
Une infirmière s’apprête à administrer une dose de vaccin contre l’hépatite B à Lynwood, Californie, le 27 août 2013 ( AFP / ROBYN BECK )
Des experts nommés par le ministre de la Santé vaccinosceptique de Donald Trump Robert Kennedy Jr. discutent jeudi de la vaccination contre l’hépatite B qu’ils envisagent de cesser de recommander à l’ensemble des nouveaux-nés, contre l’avis de nombreux médecins.
Ce groupe, dont les recommandations sont traditionnellement suivies par les autorités fédérales américaines, a modifié en septembre les recommandations vaccinales sur le Covid-19 et la rougeole.
Initialement prévue jeudi, sa décision sur le vaccin contre l’hépatite B a été reportée à vendredi en raison de la confusion et de la résistance de certains des experts quant aux implications du changement envisagé.
Désormais composé de personnalités critiquées souvent par le milieu scientifique pour leur manque d’expertise ou pour avoir relayé des théories vaccinosceptiques, le Comité consultatif sur les pratiques de vaccination (ACIP) réévalue la sûreté de plusieurs vaccins pour certains utilisés depuis des décennies.
L’initiative inquiète la communauté médicale américaine qui redoute que l’accès aux vaccins ne soit restreint pour des raisons idéologiques, alors même que les taux de vaccination reculent depuis la pandémie et font craindre le retour de maladies contagieuses mortelles comme la rougeole.
– « Irresponsable » –
Les Etats-Unis recommandent depuis 1991 la vaccination contre l’hépatite B pour tous les nouveaux-nés dans les premières heures de leur vie. Mais l’ACIP pourrait désormais la conseiller seulement aux enfants dont la mère est porteuse du virus, selon une proposition dévoilée jeudi.
Les autres enfants se verraient alors recommander la première dose – sur trois nécessaires – à partir de deux mois.
Pour certains membres du comité, l’initiative permettrait d’aligner la politique vaccinale américaine sur celle de pays développés comme la France ou le Royaume-Uni, mais elle est dénoncée comme injustifiée et même risquée par des institutions médicales américaines.
Celles-ci soulignent les failles dans les dispositifs de dépistage des mères aux Etats-Unis et avertissent que tout report conduirait à une baisse des taux de vaccination.
Tout changement serait « irresponsable, irrespectueux et très préjudiciable », a jugé le docteur Flor Munoz de la National Foundation for Infectious Diseases, tandis que d’autres experts extérieurs dénonçaient l’utilisation par le comité d’éléments « non scientifiques » sur le sujet.
L’hépatite B est une maladie virale du foie qui peut notamment être transmise par la mère lors de l’accouchement et qui expose les personnes touchées à un risque élevé de décès par cirrhose ou cancer du foie.
La vaccination des nouveaux-nés, soutenue par l’OMS, a permis de quasiment éradiquer les infections chez les jeunes aux Etats-Unis, selon les autorités américaines.
– « Plus confiance » –
Auparavant routinières, les réunions de l’ACIP ont pris une importance nouvelle depuis le retour au pouvoir de Donald Trump. Son ministre de la Santé, connu de longue date pour ses positions antivaccins, a engagé une profonde refonte de la politique vaccinale des Etats-Unis.
Robert Kennedy Jr. a limogé de nombreux experts réputés, annulé des financements pour le développement des vaccins et initié une large révision des recommandations.
L’ACIP examinera aussi vendredi le calendrier vaccinal des enfants et l’utilisation d’aluminium dans les vaccins, jugée toxique par les milieux antivax.
Ses recommandations dictent la prise en charge ou non des vaccins par certaines assurances et programmes de vaccinations, ce dans un pays où le prix d’un seul vaccin peut atteindre plusieurs centaines de dollars.
Néanmoins, leurs poids s’est affaibli. Des institutions scientifiques américaines et Etats dirigés par l’opposition démocrate ont annoncé dernièrement cesser de les suivre.
« Les États forment leurs propres comités consultatifs parce qu’ils ne font confiance à rien de ce qui se passe sous la houlette de Robert Kennedy Jr », explique le pédiatre infectiologue américain Paul Offit auprès de l’AFP.