« C’est une victoire, mais une victoire arrachée à l’ignominie », a déclaré Marie Dosé, l’avocate des trois hommes pour lesquels la France devra revoir sa copie.
Youssef Boudaia, Adem C. et Amza B., âgés de 22 et 23 ans, avaient 11 et 12 ans quand leurs parents les ont emmenés en Syrie, décidés à rejoindre l’organisation État islamique (EI). À la chute du « califat », il y a six ans, ils ont été enfermés dans des camps tenus par les forces kurdes, où ils ont atteint la majorité.
Leurs demandes de rapatriement avaient toutes été rejetées en 2024 par le ministère français des Affaires étrangères, qui avait invoqué « la situation sur place, particulièrement complexe et dangereuse » rendant « les opérations de rapatriement extrêmement difficiles à mener ».
Lors de l’audience fin novembre devant le tribunal administratif de Paris, leur avocate avait évoqué l’urgence de rapatrier ces jeunes « qui n’ont rien choisi » et qui sont enfermés depuis des années dans des camps tenus par les Kurdes.
Youssef Bouaida était apparu en 2014 dans une vidéo de propagande de l’État islamique. Celui qui était alors un jeune garçon avait une Kalachnikov en main et disait venir de Strasbourg. Il se vantait d’être un moudjahid et décrivait la France comme « un pays de kouffar » [mécréants, NDLR]. La vidéo avait semble-t-il été tournée à Raqqa.
La famille de Youssef Boudouaia avait quitté la Haute-Savoie, où elle résidait, pour rejoindre la Syrie en camping-car à l’été 2014 , où les deux aînés de la fratrie se trouvaient déjà. Auparavant, les Boudouaia vivaient à Strasbourg, dans le quartier de la Musau, jusqu’en 2012.
Sa famille a été décimée par les combats et les frappes américaines. Celui qui était alors considéré par plusieurs spécialistes comme le plus jeune combattant français de l’État islamique avait été donné pour mort dès mars 2015. Il était en réalité détenu.
Adem C. est lui grièvement blessé à la jambe et ne bénéficie actuellement d’aucun soin. Amza B. se trouve quant à lui en ce moment emprisonné en Irak. Marie Dosé craint sa mort dans ces geôles. Elle a rappelé qu’il était aveugle de l’œil gauche, blessé à l‘épaule et à la tête, et qu’il « tombe régulièrement dans les pommes ».
La France a aujourd’hui deux mois pour réexaminer la demande de rapatriement de ces trois jeunes adultes.
Le tribunal administratif ne s’est en revanche pas estimé compétent pour évaluer les demandes de rapatriement de deux autres prisonniers des camps syriens. « Il s’agit de garçons qui ont grandi en France mais qui ne sont pas Français », a regretté leur avocate.