Sur les lignes de front ukrainiennes, une innovation pour le moins inattendue vient bousculer les codes de la guerre moderne. La Russie utilise désormais des hoverboards, ces jouets électriques à deux roues populaires auprès des adolescents et tout droit sortis de la saga Retour vers le futur, comme des robots terrestres kamikazes. Dans une compilation vidéo relayée sur les réseaux sociaux vendredi 2 mai, repérée par le magazine Forbes, plusieurs de ces engins trafiqués sont immortalisés transportant des mines antichars vers des cibles ukrainiennes avant d’exploser à leur contact.

Ce détournement à faible coût incarne une tendance croissante à la militarisation des objets du quotidien dans un conflit où l’économie de moyens devient aussi cruciale que l’innovation technologique.

Ukraine – Russie : les avions militaires de la guerre

Des jouets qui sèment la mort

L’initiative a été lancée à l’été dernier, lorsque l’organisation bénévole russe Dva Mayora a mis au point ce type de drone terrestre à partir de hoverboards grand public et les a distribués à des unités combattantes. En février, des images de camions russes chargés d’hoverboards ont circulé sur la Toile.

Ces appareils, vendus autour de 88 euros, pourraient provenir de commerces, de dons de sympathisants ou encore de pillages dans les zones occupées, où l’armée russe est régulièrement accusée de réquisitionner du matériel civil. Seule certitude : ces jouets ne sont plus utilisés pour le loisir.

La paupérisation de l’arsenal terrestre russe

Contrairement aux drones aériens, omniprésents sur le champ de bataille et responsables de 70% des pertes humaines selon The New York Times, les robots terrestres peinent encore à s’imposer à cause des difficultés liées au relief. Les hoverboards contournent en partie ce problème grâce à leurs gyroscopes internes, qui assurent une bonne stabilité même sur terrain accidenté. Leur vitesse et leur coût dérisoire en font également une solution de choix pour mener des attaques-suicides contre des positions fixes, sans compromettre de matériel sophistiqué ou coûteux.

Mais cet usage tactique pourrait évoluer. Confrontés à la perte de près de 17 000 véhicules blindés et de transport, les forces russes se tournent massivement vers des alternatives civiles comme des scooters électriques, voitures compactes Lada, vieux camions soviétiques, voire des bus. Dans ce contexte de pénurie, il n’est pas exclu que les hoverboards eux-mêmes finissent par être détournés pour transporter des soldats. Pour l’heure, ces objets continuent d’être les symboles d’une guerre d’usure où l’ingéniosité supplée les carences industrielles et où un simple jouet peut devenir un projectile mortel.