Il fallait faire la queue pour entrer à l’opéra de Nancy ce mercredi soir, à l’occasion d’un programme de danse. Ce n’est pas chose courante et cela montre toute la réputation du Nederlands Dans Theater, une des plus grandes troupes mondiales de danse contemporaine. La troupe de développement, le NDT 2, était invitée dans le cadre de la programmation du Ballet de Lorraine, une invitation lancée par la nouvelle directrice, Maud Le Pladec.

Les deux pièces présentées ont beaucoup en commun : une très grande technicité, bien sûr, dans le geste, une même indifférenciation des femmes et des hommes dans les costumes, une capacité à danser à l’unisson ou à mettre l’individu à l’écart, des lumières très soignées et identiquement sépulcrales à chaque fois.

Une inversion du programme

Le choix avait été fait de mettre en premier Watch Ur Mouth (« Fais attention à ce que tu dis »), de Botis Seva, une création de mars dernier, au détriment de Folka , qui tourne déjà depuis plusieurs années. Il n’est pas sûr que la stratégie soit la meilleure tant cette dernière propose des images impressionnantes et démontre tout le savoir-faire des danseurs du NDT 2.

Botis Seva propose une drôle de création sur le rôle de la critique, avec huit interprètes en « uniformes ». Sa gestuelle vient du hip-hop. La salle, comble, a apprécié ce travail, parfois un peu lassant, un peu « léger » par rapport à Folka.

Une ligne de têtes

La chorégraphie de Marcos Morau paraît parfois surhumaine dans sa gestuelle, tant les quatorze danseurs exécutent les gestes à grande vitesse. Le plus souvent à genoux, ils laissent leurs mains, leurs têtes, leurs torses se déformer en tous sens, tous ensemble.

Il y a de la sorcellerie dans ce qui se crée sous nos yeux en moins d’une demi-heure, comme ce groupe, serré, uni, en mouvement, capable de laisser un danseur à terre sans que l’on comprenne comment il a pu s’extraire. Comment ne pas être stupéfait par cette ligne de têtes posées sur les unes sur les autres, ou cet accouchement géant, corps glissant de l’union des danseurs d’une manière exquise et précise ?

Folka , sur un fond sonore de chœurs, de souffles des interprètes, vise à nous emmener au fond de nos pensées, de nos rêves, de nos mythes. À elle seule, cette pièce vaut le voyage jusqu’à l’opéra voir ces danseurs déjà si prodigieux.

Seconde et dernière représentation le 9 mai, à 20 h, opéra national de Lorraine.