Publié le
9 mai 2025 à 10h50
Le Théâtre du Nord à Lille (Nord) ne manque pas de pépites culturelles à vous présenter. Parmi celles du mois de mai 2025, notons la performance de Grégori Miege et son spectacle Comme tu me vois, récits d’une grossophobie ordinaire. Il aborde un sujet de société, en abordant sa propre histoire. Après Lille du 14 au 17 mai, l’artiste ira jusqu’à Avignon cet été pour présenter cette création.
Un monologue de 75 minutes
C’est un stigmate qui déclenche le rejet, le ricanement et les humiliations quotidiennes. Le comédien, Grégori Miège, les a vécus dans sa chair et son âme. Et il affirme avoir appris à » ne jamais cacher sa singularité « . Il l’assume ici sur scène dans un spectacle émouvant.
Des données statistiques, d’éléments d’analyse sociologiques, des témoignages et surtout des écrits biographiques ou autobiographiques, ont été rassemblés par deux chercheur et chercheuse en sciences sociales et un homme de théâtre. Le tout est réuni dans ce monologue d’1h15.
« Honte » en lettres immenses
Le spectacle part à Avignon en juillet. ©Frédéric Iovino
Résultat : un seul en scène dans lequel les postures de corps ont autant d’importance que les mots. Sur un plateau dépouillé, devant une enseigne géante « Honte », le comédien livre sa vérité.
Le spectateur manifeste d’emblée sa tolérance puis sa sympathie et sa solidarité. Envers ce jeune garçon, par exemple. Élève de cinquième qui a passé toutes les semaines de ses vacances, entouré par sa famille à lutter contre son poids et qui la veille de la rentrée affiche un glorieux « moins 7 ». Sept kilos de gagnés, c’est-à-dire perdus.
Larmes aux yeux
Sa nouvelle confiance s’effondre en un instant quand un autre élève lui assène un : « Tu as bien profité de l’été gros lard ». Le spectateur reçoit avec lui l’humiliation et en a alors les larmes aux yeux.
Grégori Miege est un habitué de la grande salle du Théâtre du Nord. On l’a découvert dans le Peer Gynt de David Bobée, torse nu, étalant son surpoids. On l’a vu surtout en Monsieur dimanche, un personnage très ridicule du Dom Juan de Molière. Destiné à faire rire à ses dépens comme représentant de ces bourgeois enrichis, devenus créancier servile des aristocrates. Il en avait fait un morceau de bravoure, déclenchant la sympathie et l’empathie du public. Avec l’aide du Théâtre du Nord qui le produit, il crée ici ce qui sera incontestablement un grand morceau de théâtre.
Sept fauteuils adaptés pour les spectateurs en situation d’obésité
Le Théâtre du Nord, sous l’impulsion de David Bobée, est engagé dans une lutte permanente contre les discriminations. Non seulement sur scène, mais aussi dans son organisation d’accueil. Après l’accessibilité des PMR, personnes à mobilité réduite, l’accès des mal voyants, des mal entendants, le TDN permet l’accessibilité des personnes obèses en leur réservant sept fauteuils adaptés, à l’occasion de ce spectacle, pour une transformation définitive.
Il lui restera à permettre l’accessibilité pour les personnes en situation de handicap cognitif. Celles qui ne peuvent se concentrer trop longtemps et ont besoin de se lever, ou d’exprimer tout haut leurs réflexions en rendant la situation difficile pour leurs voisins.
Un spectacle militant
Son spectacle sera joué au théâtre, et la visibilité qui lui sera donnée lors du festival d’Avignon pour une vingtaine de représentations au théâtre du Train Bleu devrait déclencher une longue tournée.
Le spectacle peut aussi se jouer partout, dans une salle de classe, un séminaire d’entreprise, un service hospitalier. S’adaptant à tous les formats, il est susceptible d’aller à la rencontre de tous les publics pour faire accepter cette différence.
Jean-Michel Stievenard
« Comme tu me vois, récits d’une grossophobie ordinaire ». Présenté au Théâtre du Nord, dans la grande salle, mercredi 14 mai à 20 h ; jeudi 15 à 14 h 30 et à 19 h ; vendredi 16 à 20 h, et samedi 17 à 18 h. Puis pour l’avant Avignon, au Théâtre du Train Bleu du 5 au 24 juillet à 18 h 45. Le texte intégral écrit par Marielle Touze, Grégori Miege et Arnaud Alessandrin est publié chez L’Harmattan, collection théâtres, 91 pages, 13 €.
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