La nuit est tombée depuis plus d’une heure quand les travaux démarrent dans la lumière des étincelles, à grand renfort d’engins impressionnants. Depuis le mois de février, une cinquantaine d’ouvriers dépêchés par la SNCF et deux sociétés prestataires qui se partagent le marché, s’attellent à remplacer six kilomètres de voie ferrée entre Gambsheim et Drusenheim, sur la ligne Strasbourg-Lauterbourg. Mardi 6 mai, c’est au niveau de la gare de Drusenheim que le chantier évoluait : environ 200 mètres de voie devaient être remplacés. « Nous avons un rendement moyen de 216 mètres par nuit », précise Martin Kedzierski, responsable du chantier.

Le programme est le même chaque soir : il faut d’abord enlever les anciennes voies en acier, qui datent de l’époque allemande, précise-t-il, ainsi que les traverses en béton. Celles-ci, qui pourraient dater des années 1970, « commencent à être de moins bonne qualité ». Le ballast sera remplacé par la même occasion, soit environ 12 000 tonnes pour les six kilomètres concernés par le programme.

Tout ce rebut est ensuite acheminé dans la nuit jusqu’à la plateforme SNCF de Cronenbourg, à Strasbourg, puis déchargé. Les matériaux font l’objet d’un recyclage par des prestataires, ajoute Martin Kedzierski : l’acier des rails sera réemployé, et le béton sera concassé puis réutilisé.

Des passages à niveau aussi modernisés

À Drusenheim, en plein cœur de la nuit, il faut ensuite mettre en place les nouvelles voies : tout doit être prêt pour le passage du premier train de la journée, partant de Roeschwoog à 5 h 48 en direction de Strasbourg. Car toute la contrainte est là : pouvoir avancer sur le chantier entre 22 h et 5 h, tout en « rendant » les voies à la circulation normale la journée, pour les voyageurs et le fret. Les chiffres ne sont pas connus avec certitude, mais la Région Grand Est avance le nombre de 120 000 usagers du train circulant chaque année en moyenne dans chacune de ces gares situées sur la ligne Strasbourg-Lauterbourg.

C’est d’ailleurs la Région qui finance la majorité de la facture totale des travaux : sur 12,6 millions d’euros, elle en prend 6,4 millions à sa charge. L’État abonde pour cinq millions, et la SNCF participe à hauteur d’un million d’euros. Le chantier comprend aussi le remplacement de certains câbles, ainsi que des travaux sur trois passages à niveau, à Gambsheim, Offendorf et Drusenheim, précise Isabelle Justine-Canivex, responsable maîtrise d’ouvrage sur les « lignes de desserte fine ».

Aussi dans le secteur de Beinheim en 2026

Cet investissement important intervient après un certain désintérêt des autorités publiques pour les lignes ferroviaires dans cette partie d’Alsace du Nord, reconnaît Thibaud Philipps, vice-président de la Région Grand Est délégué aux transports. « Or, après le Covid, le train est apparu comme la solution pour décarboner les mobilités », ajoute l’élu. À travers ce programme de modernisation, la collectivité, poursuit-il, compte faire de la ligne Strasbourg-Lauterbourg « une ligne structurante véritablement incluse dans le Réseau express métropolitain européen [ou Reme, lancé en 2022, ndlr] », en parallèle de celle qui relie la capitale européenne à Wissembourg.

Pour les Alsaciens habitant le long du Rhin, les travaux de renouvellement des voies ne sont pas terminés : le secteur de Beinheim sera concerné en 2026 par un chantier similaire, sur une distance totale de quatre kilomètres. Un ouvrage d’art sera également concerné, ajoute Isabelle Justine-Canivex.