Les recos de Blaise MaoLe livre Correction automatique, d’Etgar Keret

Personne ne maîtrise mieux l’art de la nouvelle que l’écrivain et cinéaste israélien Etgar Keret. En tout cas la nouvelle concise, immédiate, celle qui en deux ou trois pages seulement vous fait sourire ou écraser une larme. Ce savoir-faire était déjà remarquable dans son recueil 7 années de bonheur (L’Olivier, 2013), où Keret mettait en scène sa vie de jeune papa au fil de tranches de vie saisissantes. Il se confirme à la lecture de Correction automatique (L’Olivier, 2025), dont la trentaine de nouvelles dresse le tableau pathétique mais émouvant de notre réalité contemporaine, où l’authenticité semble en péril. La première et la dernière, qui mettent en scène respectivement les candidats d’un jeu de téléréalité extraterrestre et une IA au bord du suicide, sont particulièrement savoureuses. Des textes à picorer de temps en temps plutôt qu’à dévorer, pour mieux en saisir toute la profondeur. 

La série Parlement, de Noé Debré

Difficile d’imaginer sujet moins sexy que l’Union européenne et ses institutions complexes, opaques, désincarnées au possible. Pourtant, la série française, dont la quatrième saison (et les précédentes) est à découvrir sur le site de France TV, réussit le tour de force de faire de l’UE un sujet drôle, léger et excitant. Les intrigues sont toujours subtiles, souvent absurdes, et la mise en scène du choc culturel entre États membres jamais lourdingue. Surtout, tous les personnages, même les plus secondaires, sont attachants – en particulier Samy « the Shark » (impeccable Xavier Lacaille), l’assistant parlementaire aux dents longues, et Eamon, mémoire vivante du Parlement européen en costume trois pièces. Entre deux éclats de rire, on songe aussi à cette question essentielle, rappelée dans l’épilogue de la série : « Qu’est-ce que l’Europe ? Qu’essayons-nous d’accomplir tous ensemble ? » S’ils étaient encore de ce monde, gageons que Jean Monnet et Paul-Henri Spaak, les pères fondateurs de l’UE, auraient adoré binger la série créée par Noé Debré. 

Le film Arco, de Hugo Bienvenu

Marre des dystopies apocalyptiques ? Des futurs bouchés par le sang, les larmes et le collapse sous toutes ses formes ? Alors Arco devrait vous plaire. Tout, dans ce chef-d’œuvre d’animation, est à la fois malin, sensible et audacieux. À commencer par la trame de l’histoire, tellement excitante : un enfant venu d’un futur lointain voyage dans le passé et atterrit par erreur… dans le futur proche. Mention spéciale, aussi, au robot Mikki, plus humain que les humains, ainsi qu’aux trois hurluberlus au look seventies qui poursuivent Iris et Arco, les enfants-héros du film, avant de les aider dans leur quête. « Je voulais faire un film qui donne du courage, de l’espoir, de la joie », nous confiait lors du dernier Festival de Cannes le réalisateur Ugo Bienvenu. Mission accomplie : Arco n’est pas un simple film, c’est un enchantement.