L’Arcep s’attaque une nouvelle fois à l’un des fléaux du moment : l’usurpation de numéros de téléphone. Depuis des années, des fraudeurs parviennent à se faire passer pour d’autres en affichant des numéros légitimes, souvent des numéros mobiles français, afin d’augmenter les chances que les victimes décrochent. Malgré la mise en place, en 2023, du mécanisme d’authentification des numéros d’appelant, les signalements continuent de grimper.
Et les chiffres ne laissent plus de place au doute : l’Autorité a enregistré près de 18 000 signalements d’usurpation d’identité depuis janvier 2025 via sa plateforme “J’alerte l’Arcep”. Une explosion qui confirme à quel point les fraudeurs contournent encore les dispositifs techniques en place.
Pour tenter d’y mettre fin, l’Arcep adopte une série de mesures qui modifient officiellement le plan de numérotation national. Certaines entreront en vigueur dès le 1er janvier 2026, d’autres un peu plus tard selon les territoires. L’ambition est toujours de rendre les usurpations plus difficiles, tout en évitant les faux positifs qui peuvent couper des appels légitimes.
Le numéro masqué retrouve un rôle… protecteur
C’est probablement le changement le plus visible pour le grand public. Jusqu’ici, un numéro masqué signifiait essentiellement qu’un appelant avait choisi de cacher volontairement son numéro. Dès 2026, cette notion s’élargit.
Lorsque des appels provenant de l’étranger présentent un numéro mobile français qui n’a pas pu être authentifié, les opérateurs devront automatiquement le masquer. Ce choix vise à limiter les cas où des fraudeurs, souvent basés hors de l’Union européenne, usurpent des numéros français au hasard pour contourner les filtres.
L’Arcep part du constat que tant que tous les appels en itinérance ne sont pas authentifiés (ce qui devrait être le cas pour plus de 80 % d’entre eux fin 2025), les appels légitimes et frauduleux pourraient être confondus. Le masquage automatique devient donc un moyen de restaurer de la confiance dans les numéros effectivement affichés.
Sur le terrain, les abonnés à qui un numéro a été usurpé ne devraient plus passer des journées à répondre à des personnes mécontentes leur reprochant des appels qu’ils n’ont jamais émis. La mesure s’applique dans tout l’Hexagone dès début 2026, à l’exception de Saint-Martin où l’échéance est repoussée à 2028 pour des raisons d’infrastructures locales.
Quand la technique ne suit pas, l’Arcep veut éviter les coupures abusives
Un autre point moins visible, mais tout aussi important, concerne les équipements anciens ou limités techniquement. Certains systèmes de téléphonie, souvent utilisés pour des renvois d’appel ou des installations professionnelles vieillissantes, ne sont pas capables de relayer correctement les informations d’authentification.
Dans ces cas, l’Arcep recommande également le masquage automatique plutôt que l’interruption pure et simple de l’appel. Cette approche vise à protéger les appels légitimes tout en limitant les failles exploitables par les fraudeurs.
Les opérateurs devront néanmoins conserver la signature cryptographique d’origine de l’appel, documenter les raisons du masquage et informer l’Arcep des actions menées pour corriger ces limitations. Une manière de pousser l’écosystème à moderniser progressivement ses infrastructures.
Par ailleurs, le dispositif d’authentification repose sur une chaîne de confiance où chaque opérateur doit vérifier que le numéro d’appelant présenté par son client est bien autorisé. L’Arcep clarifie désormais cette obligation.
Les contrats devront explicitement lister les numéros qu’un client, en particulier un client professionnel, est autorisé à utiliser. Les opérateurs devront aussi limiter techniquement la présentation d’autres numéros. Une manière de freiner certaines pratiques abusives, notamment dans les centres d’appels encore peu régulés.
Une nouvelle catégorie de numéros réservée à l’intérêt général
La loi du 30 juin 2025 contre les fraudes aux aides publiques impose à l’Arcep de créer une catégorie de numéros consacrés aux appels automatisés d’intérêt général. Ces numéros seront attribués uniquement à des organisations figurant sur une liste ministérielle.
On parle ici des systèmes qui envoient des alertes automatiques ou des messages d’intérêt public, comme les alertes sanitaires ou certains dispositifs d’urgence. L’objectif est d’éviter que des fraudeurs s’approprient des numéros trop proches de ces services officiels pour tromper le public.
Les territoires ultramarins feront également l’objet d’ajustements, car avec l’augmentation des usages (IoT, terminaux pro, services en ligne), certains blocs de numéros arrivaient en saturation. L’Arcep annonce donc l’allocation de nouvelles tranches afin d’anticiper les besoins.
Le délai de réaffectation rallongé, une protection supplémentaire pour les utilisateurs !
Le dernier volet concerne la réaffectation des numéros. Lorsqu’un opérateur résilie un numéro de sa propre initiative, par exemple dans le cadre de la fermeture du réseau cuivre, il devra désormais attendre au moins 45 jours avant de réattribuer ce numéro à un autre abonné.
Ce délai vise à laisser aux utilisateurs le temps de récupérer leur numéro s’ils le souhaitent. Une demande formulée depuis longtemps sur “J’alerte l’Arcep”, où de nombreux cas d’abonnés désemparés avaient été remontés.
Avec ces décisions, l’Arcep signe l’une des plus importantes évolutions du plan national de numérotation depuis plusieurs années. Si le mécanisme d’authentification a déjà permis de réduire considérablement la fraude, les chiffres de 2025 montrent que les fraudeurs n’ont pas désarmé.
2026 sera donc une année test, avec comme objectif que décrocher un appel affichant un numéro français doit redevenir un geste plus serein !
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