“Encore un peu et on nous laissera opérer.” Sous un post du groupe Typichny Feldsher (“Le feldsher typique”) publié sur le réseau social russe VKontakte, les commentaires ironiques s’enchaînent, comme le souligne le média russe Takie Dela, après l’annonce du nouvel arrêté du ministère de la Santé russe.
À partir du 1er septembre, les feldsher, des praticiens paramédicaux exerçant dans les “infirmeries [des entreprises du secteur de l’industrie], les cabinets de médecine générale, les ambulances ou les polycliniques” pourront légalement assurer le suivi gynécologique des patientes, prescrire des médicaments, voire assister des accouchements, rapporte le journal moscovite Kommersant.
Cette délégation de tâches pourra être décidée par “le chef d’établissement médical en cas de manque de spécialistes diplômés” en médecine. Une situation qui n’a rien d’exceptionnel en Russie ces dernières années.
“Plus de 3 600 postes de gynécologue obstétricien et 1 730 de néonatologue restent vacants dans le secteur public”, rappelait en 2024 le professeur russe Gennady Sukhikh, directeur du Centre national de recherche en obstétrique et gynécologie, cité par Kommersant. En cause, selon lui, le non-respect des obligations d’affectation par une partie de jeunes diplômés, malgré une formation entièrement financée par l’État.
La version précédente de l’arrêté, en vigueur depuis 2012, permettait déjà aux feldsher d’“exercer comme thérapeute, pédiatre ou médecin généraliste” dans les structures sous-dotées sur décision du chef de service, indique Takie Dela, un média qui écrit sur les problèmes sociétaux en Russie. Désormais, les missions de gynécologie s’ajoutent à la liste.
“Qui sera tenu pour responsable ?”
“Dans certaines régions rurales, il manque jusqu’à 70 % des effectifs nécessaires”, selon les chiffres cités par Yan Vlasov, coprésident de l’Union nationale des patients. “La situation est encore pire parmi le personnel soignant de niveau intermédiaire”, explique-t-il à Takie Dela. Pointant du doigt “des salaires très bas, des conditions de travail mauvaises, l’absence de perspectives de carrière”, Vlasov dénonce un système qui pousse à “remplacer les médecins par des personnels paramédicaux moins coûteux à former”. “Ces personnels sont plus vite opérationnels et moins chers à rémunérer”, confirme Novaïa Gazeta Europe, qui note que les effectifs de feldsher sont eux-mêmes en forte baisse.
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