Lady Nazca raconte l’histoire de l’archéologue allemande Maria Reiche (interprétée par Devrim Lingnau) qui a étudié les géoglyphes de Nazca (1), au Pérou, à partir des années 1930. Comment avez-vous été associé à ce film ?
« J’ai rencontré le réalisateur Damien Dorsaz et Matthieu Zeller, son producteur, en 2020. Le binôme voulait travailler avec moi. En 2021, je suis parti avec Damien en repérage. Le monde était encore en période covid, alors, avec mon visa professionnel, j’ai eu la “chance” de voir les sites du Pérou, comme le Machu Picchu, avec très peu de touristes. Nous avons ensuite tourné pendant 28 jours en juillet et août 2024. Et chaque jour, je ne savais pas comment je devais faire parce que, sur place, les galères étaient nombreuses. C’était un vrai défi. »
« On a tourné dix jours dans le désert »
Le soleil tient une place importante dans les séquences de ce film (ndlr : Maria Reiche avait développé une théorie selon laquelle les lignes de Nazca formaient une sorte de calendrier céleste à partir du solstice d’été). Quand on est directeur de la photo, comment on aborde ces plans ?
« Une partie de mon travail consiste à me poser la question : que peut-on dire avec une image qu’on peut ne pas dire avec des mots ? Là, le sujet du film, c’est la lumière dans la mesure où, sans le soleil, il n’y a pas de révélation pour Maria Reiche. Il fallait tourner avec le soleil à des heures très précises. On a eu, parfois, très peur parce qu’au Pérou il y a, quelquefois, la “neblina”, une sorte de brouillard qui ne nous permet pas de voir à cinq mètres. Avec le soleil, on tournait vraiment à la minute près. Par exemple, si on ne sortait pas à 17 h 27 pour telle séquence, c’était fichu parce que le soleil allait changer de couleur. Il fallait beaucoup travailler en préparation. »
Les investigations de Maria Reiche se passent dans le désert de Nazca. C’est compliqué d’obtenir des autorisations de tourner là-bas ?
« On a reconstitué ces lignes à côté du désert de Nazca. Seules les lignes que vous voyez à la fin, filmées depuis l’avion, sont authentiques. On n’avait pas le droit de piétiner les vraies lignes, évidemment. Sur un mois, on a tourné dix jours dans le désert (ndlr : les autres séquences ont été tournées essentiellement dans la région de Lima). »
Un terrain de jeu « paradisiaque »
Pour un chef opérateur, ces paysages désertiques, c’est un peu le paradis non ?
« C’est à la fois le paradis et l’enfer. C’est beau et en même temps, il faisait plus de 40 degrés. Cela a des incidences sur les corps, sur les journées, sur le matériel qu’on doit protéger. Mais globalement, ce que je retiens moi, c’est quand même le côté paradisiaque de la chose. Parce que faire un film comme ça, c’est évidemment avoir accès à des terrains de jeux auxquels, d’habitude, on n’aurait pas accès. »
Vous avez également tourné à Cahuachi (ndlr : un important centre cérémoniel de la civilisation nazca). Quels souvenirs gardez-vous de ce site ?
« Là, c’est le vrai site. Et on a failli ne jamais faire ces plans. Il a fallu discuter avec la police péruvienne. Nous avons pu tourner quand ils ont compris qu’on faisait une fiction et qu’on était là pour totalement respecter le site archéologique et surtout le mettre en valeur. »
« On se suivait en file indienne pour qu’il n’y ait qu’une trace à effacer »
À la fin du film, on voit le personnage de Maria Reiche avec un sextant. Cette séquence fait penser au Petit Prince qui regarde les étoiles. Comment on prépare un plan aussi important ?
« Pour le mettre en boîte, on avait 10 minutes. Donc, on le prépare énormément en amont. C’est un plan fixe qu’on avait délimité assez précisément avec les dunes et le ciel. »
Dans vos carnets de tournage, vous expliquez aussi : « Afin de préserver nos (fausses) lignes de Nazca et de limiter les traces dans le désert, nous marchons dans les pas de celles et ceux qui nous précèdent… ». Vous avez pris de nombreuses précautions pour ne pas abîmer le site où vous tourniez ?
« Il y a eu une tentative où il fallait marcher avec des raquettes sous lesquelles nous avions mis de la mousse. Mais les déplacements prenaient trop de temps alors on a fait des pistes : on se suivait en file indienne pour qu’il n’y ait qu’une trace à effacer. »
« La nature est plus importante que nous »
Quand on filme l’un des plus grands mystères de l’histoire de l’Humanité, on cherche soi-même des théories ?
« Je ne pense pas qu’on puisse aller à Nazca, en Sibérie, sur le lac Baïkal en faisant fi de ces questions-là. C’est-à-dire que, quelque part, la nature est plus importante que nous. Ce qu’on voit, c’est plus grand que nous. Même un simple arbre ! Je fais souvent du vélo dans la région de Feurs et sur la route de Bellegarde-en-Forez, avant Saint-Galmier, il y a un chêne qui attire mon attention. Il existait avant moi et il existera après moi. Ça nous renvoie forcément à cette idée d’humilité et qu’on n’est pas grand-chose dans ce monde-là.(2) »
(1) Dans le désert de Nazca, au Pérou, le peuple éponyme (qui se développa entre 100 av J-C et 600 ap J-C) avait tracé des centaines de géoglyphes formant des motifs géométriques aux formes animales invisibles depuis le sol (on ne distingue que les lignes). Leur signification a alimenté de nombreuses théories depuis leur découverte en 1927.
(2) Lady Nazca, de Damien Dorsaz, en présence de Gilles Porte au CinéFeurs vendredi 26 décembre (20 h 30), au Family de Saint-Just-Saint-Rambert lundi 29 décembre (20 heures) et à l’Espace Renoir de Roanne mardi 30 décembre (20 heures).
« À Feurs, j’ai tous mes potes du collège et du lycée »
Gilles Porte a vécu à Feurs de l’âge de 10 à 20 ans et a toujours gardé des liens forts avec la ville : « Ma mère habite toujours à Feurs et elle fait partie de l’association du cinéma. Mais j’ai aussi tous mes potes du collège et du lycée. Ce sont vraiment des amis, des personnes sur qui je peux compter et qui savent que la réciproque est vraie. Je passe très régulièrement à Feurs, j’ai de vrais repères. Dès qu’une occasion se présente, je viens ici pour me ressourcer. Je vais aussi voir mon frère jumeau à Saint-Chamond. »
Le directeur de la photo, césarisé comme réalisateur en 2005 avec Yolande Moreau (César de la meilleure première œuvre de fiction avec Quand la mer monte…), est actuellement engagé dans de nombreux projets : « Là, je prépare une série pour France Télévisions et je viens de terminer LOL 2.0 (2026) (de Lisa Azuelos avec Sophie Marceau). J’assure aussi le suivi du film Le Fils de personne (2026) (de Safy Nebbou avec Romain Duris) qui a été tourné en Thaïlande. Chaque fois qu’on fait un film, c’est une nouvelle histoire, une nouvelle aventure. »
« À Feurs, j’ai tous mes potes du collège et du lycée »
Gilles Porte a vécu à Feurs de l’âge de 10 à 20 ans et a toujours gardé des liens forts avec la ville : « Ma mère habite toujours à Feurs et elle fait partie de l’association du cinéma. Mais j’ai aussi tous mes potes du collège et du lycée. Ce sont vraiment des amis, des personnes sur qui je peux compter et qui savent que la réciproque est vraie. Je passe très régulièrement à Feurs, j’ai de vrais repères. Dès qu’une occasion se présente, je viens ici pour me ressourcer. Je vais aussi voir mon frère jumeau à Saint-Chamond. »
Le directeur de la photo, césarisé comme réalisateur en 2005 avec Yolande Moreau (César de la meilleure première œuvre de fiction avec Quand la mer monte… ), est actuellement engagé dans de nombreux projets : « Là, je prépare une série pour France Télévisions et je viens de terminer LOL 2.0 (2026) (de Lisa Azuelos avec Sophie Marceau). J’assure aussi le suivi du film Le Fils de personne (2026) (de Safy Nebbou avec Romain Duris) qui a été tourné en Thaïlande. Chaque fois qu’on fait un film, c’est une nouvelle histoire, une nouvelle aventure. »