Le télescopage souligne la gravité de la situation. Alors que le ministre de la Justice Gérald Darmanin a rendu publique, vendredi, une circulaire demandant aux procureurs de la République la plus grande fermeté contre le fléau des rodéos urbains, l’actualité fournit une dramatique illustration de ce type de délinquance routière.
Tôt, ce samedi 10 mai, à Évian-les-Bains (Haute-Savoie), un pompier volontaire qui tentait de mettre fin aux « drifts » (survirages) bruyants et dangereux de plusieurs voitures devant la caserne a été percuté — apparemment volontairement. Cet homme de 38 ans se trouve dans un état critique.
La veille au soir, à Bordeaux (Gironde), les forces de l’ordre avaient dû intervenir dans des conditions difficiles pour faire cesser un rodéo urbain rassemblant environ 500 voitures et près de 3 000 personnes…
Je demande aux procureurs de la République la plus grande fermeté contre le fléau des rodéos urbains, qui pourrit la vie de nombreux français. Ils devront désormais saisir systématiquement les véhicules impliqués dans des rodéos et, comme la loi le permet, les vendre ou les faire…
— Gérald DARMANIN (@GDarmanin) May 9, 2025
Les procureurs « devront désormais saisir systématiquement les véhicules impliqués dans des rodéos et, comme la loi le permet, les vendre ou les faire détruire avant même le jugement. Stop à l’impunité ! », avait insisté le garde des Sceaux vendredi sur X en rappelant que ce fléau « pourrit la vie de nombreux Français ».
Des nuisances quasi quotidiennes avec parfois des drames à la clé
Des nuisances quasi quotidiennes à l’échelle du territoire, le terme urbains ne limitant pas ces rodéos aux grandes villes ou zone périurbaines. Avec, parfois, des drames à la clé. Et des vies fauchées par l’insouciance ou la volonté délibérer d’enfreindre les règles de conduite et la loi. Les victimes sont les auteurs eux-mêmes ou des tierces personnes, des piétons le plus souvent.
L’affaire Dominici : les mystères d’un triple meurtre
Crime story raconte chaque semaine les grandes affaires criminelles.
L’un de ces cas tragiques les plus récents remonte à 2024 à Brest (Finistère). Dans la nuit du samedi 30 au dimanche 31 mars 2024, un automobiliste de 26 ans s’est lancé dans une course sauvage sur le port, roulant à au moins au moins 110 km/h, et heurtant de plein fouet deux jeunes piétons sur un passage protégé.
Projetée à plusieurs mètres, Alice, 24 ans, a succombé quelques heures après le choc d’une très grande violence. Le chauffard, sans permis et sous influence de stupéfiants, a été condamné à 10 ans de prison en mai.
Un délit passible d’un an de prison
À moto, à scooter ou en voiture, le rodéo — « source de dangers et de nuisances », résume un policier — n’est pas un phénomène récent. Il a connu une recrudescence depuis la fin des années 2010, tendance observée aujourd’hui, notamment dans certains départements d’Île-de-France.
En 2017, la police avait constaté en zone urbaine près de 9 000 rodéos — aussi appelés cross bitume —, selon des chiffres livrés à l’Assemblée nationale lors d’une discussion de proposition de loi en juillet 2018. La même année, ces rodéos ont provoqué 6 600 interventions en zone gendarmerie. En 2022, près de 18 000 interventions ont été réalisées par la police nationale. La période concentrant le plus de faits va du printemps à l’automne, quand la météo est, en principe, favorable.
La loi du 3 août 2018 renforçant la lutte contre les rodéos motorisés a créé un délit spécifique. L’auteur d’un tel comportement, dangereux, délibéré et répété, est passible d’un an d’emprisonnement, 15 000 euros d’amende, mais aussi d’une annulation du permis et la confiscation du véhicule incriminé. Ce que vient de rappeler la circulaire de Gérald Darmanin. Des peines potentiellement plus lourdes en cas d’infraction commise en réunion (à plusieurs) ou dans d’autres circonstances aggravantes.
Un recours possible aux drones
Très souvent compliquée, la lutte sur le terrain bénéficie depuis peu du recours possible aux drones, qui permettent d’identifier les auteurs de rodéos motorisés et de procéder à leur interpellation différée et moins risquée.
Des comportements irresponsables se soldent parfois par des conséquences dramatiques, avant même toute possibilité d’intervention des policiers ou des gendarmes. Comme cela est, hélas, survenu à Evian.