondre de son évasion.