LUDOVIC MARIN / AFP
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POLITIQUE – Mettre fin au régime spécial des trois plus grandes villes de France ? Dans les cartons depuis deux ans, la réforme du scrutin à Paris, Lyon et Marseille a franchi un cap mercredi 2 avril à l’Assemblée nationale, en obtenant une approbation large de la commission des lois, présageant d’une possible adoption en séance publique à partir de ce lundi 7 avril. En cas d’adoption, le texte sera examiné à partir du 3 juin au Sénat.
Le texte, qui revient sur la loi Paris-Lyon-Marseille (PLM) du 31 décembre 1982, prévoit essentiellement d’instaurer deux scrutins distincts pour les trois métropoles, l’un pour élire les conseillers d’arrondissement ou de secteur, l’autre pour ceux du conseil municipal, sur une circonscription unique.
Des villes « coupées en deux »
Actuellement, les électeurs votent dans chaque arrondissement pour une liste de conseillers, et les élus du haut de la liste siègent à la fois au conseil d’arrondissement et au conseil municipal.
Un mode de scrutin décrié, qui peut aboutir à l’élection d’un maire ayant réuni une minorité de voix, et qui conduit à ce que l’élection se joue dans une poignée d’arrondissements clés. « Le fait est qu’à Paris, Lyon et Marseille (…) les villes apparaissent coupées en deux. La raison en est que les mairies centrales choisissent de privilégier significativement les arrondissements qui leur ont permis de gagner », défend l’auteur principal du texte, le député de Paris Sylvain Maillard (Renaissance). Autre effet pervers du scrutin institué en 1982 : une moindre participation des électeurs, qui ont « le sentiment récurrent et légitime que leur vote ne sert à rien », pointe-t-il.
À un an des municipales, le texte est notamment défendu par le Premier ministre François Bayrou et par la ministre LR de la Culture, et maire du 7e arrondissement de Paris, Rachida Dati. Cette dernière plaide qu’il s’agit « d’une réforme très attendue par les Parisiens ». Modifier la loi actuelle permettrait selon elle de « rendre la démocratie » aux habitants de la capitale en impliquant un principe : « Un Parisien, un bulletin de vote ».
Chaque camp s’accuse mutuellement de « bidouillage électoral »
Si le texte a aussi reçu des voix du Rassemblement national, de La France insoumise, de Renaissance et du MoDem à l’Assemblée, les détracteurs de cette réforme sont aussi nombreux, notamment dans les rangs de la droite. Le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau a notamment jusqu’à présent montré peu d’enthousiasme pour cette réforme, se faisant l’écho des sénateurs LR dont il était encore il y a peu le chef.
Le député LR Olivier Marleix a, lui, livré un réquisitoire contre un texte qui changerait les règles « à moins d’un an des élections », contrairement « à toute tradition républicaine », et qui n’a pas « été soumis au conseil d’État », Sylvain Maillard ne l’ayant pas souhaité.
Autre critique récurrente : le fait qu’il abaisse la prime majoritaire à 25 %, à rebours de la règle commune, alors même que ses promoteurs assurent vouloir rapprocher le scrutin des trois villes du droit commun. « Je n’y vois pas d’autre explication qu’une condition posée par le RN », a fustigé Olivier Marleix à cet égard.
« Tout ça est un bidouillage qui est incohérent, qui n’est pas financé », a également tancé sur France 3 Provence-Alpes-Côte d’Azur le président Renaissance de la région Renaud Muselier.
La gauche est tout aussi divisée sur le dossier. La maire PS de Paris Anne Hidalgo n’a pas de mots assez durs contre ce qu’elle considère être un « incroyable bidouillage électoral ». « Une loi pour changer le mode de scrutin à Paris, comme si c’était une urgence démocratique ? Mais où on est ? », s’est-elle insurgée sur France Inter le 18 mars. Lui aussi très remonté, le député PS et candidat à la mairie de Paris Emmanuel Grégoire a dénoncé une « usine à gaz dérogatoire avec des fragilités constitutionnelles évidentes ». À l’inverse, le maire de Marseille Benoît Payan (divers gauche) a défendu l’initiative sur franceinfo : « Il n’y a pas de raison que ces trois villes soient traitées différemment ».
Les partisans, comme les détracteurs, d’une réforme de la loi « PLM » sont accusés d’établir leur position en fonction d’intérêts purement électoraux. Dis autrement, ceux qui veulent le statu quo sont soupçonnés de vouloir verrouiller un système qui les avantage, quand ceux qui entendent révolutionner le système sont vus comme des mauvais perdants, fâchés avec les règles actuelles.
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